Par Sandra Embollo
Au moment où les condamnations pleuvent sur les auteurs du coup d’État du mercredi 26 juillet au Niger et une agression militaire en vue pour chasser les putschistes, afin d’y installer le président déchu, Mohamed Bazoum, la première puissance mondiale vient de donner un coup de pied au complot de déstabilisation du Niger, du Mali et du Burkina Faso. En nommant une ambassadrice à Niamey au moment où la France et la Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO), une de ses ramifications en Afrique, s’apprêtent à chasser le général de Brigade Abdourahamane Tchiani et ses hommes du pouvoir, les États-Unis sonnent le glas de la fin de l’hégémonie française au Sahel. Elle marquera certainement un tournant dans les relations internationales aux enjeux géopolitiques et géostratégiques au Sahel.
Tous ceux qui pensent que les richesses naturelles de l’Afrique n‘intéressent pas les États-Unis, se trompent. Ils ont de tout temps convoitisé celles-ci, mais avec prudence et méfiance. Ils se cachaient derrière la France, son bras militaro- politique en Afrique, pour mieux se servir de nos richesses naturelles. Ce masque, avec la guerre en Ukraine, vient d’être tombé au grand jour. Clients de l’uranium russe, les Américains ont été victimes de leurs propres sanctions imposées à la Russie. Le commerce de ce produit précieux, qui entre dans la fabrication des bombes atomiques, nucléaires et dans la construction des centrales nucléaires, entre les deux pays fonctionne en dents de scie. Et dans le souci de ne plus acheter l’uranium de Russie et de diversifier aussi ses sources d’approvisionnement, le gouvernement américain se tourne vers l’Afrique, précisément le Sahel. Le Mali et le Niger constituent ces deux pays du Sahel qui fourniront de l’uranium aux USA dans les années à venir. En Afrique centrale, la République démocratique du Congo (RDC) est déjà acquise à travers le Rwanda qui mène une guerre d’agression contre ce pays et de pillage de ses ressources naturelles au profit des intérêts américains, anglais, belges, etc.
Le départ de la France du Niger constitue une aubaine pour les États-Unis qui disposent déjà d’une importante base militaire d’un effectif de plus de mille soldats. Ils vont mettre la main sur l’uranium nigérien avec l’appui des nouvelles autorités qui ont déjà mis fin aux accords militaires avec l’Hexagone et entendent renégocier les contrats miniers, en particulier celui de l’uranium qui est resté une chasse gardée de la France durant plus de quatre décennies et dont les clauses sont défavorables au Niger. Ensuite, la présence américaine au Niger, c’est pour contrer l’influence russe dans cette région, dont les populations ne cessent de faire appel au président russe, Vladimir Poutine, chaque fois qu’un régime dit démocratique est balayé par un coup d’État.
En plus du coup de massue du président américain, Joe Biden, le pays d’Emmanuel Macron vient de recevoir un autre. Cette fois- ci, plus mortel que celui du Niger. Il vient du Tchad pour qui connaît sa place dans la politique française en Afrique francophone. À la grande surprise, les députés de ce pays demandent à la France d’évacuer ses bases militaires dans un délai de trois mois. Le vote s’est déroulé, samedi 12 août à N’Djamena, la capitale tchadienne.
Quant à la CEDEAO, le bras armé de la France qui avait décidé de massacrer les populations africaines au Niger pour rétablir le président déchu, c’est le sauve qui peut. Les va- t- en guerre de l’organisation sous régionale ont rangé leurs armes face à la puissance de feu des États-Unis. La nomination de l’ambassadrice américaine à Niamey et l’annonce de sa prise de fonction ont été ressenties dans les palais présidentiels des laquais de la France comme un tsunami. Ils privilégient désormais la voie diplomatique pour prendre langue avec les hommes forts du Niger pour négocier une sortie de crise.
En dépit de cette défaite du président Emmanuel Macron et ses valets tapis au sein la CEDEAO, la France se ne laissera pas faire et elle n’a pas encore dit son dernier dans ce qu’elle considère désormais comme une trahison de la part de son partenaire le plus important de la planète. Elle peut passer par d’autres moyens avec la complicité de certains de nos compatriotes pour embraser la sous-région ouest africaine. Et pour mener cette sale besogne, elle ne lésinera pas ses moyens politiques, diplomatiques, financiers, économiques pour rendre la monnaie à ses détracteurs.
Dans ce jeu de dupes, les peuples du Sahel doivent miser sur un partenariat gagnant-gagnant. Il ne s’agit plus de se jeter dans la gueule d’un autre prédateur pour ses beaux yeux, mais de négocier des accords et des contrats au bénéficie des populations qui continuent depuis les indépendances de subir les affres d’une classe politique affairiste, prédatrice et garante des intérêts occidentaux en Afrique.