Avec Vincent-Sosthène FOUDA
Un communiqué particulièrement long du ministre de l’eau et de l’énergie Gaston Eloundou Essomba qui avait pour but de rassurer les populations a plutôt eu l’effet contraire. Le ministre explique en effet que « Actuellement, un navire est déjà à quai à Douala avec 13 000 m3 de super. Des dispositions ont par ailleurs été prises avec la Société camerounaise des dépôts pétroliers (Scdp) pour un chargement immédiat de 81 camions-citernes toute la nuit du 10 au 11 décembre 2023 pour renforcer les transferts. » Le retour à la normale annoncé pour le mardi 12 décembre 2023 n’a pas eu lieu. Des centaines de mètres de fil d’attente devant les stations de distribution de carburant dans toutes les villes du pays.
Depuis l’incendie qui a endommagé l’unique raffinerie de la Sonara le 31 mai 2019 ce n’est pas seulement la livraison du carburant qui est un problème au Cameroun mais aussi les banques et les liquidités du pays. Le 1er juin 2019 soit un jour après cette incendie, le directeur général de la structure s’était cru obligé de prendre la parole pour rassurer les banques. Jean-Paul Simo Njonou annonçais par la même occasion que la Sonara connaitra un moment de flottement pendant deux années notamment avec l’arrêt de sa principale activité de raffinage qui lui permettait de rembourser ses emprunts.
En juin 2019, cette annonce avait déjà provoqué des secousses dans le monde bancaire local.
Les citernes sont vides autant que le sont les caisses des banques et du pays.
Au cours de la dernière décennie, les banques camerounaises ont ouvert leurs coffres pour prêter à la Sonara soit plus de 975 milliards de Fr Cfa dans le cadre de son plan d’expansion et de modernisation. L’encours de cette dette exponentielle est supérieur à date à 500 milliards de F Cfa selon différents analystes financiers. Aujourd’hui force est de reconnaitre que la Sonara malgré les assurance de son directeur général peine à rembourser cette énorme dette.
Si le Cameroun, pour moderniser les infrastructures de la Sonara s’est en premier tourné avec raison vers les établissements financiers locaux, force est de reconnaitre aujourd’hui qu’elles sont les plus affectés face à l’insolvabilité de cet organisme étatique. La Standard Chartered Bank, Afriland First Group, Ecobank, BGFI, La Société Général, United Bank for Africa sont les premières victimes.
Le Cameroun aujourd’hui importe la totalité du carburant qu’il utilise
Le taux de stations en situation de pénurie est important. Il n’a jamais été aussi pire par le passé. Les Camerounais consomment sans retenu le carburant et aucun discours des instances dirigeantes du pays ne vient les sensibiliser sur l’éventualité d’une panne sèche. Pourtant elle pointe son nez et ceci à grande vitesse. Un membre du gouvernement dans ce pays où la rumeur est la première chaine d’information affirme même que les « mesures prises par son collègue de l’eau et de l’énergie (Stockage stratégique, réorientation des flux logistiques, hausse des imports) sont loin de la réalité des besoins du pays aujourd’hui car depuis 2 ans on a vécu comme si l’unique raffinerie du pays n’avait pas brûlé.
Pour éviter donc un blocage total du pays, l’état est-il en mesure d’activer d’autres leviers ? Le 14 décembre, le ministre d’Etat non moins secrétaire général de la présidence de la République a instruit au nom du Président de la République au ministre de l’eau et de l’énergie, la libéralisation de l’importation des produits pétrolier. Par cette note, le ministre d’Etat ramène dans le jeu la CSPH. Ce n’est pas une expérience nouvelle ; en effet, la caisse de stabilisation des prix des hydrocarbures étaient déjà importateur des produits pétroliers jusqu’à l’incendie des installations de la Sonara à Limbé. Que stabilise vraiment cette société à la gestion opaque ? Difficile de voir à l’intérieur de son immense clôture.
Autre mesure ; l’Etat pourrait-il payer ce qu’il doit à certaine banques locale afin de permettre la fluidité de la circulation de la monnaie ? l’Etat pourrait-il aussi mettre en œuvre de véritables moyens de croissance capables de faire revenir la confiance entre les bailleurs de fonds et lui ? Si aujourd’hui, des grosses firmes comme Total n’accepte plus de donner du pétrole (non générique pour nommer le carburant) c’est aussi à cause de la non crédibilité du gouvernement. Toutes ces propositions en forme interrogatives sont la preuve que l’Etat est seul détenteur de sa bourse et de son agenda. Alors oui si le Cameroun veut éviter une grogne de sa population, éviter ces longues files d’hommes et de femmes bidons sur la tête en quête de carburant, il faut qu’il soigne sa crédibilité ; il ne peut la soigner qu’au prix fort en déliant sa bourse et en évitant des discours creux.
