Par Joël Onana
Ils ont été exclus par la majorité républicaine de la Chambre pour avoir tout simplement manifesté dans l’enceinte du Parlement, quelques jours après la tuerie qui avait frappé une école de Nashville. Le 30 mars, Justin Jones et Justin Pearson, deux élus démocrates de la Chambre des représentants du Tennessee, avaient joint leur voix à des manifestants venus réclamer à leurs élus un meilleur contrôle des armes, effectivement après cette fusillade.
Et il y a quelques jours, au terme d’un débat long et violent, les Républicains, largement majoritaires, ont voté leur expulsion du Parlement pour avoir enfreint le règlement interne. Le problème, c’est qu’une troisième élue démocrate avait, elle aussi, manifesté. Mais elle conserve son siège. Elle est blanche, eux sont noirs.
Pour beaucoup, il ne fait aucun doute qu’il s’agit là d’une décision raciste. Le Tennessee est un état conservateur du sud, les questions raciales y sont encore très problématiques. Et le fait est que les expulsions d’élus sont extrêmement rares, elles se comptent sur les doigts d’une main et n’ont eu lieu par le passé que pour des faits graves dans le cas d’élus accusés de crimes ou de corruption.
Dans cette affaire, les deux élus démocrates assurent que leur expulsion n’est que le dernier chapitre d’une campagne qui les vise depuis leur élection. « Le Parlement du Tennessee a toujours été un lieu de travail toxique, affirmeJustin Pearson, invité sur Nbc News. Quand vos propres collègues vous disent qu’ils vont vous pendre à un arbre. Quand vous portez un habit traditionnel et que l’un des élus vous dit que ce n’est pas professionnel. Ils vous disent clairement que vous n’êtes pas à votre place ici ! »
« Je crois que le fait que nous soyons des jeunes noirs qui se battent pour leurs communautés, des jeunes qui ne baissent pas la tête, c’est ce qui a fait de nous des cibles le jour où nous avons le pied à l’assemblée du Tennessee. Nous sommes les plus jeunes élus noirs du Tennessee »
rappelle Justin Jones.
Que va-t-il se passer maintenant ? Les sièges des deux élus étant vacants, il faut nommer des remplaçants par intérim en attendant une élection spéciale. Mais Justin Jones pourrait être de retour à son poste dès aujourd’hui car la commission chargée de nommer un remplaçant par intérim a déjà fait savoir qu’elle comptait voter pour lui. Et il a également annoncé qu’il comptait se représenter à la prochaine élection.
Pareil pour Justin Pearson qui compte aussi se représenter. On ne sait pas encore si, dans son cas, la commission du district dont il dépend compte le désigner pour assurer l’intérim.
Cette affaire fait en tout cas grand bruit alors que les deux élus ont reçu le soutien de Joe Biden et de Kamala Harris. Le président parle d’une éviction anti-démocratique. Et il faut dire que cette affaire accroît un peu plus les rancœurs entre républicains et démocrates.