Par Arlette Akoumou Nga
Une réunion d’urgence du Conseil de sécurité de l’Onu doit avoir lieu jeudi 25 janvier, à la demande de Moscou qui accuse l’Ukraine d’avoir abattu un avion de transport militaire russe et tué tous ses passagers dont 65 prisonniers de guerre ukrainiens devant être échangés.
La réunion doit avoir lieu à 17 h 00 (22 h 00 Gmt), a annoncé la présidence française du Conseil, après une demande formulée mercredi par le chef de la diplomatie russe en visite à New York, Sergueï Lavrov. “Le fait que les Ukrainiens ont tué leurs prisonniers, leurs citoyens, qui devaient se retrouver
à la maison pratiquement dans 24 heures, c’est bien sûr un acte tout à fait monstrueux”, a réagi, jeudi, le porte-parole du Kremlin, Dmitri Peskov, auprès des agences de presse russes.
Il a prévenu que cet incident pourrait affecter la poursuite du “processus” d’échange de prisonniers avec l’Ukraine.
Enquête ouverte par les services spéciaux ukrainiens
De leur côté, les services spéciaux ukrainiens (Sbu) ont annoncé jeudi l’ouverture d’une enquête. “L’enquête est menée en vertu de l’article 438 du Code pénal ukrainien (violation des lois et coutumes de la guerre)”, a indiqué le Sbu.
Le président ukrainien, Volodymyr Zelensky, a, lui, demandé l’ouverture d’une enquête internationale, et chargé plusieurs agences d’État de conduire leurs propres investigations sur le crash.
“Nous devons établir tous les faits clairement et autant que possible, étant donné que l’avion a été abattu sur le territoire russe, ce qui échappe à notre contrôle”, a déclaré Volodymyr Zelensky, mercredi soir, dans son adresse quotidienne, sans attester que des prisonniers de son pays font bien partie des victimes. Kiev n’a pas confirmé ni infirmé que l’appareil avait été abattu par des armes ukrainiennes, comme le soutient Moscou. Selon les autorités russes, 74 personnes, dont 65 prisonniers de guerre ukrainiens transportés en vue d’un échange, ont trouvé la mort à cette occasion.
L’armée ukrainienne a confirmé qu’un échange de prisonniers était bien prévu mercredi et a estimé que la Russie avait la responsabilité de protéger les prisonniers de guerre ukrainiens dont elle a la garde.
Des “missiles américains et allemands” utilisés
L’avion s’est écrasé mercredi près de Iablonovo, à 45 kilomètres de la frontière avec l’Ukraine, dans la région russe de Belgorod. Des images diffusées sur les réseaux sociaux montrent un appareil chutant presque à pic, avant une grosse explosion au sol, accompagnée de flammes et de fumée noire.
D’après Moscou, Kiev “savait” que les prisonniers seraient emmenés en avion à Belgorod, puis à un point de rendez-vous à la frontière. La Russie affirme que les forces ukrainiennes ont lancé “deux missiles” issus “d’un système de défense antiaérien” pour abattre le transporteur militaire Il-76 et pouvoir ensuite “accuser la Russie”. Les 65 prisonniers ukrainiens ainsi que les six membres d’équipage et trois militaires russes présents à bord ont péri, selon l’armée russe. Le porte-parole du Kremlin, Dmitri Peskov, a promis d'”éclaircir” les circonstances du crash, le président de la Douma, Viatcheslav Volodine, assurant de son côté que des “missiles américains et allemands” ont été utilisés pour abattre l’aéronef.
Le renseignement militaire ukrainien (Gur) a pour sa part assuré que Kiev n’avait “pas été informé” de la nécessité de sécuriser l’espace aérien dans la zone et ne connaissait pas “le mode de transport des prisonniers”, reprochant à Moscou de les avoir délibérément “mis en danger”. Le Gur affirme également “ne pas disposer d’informations fiables” sur les passagers du Il-76 abattu, tout en confirmant qu’un échange de prisonniers était “prévu” mais n’avait finalement pas eu lieu.
Huit mille Ukrainiens en captivité, selon Kiev
Dans un communiqué publié quelques heures après le crash et sans en faire mention directement, l’armée ukrainienne a promis de continuer à “détruire les appareils de transport et contrôler l’espace aérien (…) y compris dans la zone de Belgorod-Kharkiv”. La région russe de Belgorod est régulièrement visée par des attaques de missiles et de drones ukrainiens du fait de sa proximité avec la frontière et en réplique aux multiples bombardements russes de l’Ukraine. Plus de 8 000 Ukrainiens, dont plus de 1 600 civils, se trouvent en captivité aux mains des Russes, selon Kiev.
En juillet 2022, Kiev et Moscou s’étaient mutuellement accusés du bombardement d’une prison à Olenivka, dans l’est de l’Ukraine occupé par la Russie, attaque au cours de laquelle plus de 50 prisonniers de guerre ukrainiens avaient péri.
La Russie bombarde presque quotidiennement des agglomérations ukrainiennes. Sur le front, les principaux combats se concentrent notamment autour d’Avdiïvka, une ville industrielle du Donbass (Est) subissant les assauts répétés des forces russes qui tentent inlassablement de l’encercler.
“Des groupes de sabotage et de reconnaissance” ont réussi à entrer pour la première fois dans Avdiïvka, selon son maire, Vitaly Barabach, joint mercredi par l’Afp, “mais ils ont été repoussés”.