Par Sandra Embollo
Premier dirigeant africain à intervenir à la tribune, le président sénégalais Macky Sall, également président en exercice de l’Union africaine, s’est exprimé au nom de tout le continent. Il faut agir à Charm-el-Cheikh pour faire l’histoire et non la subir, a-t-il martelé. L’Afrique doit recevoir les financements promis au nom de la dette climatique et des services qu’elle rend avec ses forêts.
« Je rappelle qu’avec la forêt du bassin du Congo, notre continent abrite un quart de ce qui reste encore de forêt tropicale, offrant à la planète un de ces rares poumons verts, lance le président sénégalais. Nous voulons aussi aller de l’avant dans l’adaptation au changement climatique. Nous en supportons le coût avec le développement de projets verts financé souvent par recours à la dette, alors même que la mise en œuvre doit être financée par des dons conformément aux engagements convenus. » Le droit à une transition verte adaptée à son niveau de développement doit aussi lui être reconnu.
Appels à protéger la forêt du bassin du Congo
Le bassin du Congo capture plus de 30 milliards de tonnes de CO2, a souligné lui aussi le président de la République du Congo. Selon Denis Sassou-Nguesso, la population congolaise a pris conscience très tôt de la nécessité d’entretenir et d’augmenter le couvert forestier du pays.
« Depuis quarante ans, l’ensemble de notre population est ainsi invitée à planter un arbre dans le cadre de la Journée nationale de l’arbre, célébrée dans notre pays, le 6 novembre de chaque année. Ce type d’action volontariste, jointe à un Code forestier rigoureux, nous a permis de maintenir l’un des taux de déforestation le plus faible au monde »
a déclaré le président congolais.
De son côté, le président gabonais, Ali Bongo Ondimba, regrette le retard des pays riches à verser les financements promis, étant donné les services rendus par la forêt du Gabon.
« La République gabonaise, comme les autres pays en développement, devrait pouvoir recevoir plusieurs centaines de millions de dollars, par an, issus de cette promesse. Ceci pour financer notre adaptation aux changements climatiques, notre juste transition énergétique et économique et pour récompenser nos efforts de séquestration nette de carbone »,
a, pour sa part, déclaré le président gabonais.
Ali Bongo passe à l’anglais pour rappeler la certification toute récente des crédits carbone gabonais par l’Onu Climat, avant d’évoquer le prochain One Forest Summit en 2023 à Libreville.
Besoin d’aide face aux conséquences du changement climatique
Les besoins d’adaptation et les « pertes et dommages » liés au changement climatique ne sont pas une abstraction en Afrique, souligne le président kényan William Ruto. Son pays affronte la pire sécheresse en 40 ans. « Deux années consécutives sans pluie ont plongé des millions de personnes dans la misère. 2,5 millions de têtes de bétail sont mortes au Kenya rien que cette année, causant plus de 1,5 milliard de dollars de pertes. Il y a deux jours, nous avons distribué de l’aide alimentaire à 4,3 millions personnes dans le cadre d’un plan d’urgence qui nous a demandé de réallouer des fonds prévus pour la santé et l’éducation, explique le président kényan. Les arbitrages que nous sommes contraints de faire entre des services publics indispensables sont la preuve que le changement climatique menace directement la vie, la santé et l’avenir de nos populations. »
La faune sauvage, héritage précieux du Kenya, n’est pas été épargnée, poursuit William Ruto. Porte-parole du groupe Afrique à la COP27, il estime à 50 milliards de dollars par an le coût pour le continent d’ici à 2050 et il déplore les promesses de financement non tenues pour l’aider à surmonter ces catastrophes, alors même que l’Afrique, affirme-t-il, offre des solutions au changement climatique, grâce à ses ressources naturelles et au déploiement très volontariste des énergies vertes.
« Les pays riches sont les principaux auteurs de cette mise en danger de l’humanité »
De son côté, le président de la République centrafricaine Faustin-Archange Touadera n’a pas mâché ses mots envers les pays riches : « Les crises climatiques exceptionnelles de ces dernières années ont eu des effets dévastateurs de grande portée sur la survie de l’humanité. Les pays riches, grands pollueurs, sont les principaux auteurs de cette mise en danger de l’humanité. L’Afrique […] ne doit pas continuer à payer pour des crimes qu’elle n’a pas commis […]. Les pays riches doivent aider les pays pauvres à appliquer leur plan d’action nationale de réduction à caractère volontaire. »
Pour sa part, À l’intérieur de l’Afrique, le Sahel est assurément la région présentant les plus grandes vulnérabilités et mérite à ce titre un traitement particulier au regard des défis combinés auxquels elle fait face. Nous ne le dirons jamais assez, la violence qui ravage aujourd’hui le Sahel est grandement liée avec le désastre climatique que subit cette région.