Par Joël Onana
De sources internes au ministère du Commerce, la décision prise par la Dg par intérim de l’Anor vise exclusivement le fer à béton Fe450, qui n’est pas reconnu par la norme en vigueur au Cameroun. « La désignation des aciers constitutifs des produits couverts par la présente norme comporte essentiellement l’indication de nuance : Fe500 et Fe400 pour les barres d’acier à haute adhérence (HA) et Fe235 et Fe215 pour les barres d’acier lisse, encore appelées ‘’rond lisse’’ », peut-on lire à la page 3 du document portant norme camerounaise NC 236 : 2021 pour « acier pour béton armé : fer à béton ».
C’est donc fort de l’inexistence du fer Fe450 dans la norme camerounaise que le ministre du Commerce a saisi l’Anor le 15 octobre 2024, suite à une dénonciation de l’Organisation camerounaise des industries de transformation de l’Acier (Ocita). En effet, apprend-on de bonnes sources, quelques jours auparavant, cette organisation corporatiste a révélé au ministre du Commerce la mise sur le marché camerounais par la société Acero Metal Sarl (Ams), d’un fer à béton « qui ne correspond à aucune norme camerounaise en vigueur », indique le ministre, mais pour lequel un certificat de conformité a été délivré au producteur par l’Anor.
Effondrements des édifices
« Dans sa correspondance, l’Organisation camerounaise des industries de transformation de l’acier soulève également la question fondamentale des risques qui pourraient découler de l’utilisation de ce produit non homologué pour la sécurité des bâtiments et celle des populations », souligne Luc Magloire Mbarga Atangana dans sa correspondance du 15 octobre 2024 à la Dg par intérim de l’Anor. Tout en sollicitant de la responsable de cette institution publique le retrait aussi bien du certificat de conformité délivré à Acero Metal, que des produits déjà mis sur le marché, ce membre du gouvernement annonçait déjà des mesures conservatoires prises par son département ministériel.
« Pour ma part et au nom du principe de précaution, je donne instruction à la Brigade nationale des contrôles et de la répression des fraudes de mon département ministériel, de procéder à la saisie conservatoire de ces marchandises, en attendant la relecture, par vos soins, de la Norme NC 236 : 2021 acier pour béton armé : fer à béton », écrit le ministre du Commerce, dont le vœu a été exaucé par l’Anor seulement 24 heures plus tard.
Cette nouvelle affaire autour du fer à béton, dont la qualité douteuse de certains produits à encore causé des effondrements des édifices dans le pays ces dernières années, avec des morts à la clé, questionne la rigueur qui devrait logiquement entourer la délivrance des certificats de conformité à l’Anor. En effet, il est loisible de se poser la question de savoir comment un produit non homologué peut réussir à obtenir un certificat de conformité du gendarme de la normalisation.
L’on se souvient qu’en 2015, suite à une dénonciation de l’Association des raffineurs des oléagineux du Cameroun (Asroc), en rapport avec la non-conformité de l’huile raffinée «Jadida» importée de Tunisie par la société Coppeq Sarl, l’Anor avait confessé avoir délivré un certificat de conformité sur cette huile végétale, « malgré les non-conformités jugées mineures par les experts ayant travaillé sur le dossier ».