Par Sandra Embollo
La courbe des prix des carburants automobiles est un baromètre de l’humeur sociale, en Afrique comme ailleurs : on se souvient du mouvement des gilets jaunes en France qui avait surgi après la hausse des tarifs de l’essence. Quel que soit l’État concerné, il tente généralement de se défausser sur les fluctuations du marché mondial des hydrocarbures. En revanche, en matière de subventions, il est obligé d’affirmer ses choix. C’est la raison pour laquelle l’actuel président nigérian a annoncé la fin de ces aides dès le début de son mandat, au plus loin d’une prochaine confrontation électorale…
Entre pénurie et augmentation des prix
Devançant l’iguane dans l’eau, comme le dit le proverbe burkinabè, le président camerounais a dû admettre, lors de son discours du saint sylvestre habituellement réservé à l’optimisme béat, une possible hausse nationale des tarifs à la pompe. Il s’agit bien là d’une question de subvention étatique, dans un contexte avoué de difficultés budgétaires. Pour Paul Biya, le soutien financier de l’État au secteur des hydrocarbures continue de « peser significativement sur le trésor public ».Si certaines tensions budgétaires peuvent être dissimulées, les récentes difficultés d’approvisionnement de Douala à Yaoundé, interrogent sur la gestion de ce dossier stratégique. Alors que des stations-service étaient à sec à la mi-décembre, les autorités affirmaient qu’il s’agissait moins d’un problème de financement que de retards des navires transportant le produit…
L’augmentation du prix de l’essence pourrait atteindre 20 %.
Si l’annonce de cette hausse a autant contribué à la gueule de bois camerounaise que la consommation festive d’odontol ou de mousseux, c’est que la subvention en question a déjà été ratiboisée en 2023. Le chef de l’État l’a d’ailleurs rappelé : « L’année dernière (…) la subvention des produits pétroliers qui était de plus de 1 000 milliards de francs CFA en 2022, a été réduite à environ 640 milliards de francs CFA en 2023 ».
Jamais deux sans trois ?
La nouvelle pilule est aussi amère que la précédente, même si Paul Biya tente de convaincre de la pertinence de la posologie en promettant des mesures d’accompagnement pour que « les ajustements nécessaires n’impactent pas substantiellement le pouvoir d’achat des ménages ». Pour noyer davantage le poisson, il suggère d’intensifier également la lutte contre la corruption. Si le président camerounais a pris le risque de l’impopularité en réduisant ces subventions deux années consécutives, c’est qu’il aura plus de mal à rééditer la mesure l’année prochaine. En 2025 devrait se tenir une élection présidentielle à laquelle il serait candidat.
Avec Jeune Afrique