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Cameroun > Ferdinand Ngoh Ngoh: Le dernier fusible avant Biya qu’on veut faire sauter

L’annonce mensongère de son passage devant le juge du Tribunal criminel spécial (Tcs) soulève de toute évidence un pan de voile sur la stratégie de certains à faire sauter le dernier rempart avant le graal.   

Par panorama papers
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Par Joël Onana

Que de controverses et de quolibets autour d’une audition qui n’a jamais eu lieu ! Il y a de toute évidence anguille sous roche ! La bataille communicationnelle est à la dimension du fantasme réel ou supposé entretenu autour de l’action au quotidien du Secrétaire général à la présidence de la République (Sgpr) et par ailleurs ministre d’Etat au sein de l’équipe gouvernementale de chief Joseph Dion Ngute du 4 janvier 2019. Lui qui est en poste depuis le 9 décembre 2011, il bat les records de  longévité au poste, est dans une zone de turbulence depuis près de trois ans. On aura tout dit de lui, accusé de tout, une sorte de bouc émissaire de toutes les dérives managériales sur les grands dossiers à caution de la République.

Tout se passe exactement comme si une intelligence derrière la scène chauffe à blanc les  esprits contre le principal collaborateur du chef de l’Etat. Tenez deux exemples ! S’agit-il de l’organisation foireuse de la Can 2019 ou des dérives annoncées au cours de celle de Can 2022 ? Le paravent est vite trouvé : C’est Ferdinand Ngoh Ngoh ! Quand le scandale de la gestion des fonds Covid éclate, le nom de dédouanement qui traîne sur les lèvres est, on s’en doute, Ferdinand Ngoh Ngoh.  Dans l’avalanche de feux nourris sur sa personne, les adjuvants se sont réduits comme peau de chagrin, le laissant seul face aux dents acérées de la vindicte populaire. C’est un fait irréfutable qu’au sein de l’opinion, le Sgpr, a été hâtivement perçu comme l’acteur de toutes les dérives annoncées au sommet de l’Etat.

La fausse annonce de sa convocation devant le juge du Tcs, est de ce fait une sorte d’espérance de ses adversaires politiques, une sorte de match avant l’heure, qui dessinerait le diable au mur en espérant le voir s’incarner contre le principal collaborateur de Paul Biya. Que n’a-t-on entendu ces derniers jours sur le sort du natif de Minta ! « Descente aux enfers », « fin de parcours », excipant ainsi le piaffement d’impatience des prétendants à son fauteuil à tout au moins. Lui qui pendant plus de dix ans aura été le fusible auprès de Paul Biya, semble subir des coups de plus en plus pressants, certainement pour le faire sauter. Il va sans dire qu’au sein du biotope politique et administratif, la délégation permanente de signature que lui a octroyée le décret présidentiel du 5 février 2019, comme du reste il en été de ses prédécesseurs, est curieusement perçue par ses adversaires ou ses détracteurs comme une arme nucléaire, donc de destruction massive pour celui et ceux qui s’attaqueraient à lui avec effronterie et hardiesse. Au mois de mai de la même année, le texte de cette délégation avait commencé à tourner en boucle sur les réseaux sociaux, soulevant des vagues d’émotions contrariées de la classe politique.

Au finish, la délégation permanente de signature dont ont pourtant bénéficié tous les Sgpr, donne des soucis à une frange importante de la classe politique, même au sein de l’opposition « Cette délégation permanente de signature est la preuve que Monsieur Biya est au bout du rouleau et c’est difficile de donner du tort à ceux qui estiment que les manœuvres malsaines et basses se trament dans les arcanes du pouvoir », avançait par exemple le député Jean-Michel Nintcheu du Sdf, fidèle à lui-même. Ngoh Ngoh, sans être dieu a de ce fait en apparence tous les atouts, toute l’attitude de voler non loin de l’altitude des êtres élevés. On peut comprendre que les stratégies et les manœuvres pour sa chute soient revues à chaque instant. Cette détermination d’en découdre définitivement viendrait aussi de sa bonne entente tant révélée avec la Première dame, ce n’est pas rien dans les batailles politiques au Cameroun, avec qui on établit un lien filial. En définitive, ceux qui se désolent du sort du Sgpr qui se joue plus dans les médias qu’ailleurs, estiment qu’une éventuelle chute serait un affaiblissement certain de l’ossature du régime, voir tout simplement du pouvoir du N’nom Ngui.

