Par Sandra Embollo
Les Nigérians ont commencé à voter samedi 25 février 2023 pour élire le prochain président du pays le plus peuplé d’Afrique, lors d’un scrutin à l’issue incertaine, sur fonds de grave crise économique et sécuritaire.
À 80 ans, le président Muhammadu Buhari se retire comme le veut la Constitution après deux mandats marqués par une explosion de l’insécurité et de la pauvreté dans ce pays où 60 % de la population a moins de 25 ans.
Pour la première fois depuis le retour à la démocratie en 1999, le Nigeria pourrait connaître une présidentielle à deux tours alors que la popularité d’un ex-gouverneur vient bousculer la prédominance des deux principaux partis.
Le futur président héritera d’une myriade de problèmes : des violences criminelles et jihadistes dans le Nord et le centre, une agitation séparatiste dans le Sud-Est, une inflation galopante, un appauvrissement généralisé. Pour ne rien arranger, de récentes pénuries d’essence et de billets de banque ont provoqué des émeutes.
Tairu Aramide, une cuisinière de 57 ans, attend depuis 7 h du matin, assise sur un trottoir d’Ikoyi, à Lagos.
“Le pays va mal, nous avons besoin de changement, d’écoles pour nos enfants, de lumières dans nos rues et de pouvoir manger à notre faim”.
dit-elle.
À Yaba, un autre quartier de la capitale économique, Suleiman Isa, 29 ans, affirme qu’il ne votera pas. Il a bien une carte électorale mais, originaire de Sokoto dans le nord du pays, il n’a pas pu voyager à cause de la pénurie de liquidités. “C’était important pour moi de voter”, se désole-t-il en racontant l’insécurité qui ravage sa région, les kidnappings et les attaques quotidiennes.
Parmi les candidats en lice, trois se démarquent : Bola Ahmed Tinubu, candidat du parti au pouvoir (Apc), Atiku Abubakar, du principal parti d’opposition (Pdp), et Peter Obi, soutenu par le Parti travailliste.
Reconnaissance faciale et digitale
La campagne a été marquée par des attaques visant des candidats locaux, militants, postes de police et bureaux de la commission électorale.
“Le risque de violence est une réelle préoccupation”, relève Sa’eed Husaini, du Centre pour la démocratie et le développement (Cdd).
L’identification des électeurs par reconnaissance faciale et digitale devrait limiter les fraudes qui ont entaché les scrutins précédents, espère la Commission électorale. Tout comme le transfert électronique des résultats. Mais l’utilisation de nouvelles technologies, inédite à l’échelle nationale, fait aussi craindre des défaillances.
La participation, faible lors des scrutins précédents (33 % en 2019), est une autre inconnue.
Un pic de nouveaux électeurs inscrits (10 millions, dont 76 % a moins de 34 ans) est en mesure de changer la donne.
L’insécurité généralisée “pourrait perturber le vote”, s’inquiète aussi le groupe de réflexion International Crisis Group (Icg). Près de 400 000 membres des forces de sécurité ont été déployés.
Les résultats doivent être annoncés dans les 14 jours suivant le scrutin.