Par Mon’Esse
La dette des entités publiques camerounaises envers l’opérateur d’électricité Eneo a presque doublé, passant de 167 milliards au 31 décembre 2022 à 266 milliards de francs au 31 décembre 2023, selon le directeur général, Amine Homman Ludiye.
Dans une interview accordée lundi au site investiraucameroun, il indique que la situation de l’entreprise «se rapproche davantage du scénario pessimiste que du cas de base, en raison de la dégradation poussée de notre situation financière».
Pour illustrer son propos, M. Homman Ludiye affirme que l’entreprise émet pour environ 7 milliards de francs de factures mensuelles à l’égard des entités publiques (administrations, entreprises publiques, hôpitaux, universités…), mais que ses recouvrements se sont limités à 1,5 milliard en janvier et à 1,8 milliard en février 2024.
Dans le même ordre d’idées, le versement hebdomadaire d’un milliard de francs, en guise de paiement partiel des factures de l’État central sur lequel les parties s’étaient accordées pour alléger la facture, n’a été effectué qu’une seule fois entre janvier et février, aucun règlement n’ayant par ailleurs été effectué pour les ordres de virement en instance, qui s’élèvent à 2,9 milliards de francs.
Pour l’année en cours, et dans le cadre de la compensation tarifaire, le régulateur a approuvé un paiement de 44 milliards de francs à Eneo, aucun paiement n’ayant été effectué rendu à mi-avril, un déficit chronique de trésorerie ayant influencé la décision de la maison mère, Actis, de partir du capital d’Eneo.
«Eneo fait face à des difficultés de trésorerie intenables pour toute entreprise», déclare le directeur général, précisant que les principaux clients, majoritairement des entités publiques, ne règlent pas de façon diligente leurs factures pour les services fournis.
«Qui plus est, les retards de paiements poussent l’entreprise à recourir régulièrement aux banques pour soutenir l’exploitation. Le loyer de l’argent creuse le déficit de trésorerie. Par conséquent, nous sommes incapables de régler nos fournisseurs comme il se doit.»
Une situation qui n’est plus supportable, soutien-t-il, et il est dès lors impératif de prendre des mesures visant à rétablir l’équilibre financier dans le secteur de l’électricité, afin qu’il puisse fonctionner correctement et se développer.
Le son de cloche est pourtant tout autre, du côté du quotidien spécialisé Ecomatin, qui sur la base des justificatifs probants, notamment les procès-verbaux et les décisions de l’Agence de régulation du secteur de l’électricité (Arsel), validant les créances d’Eneo sur l’Etat, note que sur les consommations annuelles d’électricité des administrations publiques, «Eneo a reçu de janvier à août 2023, un total de 13,5 milliards de Fcfa en paiement direct du Trésor public».
Et, poursuit la publication, selon les données de la dernière réconciliation effectuée le 20 décembre 2023 sur la base d’un procès-verbal dûment signé par les équipes d’Eneo et de l’Etat, un solde de 16, 357 035 434 milliards de Fcfa, apparaît en faveur de l’Etat.
D’après ce document de conciliation, les consommations annuelles d’électricité de l’Etat, stricto sensu, n’excèdent pas en moyenne 19 milliards de francs.
Le solde, insiste Ecomatin, a été arrêté sous réserve de la validation des consommations des administrations publiques pour la période allant de septembre à décembre 2023.
Ainsi, en déduisant ce que réclame Eneo à l’Etat, l’énergéticien, sur la base de données de conciliation, reste redevable de la somme non conciliée de 261,738 milliards de francs à l’Etat du Cameroun, un pays où le taux d’électrification est de 67%.