Par Éric Boniface Tchouakeu
Dans les détails, une conférence des Présidents était prévue le 02 juillet à 09H30 minutes, suivie une heure plus tard, d’une séance plénière avec la communication d’un texte sans précision comme de coutume sur la nature de ce texte, et dès 17H30 minutes le même jour, le début de l’étude du projet de loi reçu en plénière par la Commission des Lois constitutionnelles.
Cette Commission avait jusqu’au 03 juillet pour adopter son rapport qui sera présenté à l’ensemble des députés en plénière le 04 juillet 2022. C’est donc ce jour que le projet de loi déposé sur la table des députés, deux (02) jours plus tôt, doit être adopté probablement sans amendements comme dans la plupart des projets de lois.
La rapidité de l’examen de ce texte à quelques jours de la fin de la session parlementaire ordinaire du mois de juin et la Commission compétente pour effectuer ce travail, ont fait croire à de nombreux opposants au régime, qu’il s’agissait d’un projet de modification constitutionnelle du pouvoir, sans larges consultations, pour surprendre le peuple. Ils ont abondamment répandu des rumeurs en ce sens notamment sur les réseaux sociaux.
Ces derniers ignoraient à ce moment là qu’il s’agirait simplement pour les parlementaires d’examiner et adopter un texte modifiant et complétant certaines dispositions de la loi du 10 janvier 1997, fixant les conditions d’entrée, de séjour et de sortie des étrangers au Cameroun.
Il convient de relever que des rumeurs sur l’existence d’un éventuel projet du pouvoir en place visant à modifier unilatéralement et dans le sens de la préservation de ses intérêts, l’actuelle constitution du Cameroun, sont de plus en plus persistantes.
Plusieurs journaux camerounais ont annoncé notamment en mars 2022, l’existence au sein du sérail d’un projet de modification de la loi fondamentale en vue d’instaurer un poste de Vice-Président de la république. Certains ont même affirmé que le texte y afférent était déjà prêt et pourra atterrir sur la table des parlementaires à tout moment.
Par ailleurs ces journaux sont allés plus loin en donnant le nom du favori pour le poste, à savoir l’actuel Grand Chancelier des Ordres nationaux et ancien Premier Ministre, Philémon Yang.
Il est évident que si un tel projet existe, il ne pourra être techniquement validé que par voie parlementaire ou à l’issue d’un référendum, les deux seuls moyens prévus pour modifier ou adopter une constitution au Cameroun.
Généralement, cette ultime étape dans le processus de validation, est précédée des concertations avec les forces vives de la nation à l’initiative du pouvoir et même des débats publics sur le contenu du projet de réforme.
De nombreux débats dans l’espace public ont par exemple eu lieu, plus un message à la nation du Président de la République, avant la réforme constitutionnelle d’avril 2008 qui avait notamment fait sauter le verrou de la limitation à deux (02) du nombre de mandats présidentiels consécutifs pouvant être effectués par une même personne.
De même, l’adoption de l’actuelle constitution en vigueur depuis le 18 janvier 1996,a été précédée de la tenue de la conférence Tripartite en 1991 qui avait permis d’apaiser le climat politique tendu de l’époque , et plus tard de l’organisation de ce que le pouvoir avait appelé « un large débat national », plus au moins une communication directe du Chef de l’Etat sur le sujet sous forme d’interview.
Rien de tout ce que nous venons de mentionner comme précédents, n’a été jusqu’à présent véritablement observé relativement à un quelconque projet éventuel de réforme constitutionnelle.
Même si des appels et des propositions de réformes de l’actuelle constitution camerounaise sur plusieurs points émanant des partis politiques de tous les bords et de la société civile, sont nombreux, il serait difficile de faire légitimement jouer le rôle d’assemblée constituante au Parlement en se passant des préalables observés dans le passé.
Cependant, puisqu’il s’agit de la politique, il ne faut rien exclure. D’où le fantasme et la frilosité des uns et des autres dans l’actuel contexte politique du Cameroun.