Dessin et destin

La délégation permanente de signature du président de la République donne à son détenteur de mettre tout le monde d’accord sur l’onction conférée par le Prince. Si Paul Biya lui conserve sa confiance depuis plus de dix ans, c’est une preuve par neuf qu’il répond au lourd et exigeant cahier de charges à un poste particulièrement glissant. Lui le quinzième en fonction, semble dans la même posture que Paul Biya sous les ailes d’Amadou Ahidjo. Il avait occupé le même poste de 1968 à 1975 et ne le quitta que pour aller s’emparer des rênes du gouvernement. Sept ans plus tard, il se verra les portes du Palais grandement ouvertes. Pour cela il eût fallu procéder à une modification constitutionnelle en 1979 pour lui accorder le droit successoral présidentiel au détriment du président de l’Assemblée nationale. Est-ce le même destin qui attend le discret diplomate qui exécute dit-on sans réserves toutes les instructions de son mentor?  On ne peut ici s’empêcher de se demander si la campagne virulente contre une succession de gré à gré au sommet de l’État n’est pas née parce qu’il y avait une entente fusionnelle entre les deux hommes forts au sommet de l’État.

Dès lors, une certaine opinion scrute chaque session parlementaire aux fins d’entrer dans une autre dimension dans le combat politique, d’activer les réseaux dormants de toutes parts pour complexifier la matérialisation d’une révision constitutionnelle. C’est précisément la crainte de la création d’un poste de vice-président de la République qui conférerait à ce dernier le statut de dauphin du président de la République qui continuerait le mandat en cours qui fait toutes les gorges chaudes.  Et là encore les regards sont surtout tournés vers Ferdinand Ngoh Ngoh et dans une moindre mesure, le Premier ministre ou Louis Paul Motaze, le ministre des Finances. Si Paul Biya devrait faire le pari d’un tel choix dans la dévolution du pouvoir en cas de pépins dans l’exercice de son mandat en cours, il se mettrait de ce même coup à dos une frange importante de la classe politique, recrutée même dans ses propres rangs et par-dessus tout, exposerait ce dernier à des coups les plus tordus dans la compétition politique.

Le chef de l’Etat ne peut pas avoir oublié la galère que lui infligèrent ses collaborateurs, ouvertement ou subrepticement, surtout entre 1979 et 1982, période où il fut constitutionnellement établi ou consacré comme le dauphin d’Ahidjo.  Il est donc fort à parier que Paul Biya joue avec le temps, déterminé à préserver à son éventuel poulain le feu nourri et croisé des multiples prétendants au trône qui ont fourbi leurs armes au cours des décades. En prison, au sein du gouvernement ou au sein de l’opposition, ils se bousculent, pour beaucoup en sous-marin, au portillon de l’ambition au trône présidentiel. Le natif de Mvomeka’a le sait, que cette ambition soit putative ou constitutionnelle, il doit y mettre un doigt pour contrer les élans des plus intrépides, incontrôlables. De ce fait, de par la masse de confiance qu’il a déjà manifestée à l’endroit de son Secrétaire général, peu serait surpris si d’avance Paul Biya s’engageait dans la voix risquée de succession, de voir Ferdinand Ngoh Ngoh au peloton de tête de la « short list ». 

Sur le chemin des instructions

Ferdinand Ngoh Ngoh est loin d’être un tigre en carton comme certains naïfs veulent distiller. Sur le terrain des batailles politiques, il assène des coups à ses adversaires politiques directs tout comme il en reçoit. On peut de ce fait commencer par le Premier ministre (Pm) qu’il a recadré le  13 août 2019. Il écrivait à Dion Ngute une lettre ayant pour objet « mise en conformité des entreprises et établissements publics, avec les lois n°2017 /017 et 2017/011 du 12 juillet 2017 ».  « J’ai l’honneur de vous faire connaître que le chef de l’État demande au Pm, chef du gouvernement, de bien vouloir rappeler aux chefs des départements ministériels assurant la tutelle technique des entreprises et établissements publics, que le pouvoir de nomination des organes sociaux desdits structures relève de la compétence exclusive du Président de la République. A cet égard, il faudra bien leur faire savoir qu’en attendant les très hautes décisions du Chef de l’État, les responsables en poste devront continuer à exercer normalement leurs fonctions », prescrit-il au chief Joseph Dion Ngute.

