Par Léopold DASSI NDJIDJOU
Le label café arabica sera bientôt protégé à l’Organisation africaine de la propriété intellectuelle (Oapi). C’est en liesse que les acteurs de la filière et la population de Koutaba ont appris cette bonne nouvelle. « Comme à Penja avec le poivre, je vous assure, les jeunes gens vont quitter les villes et même la diaspora pour retourner ici et s’investir dans le café arabica », assène sous les youyous Pascal Atangana Balla, le chef de la cellule des stratégies technologiques et de la propriété industrielle (Cstpi), expert du ministère des Mines, de l’innovation et du développement technologique (Minmidt).
Désormais assure-t-il, tous les maillons de la chaîne du café arabica, doivent s’impliquer davantage pour obtenir un travail de qualité, un café sans nul pareil dans le monde, avec toutes ses arômes particulières. Sur ce point d’ailleurs, l’expert reconnaît ouvertement que ce café est à défaut d’être l’un des meilleurs, le meilleur du monde. Pour la circonstance de l’annonce qui est la fête de café qui se célèbre chaque année au mois de novembre, la présidente de la Copagro, Patricia Tomaïno Ndam Njoya, a conduit une délégation dans les installations du Monastère de Koutaba qui est membre de la Copagro et aussi dans les plantations Adamou Ndam Njoya, pour la découverte des pans d’une pratique culturale originale. Ainsi chez les moines, en dehors de l’expert du Minmidt, il y avait la « spécial guest » venue du Nigéria, l’ancien ministre des Finances de la République fédérale du Nigéria, Nenadi Usman, par ailleurs sénateur de l’Etat du Kaduna, chairman de Neuf services limited engagé dans le secteur du café de qualité.
Tout commence par la visite de la pépinière. Ici, on apprend que les semences sont choisies avec les plus grands soins pour conserver l’authenticité du café arabica d’origine. Après, la délégation a poursuivi le tour de propriété avec le service de séchage, calibrage et triage du café. Une trentaine de femmes sont à la manœuvre, et trient à la main, grain après grain. Un travail d’orfèvre, absorbant qui demande toute l’attention.
Après la sélection des grains, il y a la torréfaction et le conditionnement. Toutes ces étapes, faut-il le dire sont assurées artisanalement, ce qui fait le goût unique de ce café. L’autre étape a été la visite de la plantation Adamou Ndam Njoya. Cette année, la délégation n’a pas visité les installations mais plutôt les caféiers. C’est en voiture que cela est faite. Ici, la délégation est rejointe par la représente du ministre de la recherche scientifique et de l’innovation (Minresi). On tient ici à allier la protection de l’environnement à la culture du café. Les arbres centenaires côtoient les tiges de caféier. Il est question, explique Patricia Ndam Njoya, d’associer le tourisme à la culture du café. Dans un proche avenir, ajoute-t-elle, il va falloir inscrire sur chaque arbre son nom scientifique pour permettre aux visiteurs d’apprendre ou d’y faire de l’excursion, de l’écotourisme. Cette initiative est d’ailleurs approuvée par l’expert qui assure qu’il y a un lien direct entre la qualité du café et l’environnement dans lequel il est cultivé.
La fête du café à la Place du café
Koutaba, dans le Noun. Ville du café ! C’est le lieu de le dire car la Copagro a donné un coup d’accélérateur dans sa volonté de faire du café arabica un produit labellisé, un savoir-faire du terroir ancré dans les traditions du café. « Leadership et responsabilité organisationnels historiques, gages durables de dynamique et de progrès au service de la communauté », sont les maîtres mots qui éclairent la détermination de cette coopérative agricole. Le maire de Koutaba, dans son mot de bienvenue, a salué la présidente de la Copagro de poursuivre sans encombres l’initiative du Dr Adamou Ndam Njoya, lui qui a institué la fête du café il y a 14 ans. Quant à Patricia Ndam Njoya, elle est revenue non pas seulement sur l’histoire du café au Cameroun (introduit dans les années 1900) et dans le Noun mais aussi sur les vertus du café, la boisson la plus consommée au monde. Elle a de ce fait indiqué que le café est plus consommé dans les pays qui ne le cultivent pas. L’autre temps fort a été l’exposé de l’expert du Minmidt aux caféiculteurs de la Copagro sur la protection des produits du terroir, la qualité liée à l’origine en indication géographique et marque collective. Un moment d’appel à plus d’ardeur pour une marque déposée du café arabica. La fête s’est achevée par une visite des stands où le café et ses produits dérivés étaient exposés, tout comme les autres produits vivriers du cru. Le café chaud a été servi à profusion à l’assistance.
