Par Paul Tjeg
Les crypto-actifs commencent à jouir d’une relative légitimité auprès des pouvoirs publics. Après de nombreux séminaires visant à cerner les enjeux, les opportunités et les risques que peut encourir le Cameroun s’il venait à succomber à leur attrait, le pays semble désormais prêt à exploiter leur plein potentiel. C’est du moins ce qui transparaît d’un rapport de la Direction générale du Budget (DGB), du ministère des Finances, publié à la fin du mois de juillet.
A en croire ce document, des réflexions sont en train d’être menées pour permettre au Cameroun d’acquérir des capacités techniques et opérationnelles, indispensables pour l’exploitation d’une plateforme de crypto-monnaie. L’objectif est de constituer un portefeuille de crypto-actifs destinés «à certaines dépenses de souveraineté» Il s’agit aussi, par le biais des transactions au sein de cet écosystème financier,
«de comprendre de manière précise les habitudes de nos populations et celles de la sous-région et être en mesure d’apporter des réformes fiscales, juridiques et réglementaires pertinentes dans l’intérêt supérieur du Cameroun»,
précise la Direction générale du Budget.
La première phase de cette opération va se décliner sous la forme d’un Hackathon digital. Le but est de mettre sur pied un système de paiement en crypto monnaie de type cross-border entre le Cameroun et certains de ses voisins tels que le Nigeria, ou l’utilisation des monnaies digitales se démocratise progressivement. IBM, le géant américain des services informatiques qui accompagne le Cameroun dans ce processus, est convaincu que disposer d’un cadre commercial d’échange en token cryptographiques pour les opérateurs économiques
«est susceptible d’améliorer significativement la balance de paiement des deux Etats (Cameroun et Nigeria, Ndlr). Tout en réduisant leur dépendance aux devises de l’Euro et du dollar qui sous-tendent les monnaies locales respectives des deux pays»,
a confié Tejasvi Chugh, Vice president strategy and corporate development d’IBM, aux responsables du Centre National de Développement de l’Informatique (Cenadi), lors d’une récente mission à New-York.
Pour l’heure le début de l’opération est encore un mystère. Toutefois, pour se prémunir de l’ingérence des organes de régulation de la Communauté économique et monétaire de l’Afrique centrale qui, pour le moment, n’accorde pas le statut juridique de monnaie aux cryptomonnaies, le Cameroun se défend de toute volonté de passage en force.
«Le but n’est pas de violer ou outrepasser les cadres juridiques et règlementaires auxquels il (Cameroun, ndlr) a librement consentis»,
précise la DGB.
Il s’agit plutôt de faire face
«aux visées expansionnistes des monnaies digitales publiques et privées, portées par des lobbies et certains Etats (Centrafrique et Nigeria, Ndlr) mais qui à terme ne sont rien d’autres que des [Chevaux de Troies] donc en apparence inoffensives mais qui pourraient être préjudiciables plus tard»,
a-t-elle conclu.
