Par Joseph OLINGA N
La directive du ministre, Secrétaire général de la présidence de la République du Cameroun, Ferdinand Ngoh Ngoh, le 14 décembre 2023, au ministre de l’eau et de l’énergie, Gaston Eloundou Essomba, est sans ambiguïté. Il s’agit pour le chef de l’Etat camerounais, Paul Biya, de libéraliser le secteur des hydrocarbures au Cameroun. La lettre et son esprit indiquent que la mesure a pour objectif de permettre aux marketers de s’approvisionner directement auprès des fournisseurs de leurs choix. Dans le même temps, le choix concédé aux marketers se limite aux «importateurs majeurs du secteur.»
La même correspondance souligne que la Caisse de stabilisation des prix des hydrocarbures (Csph) est en charge de l’attribution des quotas aux «importateurs majeurs du secteur présentant des profils techniques et financiers leurs permettant de procéder directement aux importations.» Dans les faits, suite à l’appel d’offre lancé par le gouvernement, quelques temps avant, trois marketers (Mocoh, Totsa et Sahara Energy) sont chargé en exclusivité de l’approvisionnement du Cameroun en super, gasoil et pétrole lampant.
Bond en arrière
A l’évidence, le chef de l’Etat camerounais, Paul Biya, dans l’optique de résoudre un problème ponctuel effectue un bond en arrière. Pour dire peu, la libéralisation présentée par le gouvernement camerounais est, dans la réalité, des concessions d’exclusivité octroyées à trois traders. Le choix offert aux marketers restant de fait inopérant. Sans latitude, les distributeurs locaux ont pour seuls interlocuteurs les trois traders qui détiennent chacun l’exclusivité dans la distribution du super, du gasoil et du Jet.
Dans la configuration actuelle, les trois fournisseurs choisis par le gouvernement, qu’importent les garanties présentées ont la latitude de dominer la structure des prix à la pompe. En clair, l’on est de plein pied dans un contexte contrôlé par les traders suite au désengagement complet de l’Etat.
Factures impayées
A l’appréciation des faits, la posture du gouvernement camerounais consiste à se débarrasser de l’une de ses missions régaliennes tout en donnant satisfaction aux clauses contractuelles consenties auprès des bailleurs de fonds internationaux. En rappel, au moment où le chef de l’Etat camerounais annonce la libéralisation du secteur des hydrocarbures, les fournisseurs exigent le paiement d’une facture ponctuelle avoisinant 400 milliards de Francs Cfa pour approvisionner le marché camerounais. Dans le même temps, de nombreux autres traders exigent les paiements des ardoises qui leurs sont dues par le Cameroun. Des factures ayant fait l’objet de restructurations des dettes à hauteur de 5,5% sur une période de dix ans.
Nouveaux prix
Dans les schémas qui s’offrent, il n’est pas à douter que le désengagement du gouvernement camerounais induit la fin de la subvention souvent exhibée pour justifier les prix exorbitants des carburants au Cameroun. Pour les analystes les plus optimistes, le désengagement du gouvernement de l’approvisionnement en hydrocarbures induit l’imputation de 250 Francs Cfa au prix pratiqué actuellement sur le litre de carburant à la pompe au Cameroun.