Par Serge Aimé Bikoi
Selon le classement des candidats potentiels à la présidentielle aussi bien dans le camp de l’opposition que dans celui du parti au pouvoir, le leader national du Mouvement pour la renaissance du Cameroun (Mrc) tient la vedette. Seulement, selon ce scientifique, tout sondage est, d’office, biaisé.
“On veut légitimer un point de vue. Des gens viennent vous parler du mot sondage faisant état de ce que c’est scientifique. Il y a zéro scientificité dedans”. Telle est la position du Politologue Faustin Etouke qui soutient que parler de sondage au Cameroun, relève de l’escroquerie tant la structure qui a entrepris d’élaborer cette technique de collecte de données quantitatives, a pour but de normaliser l’idée de la victoire de telle personnalité politique et celle de la défaite des autres figures de la scène publique. Au premier abord, le Sociopolitiste présente les exigences scientifiques de cette méthode d’enquête en déclinant, en l’occurrence, la procédure scientifique de l’échantillonnage en fonction de l’appartenance à la catégorie féminine ou masculine. “Le sondage suppose que l’on connaît la population pas seulement l’effectif de la population, mais comment les structurer. Si dans la population, il y a, par exemple, 60% de femmes et 40% d’hommes, votre sondage doit refléter 60% de femmes et 40% d’hommes”.
Il n’est pas possible d’élaborer la méthode d’échantillonnage liée à un sondage d’opinion tant que l’on ne maîtrise pas la structure de la population née des chiffres du dernier Recensement général de la population et de l’habitat. Si au Cameroun, nous sommes, par exemple, 30 millions de Camerounais, il ne s’agit pas de dire, ajouté l’expert, que l’on va administrater le questionnaire d’enquête à un échantillon de 100.000 personnes pour savoir ce que les Camerounais pensent. Que faut-il alors pour que l’échantillon statistique de 100.000 répondants locaux soit fiable au terme de l’étude de sondage ? “Il faudrait que cet échantillon reflète la structure de la population camerounaise. S’il y a 55% d’hommes et 45% de femmes, l’échantillon doit refléter ça, c’est-à-dire sur les 100.000 personnes, 55.000 hommes doivent être interrogés et 45.000 hommes. Mais là, c’est trop faible. Il y a l’âge également qui doit être pris en compte, tout autant que le secteurs d’activité, l’obédience religieuse et le paramètre ethnico-tribal”.
La technique de sondage présente un intérêt dans la mesure où l’enquêteur sur le terrain et, par extension, les instituts de sondage maîtrisent l’effectif l’effectif et la structure de la population par sexe, par âge, par catégorie socioprofessionnelle, par ethnie et par affiliation religieuse. Mais à partir du moment où l’Institut national de la statistique (Ins) et le Bureau central des recensements de la population (Bucrep)ne font pas régulièrement des enquêtes démographiques, il y a anguille sous roche ainsi que le relève, in fine, F. Etouke:”Est-ce que nous connaissons, au Cameroun, l’effectif de la population ? Je préfère ne pas répondre. L’Institut national de la statistique (Ins) devait avoir les données. Mais il faut constater que nous avons toujours des problèmes en matière d’élaboration du fichier électoral.Et nous sommes dans un contexte où l’on ne fait pas de recensement démographique. C’est même voulu parce que si l’on ne connaît pas l’effectif, on peut ruser facilement”.
Au demeurant, à la question de fond de savoir si l’on peut crédibiliser un sondage électoral de manière globale, l’Epistémologue répond par la négative tant les acteurs qui se servent de cette technique d’enquête ne maîtrisent pas, à la base, l’effectif et la structure de la population et sa répartition en fonction de la pluralité des variables d’identification sociale. Le dernier Recensement général de la population et de l’habitat (Rgph) remonte, par exemple, en 2005 et nécessite, aujourd’hui, la planification d’un nouveau Rgph. Histoire de connaître le nombre exact de la population camerounaise. Ainsi pourra-t-on administrer un sondage en fonction de ces statistiques nouvelles.