Par Léopold DASSI NDJIDJOU
Le préfet du Mfoundi, avec son Arrêté a ramené la capitale du Cameroun désormais dans un régime d’exception, celui qui prévalait avant le vote des lois sur les libertés de 1990. Yaoundé est désormais entrée dans un régime de dictature pure et dure où toute personne qui osera lever la tête sera tout simplement jetée dehors comme un malpropre, ou dans une prison dans quelques recoins du pays même si l’Arrêté ne le dit pas expressément. Du reste, il en allait ainsi lors de la guerre d’indépendance.
On observait des déportations des indépendantistes dans les prisons à travers le pays. Le texte du préfet ne laisse aucune ambiguïté sur cette éventualité en annonçant qu’est susceptible d’être frappée d’une interdiction de séjour dans le département du Mfoundi pour une durée déterminée, les trois typologies de personnes dont vient en tête « toute personne qui appelle au soulèvement contre les institutions de la République ». Le deuxième type concerne la personne qui sera coupable d’outrager dangereusement les Institutions ou celui qui les incarne (par tout moyen de communication suivie dans le département du Mfoundi).
Ici, les journalistes et autres communicateurs sont particulièrement visés dans leur prise de parole ou par les écrits. Il appartiendra donc désormais au préfet de faire la police des médias pour déporter ceux qui « outragent dangereusement » les tenanciers du pouvoir. En clair, celui qui méprise, insulte ou parle sans respect du pouvoir, sera chassé de Yaoundé. Avis aux journalistes ! En dernier lieu, le préfet promet de jeter hors de la capitale, toute personne qui « entreprend des manœuvres pouvant entraîner des troubles graves à l’ordre public ». Les termes élastiques et relatifs tels que « manœuvres », « dangereusement », ouvrent un boulevard à toutes les interprétations à même de frapper invariablement selon le bon vouloir de l’autorité administrative. Seuls les prisonniers ont le privilège d’être à l’abri de l’acte préfectoral.
Par ailleurs, selon les termes du préfet, son acte vise également à protéger l’éducation de la jeunesse et à garantir l’ordre public. On ne peut s’empêcher de s’interroger sur les motivations d’une telle sortie. Yaoundé serait-elle sous une menace pressante ? Ou bien s’agit-il d’une mesure préventive en vue de l’élection présidentielle de 2025 qui promet des étincelles ? Une chose est certaine, rien ne sera plus comme avant à Yaoundé et fait craindre le pire dans la violation des libertés publiques, arrachées de haute lutte dans les années 1990.