Par Léopold DASSI NDJIDJOU
« L’adhésion au Brics est un succès stratégique »,
A lancé immédiatement l’Iran pour saluer son entrée.
Cette déclaration traduit tout l’enjeu qui se joue derrière l’appel du Groupe des 11 (d’ici janvier 2024) pour un nouvel équilibre mondial face aux Etats-Unis et l’Union Européenne. Qu’on le veuille ou pas, l’impression est nette qu’il se met en place les pièces d’un puzzle géant pour combler les vide laissés par le démantèlement du Pacte de Varsovie en 1991 et par ricochet de la substantialité du Non alignement face aux deux blocs stratégiques de Guerre froide. Dans cette dynamique, la Russie dans la survivance de la défunte Urss, réactive de ce fait au sein des Brics un esprit de réplique en termes d’armements à côté de la Chine ou l’Inde.
Pour la petite histoire l’Inde a aluni en plein sommet, le 23 août, un engin pour la première fois dans le sud de la lune. C’est dire que cette nouvelle architecture est le podium où les nouvelles puissances bandent les muscles. Si beaucoup de pays du défunt Pacte de Varsovie font désormais partie de Traité de l’Atlantique nord (Otan), les Brics étendent ses tentacules partout sur la planète et devient de ce fait plus inclusif. Tous les continents sont représentés alors que l’Otan se concentre sur l’Amérique du Nord et l’Europe, même si elle offre son parapluie stratégique au Japon et à la Corée du Sud. En ce qui concerne les pays non alignés d’autrefois, il n’existe plus rien car les leaders annoncés tels que l’Egypte ou l’Ethiopie sont déjà dans la maison Brics.
Peut-on parler de l’émergence en occultant l’autonomie sécuritaire ? Il y a lieu d’indiquer que la toute-puissance de l’Occident, pilotée par les Américains à travers l’Otan, suscite des inquiétudes et des réprobations au sein des puissances émergentes avec pour tête de proue le Chine et la Russie. C’est dire donc que l’élargissement des Brics qui en janvier 2024 réclamera la moitié de la population mondiale avec plus de 40% du Pib de la planète sera un sérieux challenger au monde occidental. Ce qui est frappant, est l’engouement des Etats du monde à rejoindre ce nouveau groupe qui demande un nouvel ordre mondial. Si le système onusien n’est pas remis en cause, le nouveau parapluie économique et certainement stratégique qu’offre ce nouvel instrument sera de plus en plus attractif et surtout en Afrique où beaucoup de pays seront tentés de saisir l’opportunité pour essayer de briser définitivement les entraves du joug colonial. Avec par exemple une banque centrale des pays du Brics qui va battre monnaie, la nouvelle donne est alléchante pour plusieurs pays du monde. Il sera désormais rare de compter les pays qui ne voudront pas intégrer ce groupe à moins que l’Occident mette sur la table une offre et des garanties plus opportunes et équitables.
Une ouverture des Brics à tête chercheuse
Les Brics des 11 à partir de janvier 2024 va prendre du poil de la bête sur la scène internationale avec un gain démographique de plus de 400.000.000 de personnes. Le noyau des 5 pays émergeants a ratissé large sur la planète, piquant à quelques exceptions près les 6 meilleures candidatures sur la quarantaine qui se bousculait au portillon. En Afrique, l’Ethiopie et l’Egypte, les deux pays les plus peuplés du continent respectivement avec 120.300.000 et 100.900.000 habitants, derrière le Nigéria qui a une population de 213.400.000 (les données de 2021), ont été choisis. C’est une évidence que la dispute du leadership avec le pays hôte du sommet du Brics qui s’est tenu du 22 au 24 août a eu raison d’Abuja.
En Amérique latine, le dévolu a été jeté sur l’Argentine (45.810.000 d’habitants), préférablement au Mexique (126.700.000 habitants). Les cinq n’ont-ils pas voulu pousser très vite leurs pions en intégrant le voisin direct des Etats-Unis en leur sein ? C’est là une interrogation qui peut traduire toute la fébrilité qui gagne la planète au moment où se reconstruit les blocs. Au Moyen Orient, trois pays ont été retenus, l’Iran (87.920.000 d’habitants), l’Arabie Saoudite (35.950.000 habitants) et les Emirats Arabes Unis (9.360.000 habitants). A l’observation, les Brics se sont emparés des clés du contrôle de l’or noir dans le monde.
On constate qu’en Asie, particulièrement au sud-est, aucun des pays du Tigre ou du Dragon n’a été choisi, la Chine et l’Inde pesant certainement de tout leur poids. Peut-être les deux ennemis que sont l’Arabie saoudite et l’Iran vont trouver là un créneau d’entente en siégeant côte à côte. Le prochain sommet qui se tiendra en Russie en fin d’année prochaine permettra de voir plus clair sur les éléments qui entrent en ligne de compte pour une intégration.
