Par Léopold DASSI NDJIDJOU
Ce fut en réalité un haut lieu de l’affirmation de l’authenticité africaine dans son développement économique. Le coach Kamdem, auteur par ailleurs de « De la misère à l’abondance », est préoccupé par la crise, l’écartèlement dont est victime l’Africain face à la religion chrétienne ou catholique. Le premier panéliste qui ouvre le bal de cette grand-messe africaine pour son affirmation à travers le monde, est Sa majesté Tchoffo Sa’a Maurice, administrateur civil principal hors échelle, retraité et chef traditionnel de Bameboro dans le groupement Bangang à l’Ouest du pays. D’entrée de jeu, il a mis les pieds dans le plat en indiquant que la spiritualité dans les Grassfield n’a rien à voir avec dieu. Chaque enfant qui naît dans cette partie du pays a son Dieu « Bem ». Tout comme dans chaque concession, il y a un dieu, ou dans chaque quartier ou village. Un grassfield qui fait un sacrifice à son dieu dans sa concession ne saurait jamais inviter les étrangers à la table de la célébration. Bien plus encore, chez les Grassfield, les morts ne sont pas morts, c’est pourquoi on rend un culte aux crânes comme les chrétiens se prosternent devant la croix de Jésus-Christ.
Quand le colon est arrivé dans cette partie du pays, a-t-il révélé, il s’est attaqué directement au culte des crânes. Vaincus par la violence, les habitants sont partis à l’Eglise du colon, mais sont restés pour l’essentiel attachés à leurs coutumes. « L’Eglise veut renverser l’ordre hiérarchique des villages en faveur de l’ordre colonial », soutient-il en substance. En ce qui concerne la note de lecture de « Lettre d’un Africain au pape François », le Dr Serges Simon Soho, historien et homme politique, a dans son intervention, insisté sur cette crise entre l’authenticité africaine et l’église dans son déploiement au quotidien. L’Africain qui veut suivre exactement les prescriptions de l’Eglise,
« joue le rôle d’un poisson à qui on demande de faire des voltiges dans les arbres avec les singes ».
Et ce déchirement est d’autant grave que l’église a investi tous les domaines de la vie quotidienne, tels que l’école, la santé, le logement et bien d’autres. Bien plus, il révèle à la lecture du livre que l’auteur est un chrétien catholique convaincu depuis sa tendre enfance mais aussi, il est un diacre animiste. Dans ce cas, quel chemin suivre ? Il poursuit en répondant que ce n’est pas à l’Africain de s’accommoder. Quant au panéliste, sa majesté Wabo Dzudom, homme d’affaires et chef traditionnel de Ngouogwa dans le groupement Baham, il a indiqué que le livre et le panel ne sont pas là pour vilipender l’église. Ses questions toutefois sont des missiles envoyées vers l’Eglise.
« Pourquoi Dieu dit-il qu’il est amour mais avoue par contre que ceux qui font du bien sont à lui et ceux qui font le mal sont séparés de lui ? On lit dans la Bible que Jésus a marché sur l’eau et on dit que c’est un miracle. Mais quand un homme se transforme en panthère pour garder son peuple, on dit que c’est la sorcellerie ? »
L’auteur veut qu’on comprenne que nous sommes ensemble rassure-t-il.
« Chez nous à Kenmali (un lieu sacré), tout le monde cotise, tout le monde mange, même ceux qui n’ont pas cotisé. Et à l’Eglise ce n’est pas le cas. Il y a des bonnes choses à l’Eglise, de très bonnes. Que chacun sache que c’est Dieu qui sauve. Que les pasteurs et les prêtres se sauvent eux-mêmes avant de sauver les autres »,
assène-t-il sous les ovations du public.
Le chemin ambigu des Africains occidentalisés
En ce qui concerne l’auteur, il avoue que son livre est un témoignage, une sorte d’aventure ambiguë proche de celle qu’a connue Samba Diallo dans le livre du Sénégalais Scheik Hamidou Kane. Il confie avoir beaucoup voyagé dans le cadre de ses activités à l’Eglise catholique. Le summum a été, précise-t-il, la rencontre avec le pape Jean-Paul II à Rome en 1985 quand il représentait les étudiants camerounais. Il a constaté que les gens dormaient dehors en plein froid, et cette situation n’ébranlait pas grand monde. Un coup dur car il n’arrivait pas à comprendre comment on pouvait laisser les gens passer la nuit dehors.
Il confie aussi que ses recherches l’ont conduit à comprendre que pendant la guerre d’indépendance au Cameroun, l’Eglise n’avait pas pris fait et cause pour les indépendantistes, mais surtout avait gardé le silence sur toutes les dérives au cours de cette période sombre de l’histoire du Cameroun. Il a aussi selon une actualité récente, été marqué par l’opposition entre Messeigneurs Watio et Kengne qui a défrayé la chronique. De ce fait il avoue que Mgr Kengne qui a succédé à son père et est entré dans les sociétés sécrètes, n’avait rien fait de répréhensible à ses yeux. Pour lui, « il a demandé pardon pour avoir dit la vérité. »
Quant au directeur général de de Facop édition, Djoko Domguia, il s’est ouvert en révélant qu’à la lecture du manuscrit, il a directement rédigé un avertissement à l’intention des lecteurs. Il s’agit selon lui dans le livre, des conseils d’un Africain pour la décolonisation totale de l’Afrique. Chaque Africain qui a lu ce doit être un messager de la bonne nouvelle. Quelle bonne nouvelle ?
« La bonne nouvelle est que toutes les religions importées doivent s’abreuver à la source des relogions africaines »,
affirme-t-il convaincu.
Ce livre n’est pas destiné aux académiciens mais à tous les Africains. Il relate les faits et les faits sont têtus. Ce livre qui va faire tâche d’huile se distribue à 15.000 Fcfa. Ce chef-d’œuvre de 526 pages, est étalé sur trois parties et 12 chapitres. Autant à Rome qu’en en Afrique, on appréciera. Une bouteille jetée à la mer pour un peuple qui perd le nord !