Réactions :
Pascal Atangana Balla, chef cellule des stratégies technologiques et de la propriété industrielle (Cstpi)
« Un savoir-faire traditionnel qu’il faut préserver »
« La fête du café est une activité privée organisée par les producteurs de café et à la tête de ces producteurs de café, il y a Madame la maire de la commune de Foumban et le père Etienne Harding Mboule du monastère de Koutaba. C’est une belle initiative qui va en droite ligne avec la politique du gouvernement, qui valorise les produits du terroir de qualité liée à l’origine. Il s’agit ici de faire du café une Indication géographique au même titre que le poivre de Penja ou le miel d’Okou. Par produit de qualité lié à l’origine, vous comprenez que le café arabica de l’Ouest pour parler dans l’ensemble est un café de référence aujourd’hui, un café recherché, un café sollicité, sa valorisation est impératif. Le ministère des Mines, de l’innovation et développement technologique (Minmidt) a mis en place des missions et je suis ici dans le cadre d’une mission du Minmidt qui m’a mis en mission depuis pratiquement six mois, pour aller de par le pays pour accompagner ceux qui ont de telles initiatives et moi j’ai été envoyé ici pour accompagner les producteurs et tous ceux qui sont acteurs dans la production, la valorisation, la commercialisation du café arabica de l’Ouest, le café arabica de Koutaba, la café arabica du Noun, le café arabica de Foumban, la café arabica du Nord-Ouest, bref la café arabica que nous connaissons et que nous consommons avec appétit. Le café arabica du Cameroun est le meilleur au monde. Ça fait dix ans que des études sont menées sur ce café, il faut que ceux qui le produisent, ceux qui sont les acteurs sur ce café aient le retour sur investissement. Quand on parle de produit de qualité d’origine, cela veut dire qu’il y a un savoir-faire traditionnel qu’il faut préserver. »
Nenadi Usman, sénateur de l’Etat du Kaduna, ancien ministre des Finances du Nigéria, chairman de Neuf services limited dans le secteur du café
« Former 1000 jeunes dans le bisness du café »
« Je félicite d’abord la présidente nationale de l’Union démocratique du Cameroun (Udc), je vois qu’elle aime son peuple et son peuple l’aime bien. Elle veut le développement et particulièrement celui du café. Je suis sincèrement honoré d’être ici aujourd’hui. La raison principale pour laque je suis là est que nous avons une société appelé Neuf ici au Cameroun. Nous faisons les affaires et dans le secteur du café entre autres. C’est pour cela que nous avons récemment signé un contrat avec le gouvernement du Cameroun, pour former 1000 jeunes dans le bisness du café. Nous avons l’habitude d’importer le café des firmes allemandes et autres. Même là, nous n’avons pas pu avoir la qualité du café qui vient du Cameroun. C’est pour cela que nous voulons apporter notre expertise dans la chaîne du process du bizness du café. C’est-à-dire de la pépinière à la tasse. Nous ne voulons pas continuer à importer le café ailleurs comme en Allemagne. Nous allons plutôt nous tourner vers le Cameroun qui est proche et moins cher. »
Etienne Harding Mboule, Prieur du monastère de Koutaba
« La protection du café arabica de l’Ouest »
« Le monastère de Koutaba est membre de la Copagro, cette coopérative pour le café des plantations Ndam Njoya, donc nous assistons là à la journée du café. A l’issue d’une telle journée, on espère que le café sera mieux connu, mieux apprécié, nos plantations, nos productions seront mieux appréciées et surtout espérer avoir du soutien à long ou à court terme pour un projet qu’on a ici avec Madame le maire de Foumban, la protection du café arabica de l’Ouest, en indication géographique. C’est un gros projet. Nous espérons qu’à force de faire connaître notre café, nos plantations de production pourront incidemment aussi recevoir un soutien dans ce sens-là. »
Propos recueillis par L.D.N.