Par Sandra Embollo
Au Cameroun, le comportement des exportations du bois (brut et scié) ; l’une des principales sources de recettes à l’export, inquiète à deux mois de la fin de l’exercice en cours. Selon les données obtenues auprès du Groupement de la filière bois du Cameroun (Gfbc), au cours des 09 premiers mois, le pays a exporté moins de 300 000 m3 de bois soit moins de 50% de près de 700 000 m3 vendus à l’extérieur à la même période en 2023. Les statistiques du commerce extérieur du troisième trimestre 2024 dressées par les Douanes camerounaises s’inscrivent dans la même logique. D’après l’institution, l’on est passé de 211 213 tonnes de bois sciés exportées au troisième trimestre 2023 à 186 141 tonnes un an plus tard soit une chute de 25 072 tonnes (-12%). Cette contreperformance du volume de bois expédié a entraîné une diminution de 2,5 milliards de Fcfa de revenus (-10%). Le bois brut, lui, s’est établi à 105 140 tonnes (-21%) pour 7,5 milliards de Fcfa (-23%).
Aux origines de la chute
Les acteurs de la filière bois attribuent la chute observée à plusieurs facteurs. Le premier est relatif à une fiscalité jugée élevée. L’on se souvient à cet effet, qu’au premier trimestre de l’année en cours, les exploitants forestiers ont menacé de susprendre les exportations en raison d’une part, au relèvement des droits de sortie sur les bois transformés de 10% à 15% de la valeur FOB des essences dans le projet de loi de finances 2023 d’une part, et de 50% à 60% pour les grumes d’autres part (ajusté à 75% dans la loi de finances 2024, Ndlr). « Le bois du Cameroun n’est plus compétitif parce qu’on a une fiscalité qui est assez élevée (la plus élevée de la sous-région). En plus, le Cameroun est l’un des rares pays où on paie après avoir transformé (tu dois payer pour exporter le bois que tu as transformé », déplore un exploitant forestier.
L’autre raison évoquée est liée au marché de l’immobilier chinois qui aurait connu un repli ainsi que l’économie chinoise dans son ensemble. Vu sous cet angle, le bois camerounais serait donc victime de cette situation conjoncturelle de l’Empire qui est quasiment la première destination du bois camerounais. Du reste, le contexte actuel marqué les conflits à l’instar de celui entre la Russie et l’Ukraine aurait également un rapport avec la baisse des exportations en quantité et en valeur monétaire au Cameroun. Cette chute drastique a un effet négatif sur l’économie, notamment en ce qui concerne la création d’emplois dans la filière bois. « Aujourd’hui on a licencié près de 1 500 employés et 800 d’entre eux ont été mis en congés technique», nous confie un membre du Groupement de la filière bois du Cameroun.
Pour l’heure, les pouvoirs publics ne se sont pas encore officiellement prononcés sur cette actualité mais des sources proches du dossier révèlent que l’Etat réfléchit sur les mesures à prendre pour accompagner les opérateurs économiques. On peut dès lors subodorer que des réformes allant dans ce sens pourraient être introduites dans le loi de finances 2025 que les parlementaires attendent examiner à partir du mois de novembre prochain.
Outre la surtaxation ; les opérateurs économiques font aussi face à l’envolée continue des coûts de production depuis 2021. A titre d’exemple, « les prix à la production dans les industries du bois ont crû de près de 12 % au 2e trimestre de 2024. C’était déjà le cas en début d’année, où l’on a enregistré une hausse de près de 12,5 %. Sur un trimestre, les prix dans les industries du bois ont augmenté de 3,4 %»,notel’Institut national de la statistique (Ins) dans l’Indice des prix à la production industrielle (IPPI) au 2e trimestre 2024. A noter que les exportations du bois sont en perte de vitesse alors que la Banque des Etats de l’Afrique centrale (Beac) projette une embellie de la production à fin décembre 2024. Pour la Banque centrale, la production de bois du Cameroun s’établirait à 5 558,6 m3 (contre 5 386,9 estimés un an plus tôt) soit les 47% de la production globale de la Cemac prévue à 11 698,9 m3.
