Par Léopold DASSI NDJIDJOU
L’ambassadeur de France, Thierry Marchand himself a présidé la passation du flambeau entre le président de l’équipe Conseil sortante, Jacques Jonathan Nyemb arrivé au terme de 2 ans de mandat et l’équipe entrante dirigée par Myriam Hermès Njimegne Nkwa dont le mandat de son team court jusqu’en 2026. Le diplomate français a saisi l’occasion pour faire l’éloge de la vitalité du Cameroun, selon lui au peloton de tête dans l’implémentation de la nouvelle diplomatie française en Afrique lancée depuis l’université de Ouagadougou en novembre 2017 et mise en route au sommet inédit de Montpellier en octobre 2021. « Le Cameroun ouvre la voix parce que sans que l’on sache trop pourquoi, c’est le pays je pense où la greffe a le mieux pris. L’idée au départ était de semer dans tous les pays d’Afrique la même semence. De ce point de vue, le Cameroun a été une terre féconde. Au Quai d’Orsay, le Cameroun est un pays modèle sur lequel on peut continuer d’investir », a-t-il lancé à l’endroit de l’équipe sortante tout en magnifiant le sens de l’intuition qui a guidé tout le monde. En réalité, reconnaît-il, « on part d’une page blanche ». Comment procéder quand on n’a pas de mode d’emploi ? Comment reconstituer un puzzle quand on n’a pas la photo finale ? Telles sont les interrogations auxquelles sont confrontées la nouvelle politique française sur le continent. Puisqu’avec Emmanuel Macron il est désormais question d’allier la parole à l’acte, les chancelleries sont comme des pionniers et doivent construire une nouvelle politique dans l’urgence. Dans l’épisode de deux ans, il s’agit de procéder donc par intuition pour mettre en œuvre une redéfinition des relations entre le Cameroun et la France d’une part, et entre l’Afrique et l’Europe d’autre part. Cette urgence-là, qui est fondamentale selon les termes du diplomate, est liée à la formation politique et institutionnelle des pays qui se respectent, qui s’apprécient, pour travailler sur les forces civiles d’une Nation. Il a tout autant rendu hommage à l’équipe sortante parce son premier succès est dans la survie de l’implémentation de cette nouvelle politique. En deux ans, « ils ont tué la méfiance qu’on avait au départ autour de ce nouveau Conseil ». Thierry Marchand s’est en deuxième lieu félicité de la gestion de l’impatience. « Quand on est jeune, on a plus de temps. Mais en réalité, on est très impatient. On a senti au sein du Conseil une sorte de frustration que les choses n’allaient pas assez vite, qu’il fallait faire plus, bref une réaction spontanée d’une jeunesse qui veut aller vite. Il a fallu les canaliser, les gérer pour que le Conseil n’explose pas sous la personnalité des uns et des autres et de passer à côté de l’objectif », a-t-il soufflé sur ce point. Il a également soulevé l’épineuse question de la communication dans un contexte d’incertitude. Effectivement, communiquer, c’est exister. Mais communiquer en direction de quelle cible ? « J’ai eu la sensation de vivre un exercice de tâtonnement, d’incertitude, d’être confronté à un certain nombre d’hypothèses, de vivre une sorte de précarité », résume-t-il en guise d’impression au cours de cette première mandature avant de féliciter la nouvelle équipe qui est conduite par une dame, autant que sa trésorière. La deuxième équipe, a-t-il poursuivi, a du sang neuf. Les choses seront plus faciles pour elle car il existe par exemple désormais des projets financés, ce qui n’était pas le cas au cours de la première mandature.
