Par Léopold DASSI NDJIDJOU
La Fondation Tandeng Muna de Yaoundé a accueilli du beau monde trié sur le volet par Nkafu Policy institute de la Fondation Denis et Lenora Foretia pour susciter le devoir de mémoire au sein des professionnels de santé et des médias. La vingtaine de minutes que dure ce court métrage est un cocktail explosif d’émotions, de tristesse, de compassion et de révolte face à la négligence, l’insouciance et la désinvolture du personnel de santé dans un hôpital public, l’hôpital Laquintinie de Douala en l’occurrence.
A côté, le personnage de Monique Koumatekel est joué à la perfection par un personnage qui fait le jeu à la perfection, accompagné des témoignages réels et vivants de la mère de la victime dont les phrases sont ponctuées par des larmes et des sanglots. C’est désespérant de voir le cadre familial marqué par la pauvreté, la victime est pauvre tout comme son époux qui est obligé de recourir à un taxi pour la conduire en plein travail à l’hôpital.
Est-ce la raison suffisante pour que les infirmières ne se soucient guère du cas de cette famille dépourvue ? Toujours est-il que Monique Koumatékel va être abandonnée à son triste sort sur le perron de l’hôpital, après avoir d’abord été déclarée morte par les infirmières et conduite à la morgue. C’est de là que le morguer découvrira qu’elle est encore vivante. Dans une tentative désespérée de lui sauver la vie et celle de ses enfants, on va lui administrer pour la cause une opération chirurgicale à ciel ouvert. Cet acte profane se fait sous l’œil des caméras des téléphones qui immortalisent la scène.
Après le film, un panel a débattu des tenants et des aboutissants du court métrage. A la fin des débats, il est retenu une batterie de recommandations dont l’augmentation du budget d’investissement du ministère de la Santé ; la responsabilité des hommes et des femmes dans la volonté de faire des enfants ; un temps d’évaluation pour savoir si depuis l’affaire Monique Koumatekel, quelque chose a changé dans la prise en charge des femmes enceintes dans les hôpitaux ; la solidarité ; l’implémentation effective de la Couverture santé universelle (Csu) ; un système de transport urbain et sécurisé ; sensibiliser sur les systèmes de santé digitale ; relever le budget de la santé de 4% à 15% du budget comme le veut la Déclaration d’Abuja.
De manière générale, les journalistes autant que le personnel de santé, ont reconnu que 8 ans après l’affaire Koumatekel, grand-chose n’a changé sur la situation de la femme enceinte au Cameroun. Si la situation semble s’améliorer dans les centres urbains, il en va autrement dans l’arrière-pays où il est encore possible de recruter des Monique Koumatekel du fait de l’absence de tout, des médicaments et du personnel. Une seule chose est sûre, ce film tragique de l’héroïne qui est née en 1983 et décédée en 2016, va bousculer les lignes plus que des livres entiers, car il est expressif, touchant, provocateur, réel et en plein contexte camerounais. L’honneur revient entièrement à Nkafu institute policy.