Par Boris Ngounou
C’est une chute vertigineuse, que celle réalisée cette année par le Cameroun, dans la 21e édition du Classement mondial de la liberté de la presse établi par Reporters sans frontières (Rdf). Déjà situé au bas de ce classement l’année dernière, le pays passe du 118e au 138e rang, soit une perte de 20 places en l’espace d’un an.
Cette dégringolade s’explique surtout par des cas d’assassinat de journalistes dans lesquelles s’illustre le Cameroun depuis ces derniers temps. Le cas le plus emblématique étant l’affaire Martinez Zogo. Le chef de chaîne d’Amplitude FM, retrouvé mort, le corps gravement mutilé, le dimanche 22 janvier 2023, cinq jours après son enlèvement à Yaoundé.
Ce cas, mais aussi ceux du journaliste Samuel Wazizi torturé à mort en 2019, l’homme de média Jean Jacques Ola Bébé abattu en février dernier, sans oublier des détentions de journalistes, qualifiées par fois d’arbitraires par l’Onu, notamment celle d’Amadou Vamoulké, l’ex-directeur général de la Crtv, sont là quelques illustrations d’un pays dans lequel les journalistes, notamment ceux adoptant une ligne critique ou indépendante, sont permanemment en danger.
Outre l’aspect sécuritaire, le contexte économique fait partie des 5 indicateurs évalués par Rsf pour le classement du Cameroun. L’Ong française de défense des droits des hommes de médias constate que les journalistes camerounais, notamment ceux des médias privés, travaillent dans des conditions de précarité extrême, nuisant considérablement à leur indépendance. L’aide à la presse est insignifiante, et sa distribution dépend de l’alignement des médias sur les positions défendues par le régime. Des proches du pouvoir peuvent également créer des médias de toutes pièces pour affaiblir économiquement un autre titre critique devenu gênant.
« Malgré un paysage médiatique riche et dense, constitué par plus de 600 journaux, environ 200 radios et plus de 60 chaînes de télévision, la production d’une information indépendante et critique reste un parcours du combattant au Cameroun ».
conclut RSF, qui classe le pays parmi les 42 États du monde, où la liberté de la presse est « difficile ».