Par Joël Onana avec Afp
Le président sortant de l’Ouzbékistan Chavkat Mirzioïev a été largement réélu lors de la présidentielle anticipée, dimanche 9 juillet, à l’issue d’un scrutin manquant de “véritable compétition” malgré des “réformes du cadre juridique”, d’après les observateurs de l’OSCE.
Selon les résultats préliminaires transmis lundi par la Commission électorale lors d’une conférence de presse à Tachkent, la capitale de ce pays d’Asie centrale, Chavkat Mirzioïev a obtenu 87,05 % des voix, tandis que la participation a approché les 80 %.
Élu en 2016 avec plus de 88 % des voix, il a été reconduit en 2021 avec 80 % des suffrages lors de scrutins déjà pointés du doigt par l’OSCE pour leur manque de concurrence. Avec ce nouveau mandat, Chavkat Mirzioïev présidera jusqu’en 2030 au moins cette ancienne république soviétique riche en gaz, à la position stratégique au cœur de l’Asie centrale. Ses trois adversaires, méconnus du grand public, ont récolté entre 3 % et 4 %, d’après la Commission électorale, alors que les cinq partis politiques autorisés en Ouzbékistan sont tous peu ou prou loyaux au dirigeant. Chavkat Mirzioïev avait convoqué cette présidentielle après le référendum constitutionnel du 30 avril, adopté à plus de 90 %, qui valide le passage du quinquennat au septennat et l’autorise à se représenter pour deux mandats supplémentaires.
Un “Nouvel Ouzbékistan” où “l’être humain est la valeur suprême”
Des mesures qui ouvrent la voie au maintien théorique au pouvoir jusqu’en 2037 du dirigeant ouzbek, qui avait été le Premier ministre de son prédécesseur, Islam Karimov, entre 2003 et 2016. Peu après l’annonce des résultats, le président russe Vladimir Poutine a été le premier à féliciter Chavkat Mirzioïev, suivi de nombreux chefs d’État d’ex-républiques soviétiques, mais aussi des dirigeants de la Hongrie, Viktor Orban, de la Turquie, Recep Tayyip Erdogan, et de la Chine, Xi Jinping. Ingénieur de formation, Chavkat Mirzioïev se présente comme un réformateur à même de consacrer l’ère du “Nouvel Ouzbékistan”, où “l’être humain est la valeur suprême”, un mantra affiché partout à travers le pays, critiqué par les Ong pour son bilan en matière de droits humains, particulièrement sous le dirigeant Islam Karimov.
À l’étranger, Chavkat Mirzioïev entend poursuivre sa politique d’ouverture pour rompre avec l’isolement de l’Ouzbékistan pendant la présidence d’Islam Karimov, afin d’attirer investissements étrangers et touristes.
Mais la libéralisation du système politique reste timide. Bien que l’OSCE ait salué “les réformes en cours du cadre juridique”, l’organisation l’estime cependant encore “incomplet pour tenir des élections véritablement démocratiques”.
Tous les Ouzbeks rencontrés par l’Afp avant et après l’élection ont assuré avoir donné leur voix au dirigeant sortant, dont ils ont salué la réélection.
“Je suis très satisfaite des résultats et j’attends de grands changements dans le système juridique pour que notre vie soit plus juste et que les femmes aient plus de possibilités”.
espère Dilafrouz Khamidova, diplômée en médecine de 24 ans.
Dilorom Karimova, femme au foyer de 51 ans, aimerait que le “problème du chômage dans les régions soit réglé, pour que les gens ne viennent pas chercher du travail à Tachkent”, alors que des centaines de milliers de travailleurs ouzbeks doivent également se rendre à l’étranger, principalement en Russie, pour y trouver du travail. Le président ouzbek s’est engagé à soutenir les familles des migrants, dont les envois de fonds représentaient, d’après la Banque mondiale, 11,6 % du PIB en 2021.
Chavkat Mirzioïev s’est aussi donné pour objectif de doubler le Pib, pour atteindre les 160 milliards de dollars et a assuré qu’il créerait plus de places pour les étudiants, dans un pays majoritairement jeune et à la forte croissance démographique. Il a également promis l’accès à Internet et à l’eau potable pour tous les Ouzbeks, dont la moitié vit à la campagne. Car ce pays doublement enclavé, en grande partie recouvert par les sables, est en première ligne face au réchauffement climatique.