Par Léopold Dassi Ndjidjou
A 15 mois de l’élection présidentielle, tout semble aller de travers au moment de dire son ressentiment sur l’action des élus qui arrivent à la fin de leur bail aux affaires. Ce n’est pas seulement une vue de l’esprit car depuis le 16 juillet 2024, un Arrêté du maire du Mfoundi, c’est-à-dire le patron administratif dans la ville de Yaoundé, a décidé que désormais tous ceux qui critiquent vertement ceux qui incarnent les institutions seront frappés d’interdiction de séjour temporaire. Il s’agit là d’une arme de destruction massive des libertés individuelles et collectives.
Depuis cette fatidique date, les journalistes et tous les communicateurs politiques tournent sept fois leur langue avant de parler, sous la psychose de la manière dont leurs propos seront pris ou interprétés au bout du compte par le chérif préfet. Que d’encre et de salive en vain pour exhorter Monsieur le préfet de retirer son acte liberticide ! Même le gouvernement est entré dans la danse avec une sortie mi-figue mi-raisin de son Porte-parole, sans que l’on sache trop bien si le gouvernement demandait de revenir sur l’Arrêté ou pas. En réalité, le membre du gouvernement, fin diplomate est venu souffler un peu d’oxygène sur la masse de gaz carbonique larguée dans tout Yaoundé par le représentant de Paul Biya.
On a parlé, crié, grondé, supplié, prié mais rien n’y a fait, le taciturne, l’entêté acte préfectoral est toujours-là, pour rappeler à ceux qui dans Yaoundé auraient la démangeaison de dire des choses désagréables sur le régime, qu’on les boutera hors de la cité comme des gueux et des malpropres, qu’on les déportera où personne ne le sait, dans des conditions aussi secrètes.
On en était là, que de Libreville au Gabon, à près de 800 km, un jeune activiste, qui prend souvent ses libertés et ses aises à critiquer le régime, est arrêté par les autorités gabonaises et remis aux officiels camerounais, puis déporté au Cameroun.
Ce n’est pas si loin de ce que dit le préfet: propos jugés désinvoltes ici, déportation comme réplique. La différence étant que les critiques des Institutions dans Yaoundé sont chassés de « la ville sainte », alors que ceux qui sont coupables des mêmes faits hors de la capitale, sont ramenés dare-dare à Ongola. C’est ce qui est arrivé à Junior Ngombé il y a quelques jours. De Douala où il réside, on l’a arrêté et amené à Yaoundé, où les pandores veulent certainement lui administrer une prophylaxie pour lui couper à jamais la diarrhée verbale contre la mauvaise gouvernance.
Est-ce possible ? C’est bien de ne pas oublier que tous les conflits dans le monde se construisent d’abord dans les esprits avant d’éclater au grand jour. Peut-être que le préfet et le pouvoir sont dans la phase de déconstruction des esprits braqués, une déradicalisation avant les élections. Une tâche herculéenne !
