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Allemagne > Gazoduc: Un projet gazier fait des vagues sur une île de la Baltique

C'est la vue imprenable sur la baie qui a attiré Melanie Schmid à Rügen, joyau de la mer Baltique qu'elle pourrait quitter à cause d'un projet d'installation de terminal gazier au large de l'île.

Par panorama papers
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Par Arlette Akoumou Nga Avec Afp

Pour remplacer les approvisionnements en gaz russe, le gouvernement allemand installe depuis un an, au pas de course, des plateformes pour importer du GNL, du gaz naturel liquéfié, tout le long de ses côtes. Depuis que les habitants de Rügen ont appris que le port de Mukran, à quelques encablures des plus célèbres falaises de craie du pays, allait à son tour accueillir un terminal, ils ne décolèrent pas.

Melanie Schmid, agricultrice biologique qui élève des moutons et cultive des noix, craint de “ne plus pouvoir dormir” à cause du bruit que feront les installations destinées à traiter le Gnl. Une partie des 65.000 habitants de l’île mène la fronde depuis plusieurs mois, multipliant manifestations, pétitions, pour dire leur inquiétude face aux possibles répercussions sur l’environnement et l’activité touristique.

“N’y a-t-il pas d’autres endroits de la Baltique ou de la mer du Nord qui auraient moins d’impact sur la nature, sur les gens, sur le tourisme que l’île de Rügen ?”

interroge Karsten Schneider, le maire de Binz, une station balnéaire de l’île.

Sable blanc, cabines de plage à l’ancienne, mer bleu lagon, lande sauvage, Rügen est une destination de vacances prisée, également connue pour sa faune, sa flore et ses réserves naturelles.

Sécurité

Le décor de cette “perle de la Baltique” cadre mal avec la vision d’immenses navires méthaniers venant livrer leur GNL aux plateformes de regazéification que le gouvernement veut amarrer à Mukran.

“Un port industriel n’a tout simplement pas sa place ici”, tranche Thomas Kunstmann, 64 ans, l’un des organisateurs d’un groupe local de militants. Un nouveau gazoduc autour de l’île pourrait également perturber l’écosystème, en passant directement par les aires de reproduction des harengs, affirme M. Kunstmann. L’impact sur l’environnement a été évalué, assure le ministère de l’Economie et du Climat, dirigé par le ministre écologiste Robert Habeck. Sous pression des opposants, le gouvernement a déjà réduit la dimension du projet initial mais n’entend pas renoncer.

“Nous n’avons remplacé qu’un quart des capacités d’approvisionnement (en gaz, ndlr) perdues” et provenant auparavant de Russie, a fait valoir M. Habeck lors d’une visite sur place, réitérant l’importance de diversifier les fournisseurs. Le flux russe, qui approvisionnait l’Allemagne en gaz bon marché, s’est tari depuis le début de l’invasion russe de l’Ukraine, Moscou ayant d’abord réduit ses livraisons à l’Europe, avant de devoir les interrompre complètement après le sabotage, toujours inexpliqué, du gazoduc Nord Stream il y a huit mois.

L’Allemagne est parvenue à éviter une crise économique majeure cet hiver en se tournant notamment vers l’importation de GNL dont les Etats-Unis et le Qatar sont d’importants fournisseurs. Trois terminaux méthaniers flottants ont été mis en service depuis fin 2022, grâce aux milliards d’euros débloqués par Berlin. D’autres plateformes sont en cours d’aménagement.

Sur Rügen, on doute de l’utilité de ces capacités supplémentaires :

“Il semble que nous allons passer l’hiver prochain sans problème majeur”.

affirme M. Schneider, le maire de Binz, puisque les pénuries ont pu être évitées jusqu’ici.

Un “tampon de sécurité” est cependant nécessaire pour garantir l’approvisionnement en énergie contre de possibles baisses des importations en cas “d’accidents, de sabotages ou d’autres événements extérieurs”, dans un contexte géopolitique plus tendu que jamais, affirme le ministère de l’Economie.

Il souligne aussi que les terminaux mis en service se concentrent au nord-ouest de l’Allemagne dont les réseaux sont saturés, tandis que des installations au niveau de la mer Baltique, plus à l’est, permettront d’équilibrer la desserte du territoire.

Le gaz, liquéfié ou pas, est “un combustible fossile nocif pour le climat”, rétorque M. Kunstmann. Kai Gardeja, responsable du tourisme de la commune de Binz, s’inquiète lui du risque d’augmentation du trafic maritime et des nuisances sonores qui pourraient rebuter les visiteurs. Ce ne sera pas le cas du retraité Manfred Steiner, 88 ans, certain de revenir malgré tout: “C’est tout simplement formidable ici”.

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