Par Arlette Akoumou Nga
Figure de l’opposition sénégalaise, Ousmane Sonko a fait écho mardi 9 mai aux appels à la mobilisation contre la menace d’inéligibilité pesant sur lui pour la présidentielle de 2024 à la suite de sa condamnation.
“Ce qui s’est passé hier est une pièce de théâtre dans laquelle les rôles ont été attribués”, a déclaré mardi soir l’homme politique réputé pour son tempérament fougueux, lors d’une allocution vidéo. “Cela ne remet nullement en cause nos projets.” Prononcée lundi en appel, la peine de six mois de prison avec sursis pour diffamation et injures contre le ministre du Tourisme pourrait entraîner la radiation des listes électorales d’un candidat sérieux à la présidence, que son discours contre les élites rend populaire parmi les jeunes.
Son élimination, sujet politique dominant depuis qu’il fait l’objet de procédures judiciaires – manipulées, selon lui –, modifierait considérablement la compétition. Elle fait aussi craindre des violences de la part de ses partisans.
Ousmane Sonko affirme que le pouvoir judiciaire est utilisé pour l’écarter de la présidentielle. Réitérant un appel à la désobéissance civile et à la “résistance”, il a souligné être “plus que jamais candidat” à l’élection présidentielle de février 2024. “Seul Dieu peut empêcher ma candidature […]. Aucun être humain ne peut l’empêcher”, a-t-il ajouté. Ousmane Sonko a demandé à ses partisans de “rester debout et de se mobiliser”, et en particulier de manifester massivement vendredi. “Nous n’avons qu’un seul adversaire, celui du Sénégal, (l’actuel président) Macky Sall”, a-t-il déclaré.
Son discours fait suite aux appels lancés plus tôt dans la journée de mardi par l’ancien maire de Dakar, Khalifa Sall, et d’autres chefs de la coalition Yewwi à se mobiliser à l’occasion d’une marche déjà programmée vendredi, et une nouvelle annoncée le 19 mai. Elle visent à la fois à soutenir Ousmane Sonko et à faire barrage à un troisième mandat de l’actuel président Macky Sall.
Absent à son procès lundi, Ousmane Sonko, 48 ans, était arrivé en troisième position lors de l’élection de 2019 face au président sortant Macky Sall. Il a l’intention de se représenter l’année prochaine. Le débat restait ouvert mardi sur la lecture des textes de loi et une perte automatique ou non par Ousmane Sonko de ses droits électoraux après cette condamnation. Elle a été largement perçue comme scellant son sort.
Ousmane Sonko crie au complot ourdi par le chef de l’État pour l’écarter de la présidentielle, tandis que ses adversaires l’accusent d’instrumentaliser la rue pour échapper à la justice.
Le sort d’Ousmane Sonko crispe la vie politique depuis deux ans, avec le flou entretenu par le président sur sa candidature à un troisième mandat controversé. Les rendez-vous d’Ousmane Sonko avec la justice sont communément l’occasion de confrontations entre ses sympathisants et les forces de l’ordre. Ses adversaires tirent argument de ces incidents et de son discours batailleur pour le présenter comme une menace pour l’équilibre du pays, rare îlot de stabilité dans une région troublée.
En 2021, son interpellation sur le chemin du tribunal pour une affaire de viols présumés avait contribué à déclencher plusieurs jours d’émeutes, qui avaient fait au moins une douzaine de morts. Son procès dans cette affaire de viols est prévu le 16 mai. Il a annoncé dimanche qu’il ne répondrait plus aux convocations des juges. La nouvelle de la condamnation d’Ousmane Sonko a causé des troubles sporadiques à Dakar et en province. Cependant, les appels à manifester de l’opposition ont eu un écho limité récemment. Les autorités ont interdit de nombreux rassemblements et déployé des dispositifs policiers significatifs.