Par Léopold DASSI NDJIDJOU
«Booster le « Made in Cameroon » par le biais de la Zlecaf » est le thème qui a nourri les échanges entre les parties prenantes, les experts venus des différents ministères, du monde universitaire et autres, chapeautés par Nkafu policy institute. Cette réflexion tombe à point nommé car le Cameroun doit aller sur ce vaste marché africain du donner et du recevoir avec des produits de qualité visibles et facilement disponibles, des produits labélisés qui mettent en vitrine un know how unique camerounais. Quels sont les défis à relever pour que cette vision devienne une réalité ? Pour commencer, il a fallu d’abord définir ce qu’est un produit « Made in Cameroun ».
Il s’agit de tout ce qui est produit sur le territoire national, un label pour désigner une production locale. Ceci n’est possible que si 90% des matières premières ou des intrants dans la fabrication viennent du terroir. Dans la suite de son exposé sur le thème de la rencontre, le Dr Jean Cédric Kouam, le directeur des affaires économiques de Nkafu policy institute, a indiqué que le processus de labellisation des produits au Cameroun est un véritable parcours de combattant.
Par exemple, pour obtenir la certification d’origine, il faut fournir à l’Agence des normes et de la qualité (Anor) au moins 16 documents dont le montant peut être évalué à un million de Fcfa. C’est donc un challenge certain pour les producteurs camerounais même si on note que l’année dernière, l’Anor avait procédé à une réduction de l’ordre de 30% des coûts et la validité de cette pièce est passée de 6 mois à un an. Il y a aussi que la délivrance de la certification d’origine est désormais dématérialisée par les services de la Chambre du commerce, de l’industrie, des mines et de l’artisanat (Ccima).
Par ailleurs on a appris que le label « Made in Cameroon » intègre une variété de produits dont les produits cosmétiques, l’agroalimentaire, le textile, les produits musicaux, médicaux, entre autres. En ce qui concerne les défis du « Made in Cameroon », il est impératif pour les produits locaux de respecter les normes internationales de la qualité et de la sécurité ; de moderniser les méthodes de fabrication, industrialiser au besoin le process ; de renforcer les capacités en matière de commerce électronique ; d’identifier les produits qui ont beaucoup de valeur à l’international ; de comprendre les réductions tarifaires et les réductions commerciales pour favoriser l’accès au marché international ; de réaliser les études de marché et établir des partenariats stratégiques pour y arriver, entre autres. Les différentes parties prenantes, à la suite de l’exposé, ont confié les difficultés protéiformes qu’il faut résoudre pour rendre le label « Made in Cameroon » compétitif. La cherté des produits locaux par rapport aux produits importés. L’exemple du riz de Ndop ou de Yagoua qui sont de bonne qualité mais aux coûts élevés ont été évoqués.
Au sein de l’opinion, on perçoit les produits venant de l’extérieur comme exclusivement de meilleure qualité. On note que le label « Made in Cameroon » est moins disponible ; la pratique commerciale locale est à revoir. Pour rendre ces produits visibles et compétitifs, il a été proposé cinq étapes : maîtriser la chaîne de valeur ; développer l’expérience locale ; expérimenter la phase d’échelle d’économie locale ; aller au marché africain en maîtrisant les marchés infra à l’exemple de la Cemac, de la Ceeac par exemple ; traiter de manière appropriée les ressources humaines. Après ce débat, le think tank Nkafu policy envisage de déposer les recommandations auprès des autorités compétentes le mois prochain.
La Zelecaf en question
Il faut indiquer qu’à ce jour, 54 Etats ont signé les textes de création et 49 pays ont ratifié les instruments de sa mise en œuvre dont le Cameroun en 2019. Il s’agit d’un marché de 450 millions de dollars américains favorisant le libre-échange entre ces Etats. Le 3 juin 1991, les chefs d’Etat et de gouvernement de l’Organisation de l’unité africaine (Oua) ont adopté le Traité dAbuja instituant la Communauté économique africaine (Cea). Ce traité a fait des Communautés économiques régionales (Cer) d’Afrique la pierre angulaire d’une grande intégration, conduisant à la création d’une Communauté économique. L’article 88 du Traité d’Abuja dispose que « la base de la communauté économique africaine est l’intégration progressive des activités du Cer, l’établissement d’une intégration économique continentale complète étant l’objet ultime vers lequel les activités des Cer devraient être orientées ». La Zone de libre-échange continentale africaine (Zlecafn), qui est entrée en vigueur en janvier 2021, a marqué un tournant décisif dans ce processus. Elle vise à stimuler le commerce intra-africain, à favoriser l’intégration économique et à promouvoir le développement durable sur l’ensemble du continent. Avec le potentiel de créer la plus grande zone de libre-échange du monde, la Zelecaf représente également une opportunité unique pour les Nations africaines de stimuler leurs économies et d’améliorer les conditions de vie de leurs citoyens. Toutefois le fait que certains pays appartiennent à plusieurs Cer existantes pose un problème difficile à résoudre. Celles-ci ont des objectifs variés et de nombreux traités et protocoles régissant les relations interétatiques qui se chevauchent et créent une certaine confusion.
En d’autres termes, l’appartenance de certains pays à plusieurs Cer créé une certaine confusion pour servir de catalyseur à la mise en œuvre réussie de la Zelecaf constitue aujourd’hui un obstacle à sa mise en œuvre. D’autres facteurs tels que les règles d’origine, l’application du tarif extérieur commun, la duplication et parfois la concurrence de certaines activités posent également des défis à la mise en œuvre de la Zelecaf.