Le bilan du premier Conseil sortant
De manière globale, en deux ans, il a travaillé sur 5 thématiques prioritaires avec un budget de fonctionnement de 6.555.000 Fcfa ; un budget projets à hauteur de 612.425.000 Fcfa ; 7 projets ; un écosystème de 7000 jeunes et entretenu un lien entre l’Afrique et l’Europe. Au chapitre des 7 projets, on retient en premier lieu « Actions citoyennes » qui ont duré 9 mois, avec un budget de 20.000 euros. A ce sujet, l’équipe indique qu’il y a eu des impacts concrets. Par exemple, un rapport analytique de 33 pages a été conçu par un universitaire, expert en politique et notamment sur les questions de démocratie. La germination d’idées nouvelles et novatrices tournées vers la réédition du modèle de fonctionnement des sociétés en Afrique et dans le monde. L’existence de liens forts entre le Conseil et des organisations en France et au Rwanda. Au nombre des personnes touchées directement, il y a 35 leaders associatifs ; des leaders institutionnels ; 1500 personnes ont été directement touchées ; plus de 500 personnes à travers les réseaux sociaux des associations Newseta ; certaines publications ont atteint les 2500 personnes. « Kurukan Fuga » est le 2ème projet. Il a duré 7 mois avec 20.000 euros de budget. Parce qu’il s’agit d’un projet de rencontres, on peut citer la création d’un réseau d’étudiants et de lycéens camerounais et français ; la création d’une plateforme de rencontres ; la création de contenus numériques sur les thématiques traitées par le Conseil ; 150 lycéens camerounais et français ont été touchés dans les villes de Douala et Yaoundé ; 1000 étudiants de l’université de NGaoundéré ; 100 acteurs du sport et de la culture entrepreneurs réunis à Marseille ; 100 entrepreneurs de la ville de Douala et environ 100.000 internautes camerounais et français. Le troisième projet porte sur la Transition écologique. Il a une durée de 2 ans avec 559.500 euros de budget et est toujours en cours. On retient ici en guise de bilan, une cartographie des acteurs clés ; 14 partenariats de mise en cause ; 8 projets financés ; 1300 organisations qui en savent davantage sur le sens de la transition écologique ; 1000 femmes formées en installations électriques solaires ; 3800 personnes touchées directement dont 40% de femmes et 155.000 indirectement. Le 4ème projet est « Droits humains », avec une durée de 10 mois, 55.000 euros de budget alloué. On recense 6 projets portés par des organisations de la société civile des zones rurales soutenues ; 3 réseaux d’organisations de la société civile impliqués ; plus de 10.000 bénéficiaires indirects. Le 5ème projet est la « Création et structuration des hubs locaux ». Il est en cours et une durée de 6 mois ; avec 40.000 euros de budget alloué. 8 responsables de hub ; 20 points focaux régionaux ; 2 microprojets à financer ; un concours art coopération Cameroun-France organisé et un documentaire. Quant aux personnes touchées directement, il y a eu 150 bénéficiaires et 100.000 bénéficiaires indirects. Le 6ème projet est « l’Institut Afrique Europe pour l’Innovation Verte ». Il est en cours avec une durée indéterminée. L’étude de la faisabilité du projet est achevée et concluante. Le budget n’est pas précisé. Les thématiques en cours sont la gestion des déchets et la qualité des sols ; la question de la ressource en eau, disponibilité et accès à l’eau douce potable ; la question de la conservation des forêts et de l’agroforesterie. L’autre temps fort de ce bilan est le « plaidoyer et initiatives ». On retient de ce fait la réciprocité mobilité volontaire ; la restitution mémorielle ; la gouvernance locale, la participation citoyenne et démocratie ; l’entrepreneuriat, l’innovation et le développement durable ; la commission mémoire ; la fondation de l’innovation pour la démocratie ; l’Institut Afrique Europe pour l’Innovation Verte. Par ailleurs, les 13 recommandations de Montpellier sont entre autres, lancer le Fonds d’innovation pour la démocratie ; bâtir la Maison des mondes africains et des diasporas ; enclencher le Programme campus nomade ; initier le Forum euro-africain sur les migrations ; lancer la « Plateforme » de débats Afrique-France ; relancer la dynamique de restitution et expérimenter les musées de demain ; accompagner la jeunesse africaine vers l’emploi ; créer une Commission intercontinentale sur la transparence économique ; développer le programme « Startups Africa France » ; faire entendre la « voix de l’Afrique » sur le climat et la biodiversité ; transformer l’aide publique au développement ; tisser un nouveau narratif entre l’Afrique et la France et refonder les relations avec l’Europe du XXIe siècle.