Par Joël Onana
Malgré les tentatives de l’exécutif de calmer la mobilisation, les agriculteurs se rapprochent de Paris, mercredi 31 janvier, et du marché de gros de Rungis, poumon alimentaire de la capitale, qu’ils souhaitent bloquer. Une centaine de points de blocages et 10 000 manifestants ont été recensés. Du côté de l’exécutif, le ministre de l’Agriculture, Marc Fesneau, est attendu mercredi après-midi à Bruxelles pour “pour une série d’entretiens visant à accélérer le traitement des urgences européennes”, a indiqué son cabinet.
Dix-huit personnes ont été interpellées pour “entrave à la circulation” mercredi matin près du marché de gros de Rungis que les agriculteurs en colère, réunis en convoi, menacent d’investir, a-t-on appris de sources policières. Il y a en France mercredi “plus de 100 points de blocage” et 10 000 manifestants, a chiffré le ministre de l’Intérieur, Gérald Darmanin tôt mercredi matin. “Ils ne s’en prennent pas aux forces de l’ordre, ils n’entrent pas dans Rungis (…) Mais si jamais ils devaient le faire, évidemment je le répète, nous ne laisserions pas faire”, a-t-il ajouté.
Le convoi d’agriculteurs parti du Sud-Ouest à l’appel de la Coordination rurale, qui avait repris la route en direction du marché de gros de Rungis (Val-de-Marne) mercredi matin, était en partie bloqué dans le Loiret en fin de matinée, a constaté un journaliste de l’Afp.
A Sully-sur-Loire, une vingtaine de tracteurs étaient arrêtés avant le pont qui enjambe la Loire par un cordon de gendarmes mobiles. Les ponts de Jargeau, Châteauneuf-sur-Loire, Sully-sur-Loire et Gien sont bloqués, a précisé à l’Afp la gendarmerie, en ajoutant qu’une trentaine de tracteurs remontaient en direction de Pithiviers après avoir forcé le passage à Gien dans la matinée.
Sur place, la préfète de la région Centre-Val de Loire et du Loiret Sophie Brocas a indiqué à l’Afp “attendre la conclusion” d’une réunion qui se tient selon elle depuis 11H30 à Matignon avec des responsables de la Coordination rurale.
“On va avancer pas à pas, je ne souhaite pas d’affrontement. Rungis est la plateforme qui alimente un bassin de vie de 12 millions de personnes, Rungis c’est non. Les préfets du Lot-et-Garonne et de Dordogne les ont prévenus et je leur ai redit”.
a-t-elle ajouté.
Le Premier ministre Gabriel Attal a reçu ce mercredi matin la Confédération paysanne et la Coordination rurale, a appris l’Afp auprès d’une source au sein de l’exécutif.
Auditionné au Sénat, le président de la Fnsea Arnaud Rousseau a affirmé qu’il essayait “d’appeler au calme et à la raison” face à la colère des agriculteurs.
Alors que des blocages se poursuivent dans toute la France, M. Rousseau a reconnu que “l’attente est énorme” face au “cumul de normes et de règles”. Mais “il y a aussi beaucoup de sujets européens qui ne sont pas des sujets qui se règlent en trois jours”, a-t-il expliqué devant la Commission des Affaires économiques de la chambre haute.
La Commission européenne a proposé mercredi d’accorder pour 2024 une dérogation “partielle” aux obligations de jachères imposées par la Politique agricole commune (PAC), qui cristallisent ces dernières semaines la grogne des agriculteurs à travers l’Europe. Une dérogation avait déjà été accordée en 2023 pour cette règle imposant de laisser au moins 4% des terres arables en jachères ou surfaces non-productives. Cette obligation serait suspendue pour 2024, à condition que les agriculteurs atteignent 7% de cultures intermédiaires ou fixatrices d’azote, précise l’exécutif européen. Un assouplissement réclamé par une majorité des Etats membres, dont la France.