Par Léopold DASSI NDJIDJOU de retour de Foumban
Le discours du président du Syndicat Syconoun a été lu par le maire de Malantouen, en l’absence de Tomaïno Ndam Njoya appelée ailleurs par les nécessités de services. Le préfet du Noun était également représenté. Dans le discours de circonstance, rédigée par le président du Syconoun, on apprend que la cérémonie hommages aux nationalistes est rendue à sa 4ème édition, car « la journée de devoir de mémoire, réconciliation avec nos nationaliste », a été instituée par le Syndicat en 2020. L’honneur est revenu cette année à Marie-Irène Biyong, une des pionnières dans la lutte pour l’indépendance du Cameroun. Comme il est de coutume en pareille circonstance, un débat poignant a porté sur les défis de l’engagement politique des femmes en politique. Cette figure emblématique est mise en avant de manière pédagogique pour illustrer une détermination éprouvée dans un contexte politique très difficile. « Les éditions précédentes se sont focalisées sur l’une ou l’autre des figures de proue de ce nationalisme qu’on a voulu controversé: Roland Felix Moumié, Um Nyobe, Ernest Ouandié, Abel Kingué, Osende Afana, Michel Ndoh, Njawouo Abdoulaye Nicanor, Woungly Massaga », a précisé Tomaïno Ndam Njoya. Femme déterminée dans un contexte politique plus qu’hostile, celle qui a rejoint l’éternité le 5 novembre 2012 est née le 22 juillet 1926 à Maka’e Dehane dans le département de la Sanaga Maritime, région du Littoral.
Une femme de conviction
Enseignante de formation, elle est diplômée de l’École normale de Foulassi en 1953. Elle entre en politique à la ferveur du militantisme de son époux Job René Ngapeth, haut cadre de l’Upc. En 1952, elle fonde avec Marthe Ouandié et Julienne Niat l’Union des femmes camerounaises (Ufc). Elles sont par la suite rejointes par Gertuge Omog et Emma Mgom avec qui elles fondent le 3 août 1952 l’Union démocratique des femmes camerounaises (Udefec). Cette Union soutient les revendications nationalistes. Au bout de quelques années, l’Udefec et l’Upc se rejoignent et cette union devient un peu comme un organe annexe de l’Upc. Marie-Irène Biyong Ngapeth, élue secrétaire générale de l’Udefec lors du congrès en Août 1954, continue de revendiquer l’autonomie du mouvement. Elle est conduite devant le Conseil de discipline présidé par Félix Moumié, Ernest Ouandié et Abel Kingué. On lui reproche de considérer Udefec comme une entité séparée et d’avoir créé un organe de presse « Femmes Kamerunaises » sans en avoir informé la hiérarchie du parti. A la suite du décret de la France interdisant les activités de l’Upc et de ses organes annexes et de l’émission d’un mandat d’arrêt contre les dirigeants des organes du parti en 1955, elle s’exile au Cameroun britannique, puis au Nigeria. Elle retourne au Cameroun à la veille des indépendances et renoue avec la tendance légaliste de l’’Upc, qui avait abandonné la lutte armée et le maquis et qui était conduite par Théodore Mayi Matip. Elle tente de relancer l’Udefec après l’indépendance, mais le désaccord entre les légalistes et les révolutionnaires – tendance choisie par les vice-présidentes Kamé Monique et Teck Cécile, de même que la secrétaire générale adjointe Marthe Ouandié, – conduisent à l’échec de l’initiative. En 1961, elle est nommée secrétaire générale du Conseil national des femmes camerounaises. En plus de cette lumière portée sur le nom de Marie-Irène Biyong à travers le débat et le discours du président de Syconoun, il y a eu la projection du film documentaire : «Cameroun, autopsie d’une indépendance », réalisé par Gaëlle le Roy et Valérie Osouf. Il dure 52 minutes et raconte le difficile parcours des nationalistes camerounais. A côté des grands hommes, il y avait assurément des grandes femmes. « Nous avons rendu hommage aux combattantes Marthe Ekemeyong Moumié, à Marthe Ouandié », a rappelé Tomaïno Ndam Njoya.