Au cours du Grand dialogue national organisé à Yaoundé du 31 septembre au 4 octobre 2019, présidé par le Pm, les bureaux de Ferdinand Ngoh Ngoh étaient connexes à ceux du Pm, et dans les couloirs du Palais des congrès, il se susurrait qu’il en était ainsi pour permettre au natif de Minta d’avoir un œil sur tout ce qui se passait. L’autre figure susceptible de faire ombrage à celui que la presse affuble de « vice-dieu », dans l’accomplissement de son destin, comme rapporté à plusieurs reprises par l’opinion, est Louis Paul Motaze. Les deux ont croisé le fer au sujet du dossier de la Can. Au bout du compte c’est Ferdinand Ngoh Ngoh qui aura le dernier mot car le pilotage de ce dossier sera confié à une cellule logée à la Présidence.

Le second point de friction a porté sur le prélèvement de la Tva sur l’assurance vie dont s’opposaient les professionnels du secteur des Assurances. C’était dans le cadre du budget de l’État 2019. Louis Paul Motaze convoqua une réunion de concertation et y convia naturellement le Directeur général des impôts, un proche de Ngoh Ngoh. Ce jour-là, ce dernier ne daigna point répondre à l’invitation et les sous-entendus fleurirent de toutes parts.

Au finish, le ministre des Finances se vit obligé d’abandonner son projet de redressement fiscal sur les compagnies d’assurances. Un dernier acte où Ngoh Ngoh a renvoyé le Minfi dans les cordes, s’est joué en janvier 2020. Un contentieux opposait l’institution fiscale aux Brasseries du Cameroun (Sabc). C’est Ngoh Ngoh qui tenta une réconciliation entre Modeste Mopa Fatoing et Emmanuel de Tailly, le Directeur général de la Sabc. Motaze, le Minfi fut ignoré. A côté de ceci, l’homme de confiance de Paul Biya a aussi des amis.

C’est donc dire qu’autour du ministre d’État Secrétaire général à la présidence de la République, il se construit un réseau que la presse internationale met sur scène de temps en temps. Ainsi, on apprend à cet effet que Louis Georges Njipendi, le Directeur général de Camair-Co est l’un de ses proches tout comme Victor Mbemi Nyaknga (Société nationale de transport d’électricité), Bertrand Pierre Soumbou Angoula (Enam), Antoine Félix Samba (Inspecteur général des services administratifs et budgétaires), Joseph Ngoh (Agence de régulation des Marchés publics), Jean Paul Simo Njonou, ex-conseiller économique à la présidence (Société nationale de raffinage). Il en va de même du Secrétaire d’État à le Défense, l’un de ses anciens collaborateurs au Minrex, Galaxy Yves Landry Etoga  qui dirige les gendarmes. En définitive, tous ces acquis ne pèsent pas une plume d’oiseau dans la balance à côté de la fidélité et de l’intégrité attendues de lui dans l’exercice de ses fonctions au quotidien. 

C’est par ailleurs un homme de première main qui œuvre avec discrétion dans la guerre contre Boko Haram. Déjà le 25 janvier 2015, il signait un communiqué annonçant au nom de Paul Biya, la libération de Nitsch Eberhard  Robert de nationalité allemande, enlevé en juillet en 2014 au Nigeria par la secte Boko Haram. Le 15 octobre de la même année, il signait un autre annonçant que Paul Biya a accepté, dans le cadre de la guerre contre la secte islamiste, que les gouvernements américains et camerounais ont convenu du déploiement à Garoua d’un détachement de personnels de l’armée américaine chargée de conduire les opérations de renseignements, de surveillance et de reconnaissance. Plus récemment, avec l’enquête sur les évènements de Ngarbuh, il lui est revenu de publier le rapport incriminant quelques soldats.

Une preuve de la dimension de confiance que lui voue le numéro un camerounais. Ferdinand Ngoh Ngoh sur les traces de Paul Biya comme Paul Biya sur celles d’Amadou Ahidjo ? On y était presque, avant que cette affaire d’audition devant le Tcs ne viennent jeter le trouble dans les esprits. Toujours est-il  que ce sont les doigts des anges qui tracent en leur temps clairement tout destin pour que tous le lisent distinctement. 

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Revue de presses du 05 06 2023

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