Par Sandra Embollo
Dès vendredi, un électeur sur trois avait déjà voté, selon les chiffres de la Commission centrale électorale de Russie. Dans huit régions, le taux de participation a même dépassé les 50%, voire 60% comme à Kemerovo, dans le sud de la Sibérie. Cette région possède une solide réputation de pratique de fraudes électorales. Comme le note Novaya Gazeta, dans la majorité des régions qui affichent le plus d’empressement à voter, Vladimir Poutine avait remporté les scores les plus élevés aux présidentielles de 2012 et 2018. L’organisation indépendante de surveillance des élections Golos, estampillée « agent de l’étranger », note l’absence d’observateurs de l’opposition dans les bureaux de vote et affirme qu’en de nombreux endroits, des fonctionnaires et des employés de grandes entreprises, en partie détenues par l’État, ont subi des pressions pour voter.
C’est ce que confirme le média en ligne russophone Agentstvo, lui aussi classé « agent de l’étranger », et qui a trouvé sur les réseaux sociaux plus de 450 photos ou vidéos publiées par des employés d’écoles, d’institutions culturelles ou d’entreprises telles que Gazprom, à la sortie des bureaux de vote. Certaines photos sont des selfies, d’autres, des photos de groupe. Le média note que lors des dernières législatives de 2021, seuls 31 comptes rendus de ce type avaient été publiés.
Pas de file d’attente devant un bureau de vote de Moscou
À l’intérieur d’un bureau de vote, en plein centre de Moscou, près de l’une des places centrales de la ville, il n’y avait pas foule ce samedi en milieu d’après-midi. On a vu des électeurs venir au compte-goutte. Mais il n’y avait pas de file d’attente à l’extérieur, pas de masse de gens présents pour l’instant. Dans un autre bureau de vote de la capitale russe, il y avait simplement les policiers présents devant l’entrée, mais pas de votants.
C’est assez curieux, si l’on met cela en rapport avec les chiffres de participation annoncés par l’État russe. On sait que le plébiscite est important pour le Kremlin et pour Vladimir Poutine. On sait aussi que les salariés de l’État russe, des fonctionnaires des services publics, ont été largement incités, voire même forcés parfois, à bien aller voter comme il le faut pour Vladimir Poutine dès vendredi. Et c’est ce qui explique peut-être ce chiffre élevé.
Dans l’ensemble, on ne sent pas d’engouement autour de ce scrutin. Il faudra voir dimanche. L’opposition a également appelé, ce jour à midi, à venir voter en masse contre le président, pour n’importe quel candidat contre lui. On verra si cet appel est suivi. Mais dans l’ensemble, on sent que ce scrutin sans enjeu ne passionne vraiment pas les foules en Russie.