Par Sandra Embollo
Dans un communiqué signé le 01er février 2023 le Cameroon Worker Forum, une plateforme intersyndicale qui regroupe 11 des 12 confédérations syndicales du Cameroun, appelle les populations camerounaises en général à un sursaut patriotique en s’habillant en noir tous les lundis à compter du 15 février 2023, pour manifester leur ras le bol et faire pression au Gouvernement , afin que ce dernier prennent des mesures appropriées pour l’amélioration de leurs conditions de vie et la garantie de la paix sociale dans le pays.
Cette plateforme invite les travailleurs du secteur privé et les agents du secteur public à observer dès ce même 15 février, un arrêt de travail chaque lundi de la semaine jusqu’au 15 mars 2023 pour exiger :
Pour les travailleurs régis par le code du travail tous secteurs confondus, le relèvement du Salaire Minimum Interprofessionnel Garanti(Smig) de 36.270 Fcfa à 100.000 Fcfa par mois ;
Pour les agents publics en particulier, la revalorisation de leurs salaires de 30% afin, non seulement de rattraper le niveau des salaires de ce secteur d’activités d’il y a 30 ans, mais surtout de leur permettre de faire face au coût actuel de la vie ;
Et enfin pour les retraités qui dépendent de la Caisse Nationale de la Prévoyance Sociale (Cnps), le plafonnement du calcul de la pension vieillesse à 750.000 Fcfa pour tous sans discrimination comme c’est le cas en ce moment, la régularisation de la pension vieillesse à 05% tous les cinq (05) ans avec rappels des arriérés induits jusqu’à nos jours.
A l’origine de la colère des syndicalistes, la révision à la hausse des prix de certains produits issus des hydrocarbures à la pompe depuis le 01er février 2023 sur décision du Gouvernement. Il s’agit notamment du prix du litre d’essence qui a augmenté de 15,87%, passant de 630 à 730 Fcfa et celui du litre de gasoil qui coute désormais 720 Fcfa, soit aune augmentation de 32,11% par rapport à l’ancien prix pratiqué.
Les partenaires sociaux jugent insuffisantes les mesures compensatoires prises par les pouvoirs publics afin d’atténuer les conséquences néfastes de cette revalorisation des prix de certains produits pétroliers à savoir : l’augmentation de 05,2% des salaires des agents publics et la proposition de faire passer le Smig de 36.270 à 41.875 FCfa entre autres. Les syndicats exigent que le Smig soit fixé à au moins 100.000 Fcfa.
Une session de la Commission Nationale Consultative du Travail, instance tripartite qui regroupe les représentants du patronat, des travailleurs et du Gouvernement doit se tenir le 08 février 2023 au ministère du Travail et de la Sécurité sociale pour se pencher sur cette question du Smig. Mais l’avis de la Commission n’est que consultatif et le Gouvernement semble déjà avoir pris sa décision concernant la fixation du salaire plancher.
Même si les syndicats affirment qu’ils restent ouverts au dialogue avec les pouvoirs publics, on voit mal comment ils peuvent faire reculer le Gouvernement en obtenant par exemple la baisse des prix des carburants qui viennent d’être augmentés.
Cela s’explique notamment par le faible taux de syndicalisation des travailleurs au Cameroun, mais aussi de la crédibilité de certaines organisations syndicales ainsi que celle de leurs Leaders.
Même si les conséquences de la récente revalorisation des prix des carburants se font déjà ressentir par la masse à travers notamment des augmentations souvent anarchiques des prix des transports par certains transporteurs, et l’inflation galopante des prix de plusieurs produits de premières nécessités, les organisations syndicales seules ne peuvent faire plier le Gouvernement sur leurs revendications essentielles pourtant légitimes ; mais des actions concertées pluri acteurs, oui.
Cette approche est malheureusement loin d’être évident au Cameroun.