Par Joseph OLINGA N.
Le communiqué signé par Reporters sans frontière (Rsf), le 9 février 2023, est sans équivoques. L’organisation non gouvernementale affirme que l’enquête en cours, sur l’assassinat du lanceur d’alerte, animateur et journaliste, Marinez Zogo, est désormais concentrée sur le rôle joué par le ministre camerounais de la justice, Laurent Esso.
«On a les preuves qu’il est fortement impliqué»
confie Reporters sans frontière qui cite un enquêteur.
Selon la correspondance de Reporters sans frontière, Laurent Esso qui est à son sixième mandat consécutif dans le gouvernement camerounais fait l’objet d’une surveillance accentuée depuis quelques jours.
Les preuves de l’implication de l’un des plus anciens membres des gouvernements mis en place par le chef de l’Etat camerounais, Paul Biya, est renforcée par l’exploitation des téléphones portables de certains suspects déjà en détention au Secrétariat d’Etat à la défense (Sed).
«L’implication de l’homme d’affaire Amougou Belinga se précise et l’étau se resserre autour du garde des sceaux Laurent Esso, l’un des piliers du régime camerounais.»
Reporters sans frontière qui a eu accès à certains éléments du dossier explique que l’implication du ministre camerounais de la justice est le fruit des témoignages des six membres du commando ayant exécuté Martinez Zogo.
«Les témoignages des six membres du commando, principalement recrutés en dehors de Yaoundé comme l’a appris Rsf, corroborent celui de Justin Danwe.»
L’appel au garde des sceaux
Dans le même temps, relève le communiqué de Reporters sans frontière,
«La présence sur la scène de crime de Jean Pierre Amougou Belinga est également étayée par des témoignages et d’autres éléments de preuves.»
Plus précis, Reporters sans frontière souligne que
«L’exploitation des téléphones des suspects, notamment, a permis de vérifier les appels entre Jean Pierre Amougou Belinga et Justin Danwe ainsi que celui passé au garde des sceaux Laurent Esso dans la soirée du 17 février 2023. »
Autre preuve accablante, Reporters sans frontière évoque les traces d’un paiement de 35 millions de Francs Cfa (environ 53 mille Euros) qu’aurait fait parvenir Amougou Belinga au lieutenant Colonel Justin Danwe.
«Ces fonds auraient transité par via le compte du colonel Etoundi Nsoe.»
L’ancien commandant de la Garde présidentielle a été incarcéré le 6 février dernier au même titre que le directeur des médias du groupe L’Anecdote, Bruno Bidjang.
Huit journalistes en ligne de mire
Les éléments de l’enquête révélés par Reporter sans frontière souligne que l’exploitation de Martinez Zogo permet d’affirmer que l’homme a reçu des menaces de mort une semaine avant le jour fatidique. Dans un enregistrement audio consulté par Rsf, le jornaliste s’inquiétait dès le 9 janvier-une semaine avant sa mort- d’avoir été contacté par un homme «très proche» de l’homme d’affaire Amougou Belinga.
«Ce dernier lui avait signifié que l’homme d’affaire « voulait en finir avec lui » ainsi qu’avec au moins huit autres journalistes camerounais.»
Des sources concordantes, l’affaire désormais passée entre les mains de la justice militaire devrait aboutir à la mise sous mandat de dépôt à la prison centrale de Yaoundé des 31 premiers suspects déjà interpellés par la commission d’enquête mixte police-gendarmerie. Mise en détention qui devrait intervenir ce jour, 10 février 2023.
Des influenceurs parmi les suspects
A l’instar de la correspondance de Reporters sans frontière, des sources proches du dossier indiquent qu’au moins une centaine de personnes sont considérées comme des suspects dans l’enquête relative à l’assassinat de Martinez Zogo.
Reporters sans frontière indique également que
«les auteurs des opérations de désinformation, qui se succèdent depuis le début de cette affaire et ayant également visé Rsf, pourraient notamment être inquiétés.»
Reporters sans frontière, citant des sources proches de l’enquête souligne que
«les enquêteurs affirment avoir mis la main sur plusieurs preuves de paiements effectués par le clan Belinga-allant de quelques centaines à plusieurs milliers d’Euros-dans le but de discréditer les informations lui étant défavorables, de la réhabiliter ou de créer des diversions pour influencer l’enquête ou l’opinion publique.»
Un dossier qui implique une vingtaine de lanceurs d’alerte et influenceurs médiatiques.