Par Arlette Akoumou Nga, Avec Afp
M. Roïzman, 60 ans, est apparu souriant et détendu, vêtu d’un jean bleu et d’un T-shirt blanc, à l’audience qui se déroule à Ekaterinbourg, grande ville de l’Oural dont il fut maire, selon une retransmission vidéo en direct de ses soutiens.
Lorsque le juge lui a demandé s’il reconnaissait sa culpabilité dans l’affaire, Evguéni Roïzman a répondu “non”, en ajoutant qu’il s’expliquerait plus longuement après la présentation des chefs d’accusation par le parquet.
L’ancien maire d’Ekaterinbourg est accusé d’avoir “discrédité” l’armée russe dans une vidéo qu’il avait publiée sur YouTube en juillet 2022 en critiquant l’opération russe en Ukraine. Il risque jusqu’à cinq ans de prison, selon une loi adoptée en Russie dans la foulée du lancement de l’offensive en Ukraine fin février 2022, un texte répressif qui a été récemment renforcé.
L’audience, qui sera essentiellement consacrée à l’exposé des chefs d’accusation selon le juge Nikolaï Taranenko, se déroule dans une petite pièce du tribunal Oktiabrski d’Ekaterinbourg, l’accusé, ses avocats et les procureurs étant assis autour de la même table, un cas rare pour la justice russe. Quelques journalistes et soutiens à M. Roïzman sont également présents dans la salle.
Déjà mise à mal par les précédentes vagues de répression, l’opposition russe a été laminée depuis l’assaut en Ukraine. Les derniers grands détracteurs du président russe Vladimir Poutine ont émigré ou été jetés en prison. Evguéni Roïzman, qui a dirigé Ekaterinbourg, ville de 1,5 million d’habitants, entre 2013 et 2018, est considéré comme l’une des dernières grandes figures de l’opposition à être restée en Russie et à avoir, pour l’instant, échappé à une lourde peine.
Après avoir été inculpé pour avoir “discrédité” l’armée russe en août dernier, M. Roïzman n’avait pas été placé en détention provisoire, mais s’était vu interdire d’utiliser internet et de donner des interviews. Autour de lui, les principales figures de l’opposition restées en Russie ont été jetées en prison, comme Alexeï Navalny, Ilia Iachine ou Vladimir Kara-Mourza.
“Je comprends qu’ils puissent m’arrêter”, avait expliqué M. Roïzman à l’Afp en juillet dernier, en soulignant: “je ne me fais pas d’illusions, je n’ai pas peur.”
A Ekaterinbourg, M. Roïzman conserve une grande popularité qui, selon certains observateurs, l’a protégé un temps des foudres du Kremlin.
Fidèle à sa ligne indépendante, il n’a pas rejoint de parti ou de mouvement d’opposition, mais il soutient néanmoins très activement l’opposant Alexeï Navalny, lequel a été emprisonné après avoir survécu à un empoisonnement qu’il impute aux autorités.
Dernièrement, l’opposant Ilia Iachine a été condamné à huit ans et demi de prison pour avoir condamné l’offensive en Ukraine. Pour sa part, l’opposant Vladimir Kara-Mourza a écopé de 25 ans de prison, un jugement d’une rare sévérité, pour “haute trahison”, diffusion de “fausses informations” sur l’armée russe et travail illégal pour une organisation “indésirable”.