Par Joël Onana
Malgré son procès pour corruption, Benyamin Netanyahu a remporté avec ses alliés des partis ultra-orthodoxes et de la liste d’extrême droite Sionisme religieux 64 mandats sur les 120 de la Knesset, soit trois de plus que le seuil de la majorité, a annoncé ce jeudi soir la commission électorale au surlendemain des élections législatives. Peu avant, le Premier ministre sortant Yaïr Lapid, qui l’avait chassé du pouvoir l’an dernier en mettant sur pied une coalition hétéroclite qui a depuis implosé, a contacté son rival pour le féliciter de cette victoire.
Selon la commission électorale, le « bloc de droite » de Benyamin Netanyahu obtient 64 élus – 32 pour son parti le Likoud, 18 pour les deux partis orthodoxes et un record de 14 pour l’extrême droite. La formation Yesh Atid (« Il y a un futur ») du centriste Lapid a récolté 24 élus, son allié de centre-droit Benny Gantz 12 députés, suivi de 10 élus pour deux autres formations et de cinq pour le parti arabe Raam qui avait aussi soutenu sa coalition, pour un total de 51 députés. Le parti arabe Hadash-Taal a lui obtenu 5 députés.
Un jeu d’équilibriste
Benyamin Netanyahu va maintenant devoir s’atteler à la formation d’un gouvernement. Sur le papier, une simple formalité. Mais dans les faits, « Bibi » va devoir mener des tractations compliquées. Car s’il peut compter sur le soutien des religieux ultra-orthodoxes, il va aussi devoir composer avec les leaders de l’extrême droite, Bezalel Smotrich et Itamar Ben Gvir. Les deux hommes ont déjà réclamé respectivement les portefeuilles de la Défense et de l’Intérieur.
Benyamin Netanyahu est-il prêt à accorder des ministères régaliens à l’extrême droite ? Cette extrême droite israélienne est l’héritière d’une idéologie fanatique, le kahanisme, dont les adeptes sont considérés comme organisation terroriste aux États-Unis. Washington a déjà prévenu : la relation israélo-américaine « a toujours été fondée sur des intérêts communs, mais aussi, de façon importante, sur des valeurs partagées ». S’il veut revenir à la tête de l’État hébreu, Benyamin Netanyahu va donc devoir entamer un difficile jeu d’équilibriste.
En cas de succès, ce gouvernement pourrait devenir, selon des analystes, le plus à droite de l’histoire du pays. Les alliés du vainqueur des législatives ont en effet des positions radicales sur bon nombre de sujets, à commencer par le conflit israélo-palestinien. Le parti d’extrême droite Sionisme religieux plaide ainsi pour une annexion de la Cisjordanie, territoire palestinien selon les résolutions de l’Onu. « Le temps est venu d’être les maîtres dans notre pays », a lancé son numéro deux, le suprémaciste juif Itamar Ben Gvir le soir des élections.
Ces partis entendent aussi modifier le visage d’Israël : s’attaquer à la séparation des pouvoirs en plaçant le système judiciaire sous domination du politique, faire du pays un État régi par les règles religieuses, réduire les droits des minorités, notamment de la communauté Lgbt+… Lâché de toutes parts depuis le début de son procès pour corruption, l’ex-Premier ministre a pesé pour faire monter ses derniers alliés et revenir au pouvoir. Quitte à aller à l’encontre de ses propres convictions, lui qui représente une droite laïque.