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Cameroun > Sur le chemin de l’Unité nationale: Fixation sur ces facteurs de pérégrinations

Depuis l’avènement de l’Etat unitaire le 20 mai 1972, jamais le Cameroun dans son ensemble n’a été aussi éloigné de l’esprit qui a animé les pères fondateurs de la République.

Par panorama papers
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Par Léopold DASSI NDJIDJOU

Le premier facteur est de toute évidence la crise anglophone. Depuis 2017, des Camerounais bien constitués ont décidé de prendre les armes en vue de se séparer de la Patrie commune. Et précisément, la faille magmatique est béante là où en 1971 à Foumban, les Républiques fédérées du Cameroun oriental et occidental décidaient de devenir « une » comme il en avait été avant la fin de la Première guerre mondiale. Si cette reculade inédite sur le chemin de la construction de l’Unité nationale, a poussé le pouvoir à prendre des décisions pour mieux intégrer les citoyens des deux régions en crise au sein de la République, au constat sur le terrain, elles semblent ne pas porter pour l’instant les fruits escomptés. Si le Premier ministre est un natif de ces deux régions (c’était le cas avant la crise), si à la sortie du Grand dialogue national il a été décidé d’octroyer un statut spécial à ces deux régions, si le Comité national de désarmement, de démobilisation et de réintégration (Cnddr) a été créé le 30 novembre 2018 pour encourager les combattants à déposer impunément les armes, si la Commission nationale pour la promotion du bilinguisme et du multiculturalisme (Cnpbm) a vu le jour en 2017, on constate bon an mal an, que l’endiguement des velléités guerrières fait son chemin.

Par ailleurs, il y a lieu d’ajouter à ce sujet que le pouvoir a décrété ces deux régions « zone économiquement sinistrée », suivie d’un Plan présidentiel pour sa reconstruction. Cela tombe à pic car à date, on estime à près du million de déplacés vers les autres régions du pays et près de 3500 morts. Les deux régions aujourd’hui exsangues, qui représentent 20% du pays dans sa globalité, étalent à suffire combien le Cameroun est sur le chemin de la pérégrination, vers une unité nationale qui menaçait réellement de lui filer entre les doigts au pic de cette crise entre 2017 et 2021.

Au moment où cette grande blessure est en train d’être cautérisée, on constate maintenant un autre facteur aussi gravissime que la crise anglophone : le tribalisme. Dans les réseaux sociaux, sur les plateaux de télévision, ou dans les commentaires fortuits dans la rue, on comprend vite que l’heure est au repli identitaire et l’accusation, l’indexation de l’autre comme menace à l’épanouissement de la communauté. Les différences réelles ou créées sont aux décibels. C’est à se demander quel malin esprit insuffle chaque jour dans la conscience des Camerounais qu’ils ne sont pas une Nation. Le terme étranger au Cameroun ne fait pas de prime abord référence à l’appartenance à une autre nationalité mais surtout à une communauté ethnique différente.

Pourtant, depuis 1972, les Camerounais ont toujours vécu en totale et pleine harmonie. Quelle est donc la racine du mal ? Pourquoi les communautés de la même Nation se haïssent-elles tant ? Est-ce le fait du politique qui a tendance à diviser pour régner ? Ou bien faut-il y voir une bataille souterraine pour la conquête du pouvoir à l’heure où Paul Biya himself, pour une fois, annonçait qu’il verrait en 2025 s’il se retirerait au village ? Là, le poste attire ou intéresse un grand monde et toutes les stratégies à cette fin commencent à agiter le biotope camerounais. C’est à se demander qui est plus Camerounais que l’autre ? Tout comme on entend parler des patriotes et des antipatriotes au sein d’un même pays. Mais de manière plus serrée, beaucoup d’observateurs s’accordent à reconnaître que l’insertion dans le corpus de la Constitution du pays des différences au sein de la population, « les autochtones » et « les allogènes », est déjà en soi une source profonde de conflit, de différenciation, de distinction ou de distanciation entre le peuple camerounais.

La haine, le nouvel oxygène vital des Camerounais ?

Le langage haineux est partout, violent, gratuit, ouvert ou sournois. Quand les communautés sont regroupées en autochtones à travers le pays, la phase suivante est de mettre sur pied des stratégies pour chasser les allogènes, les envahisseurs. Si ce n’est les allogènes pour se défendre de cette menace. Si des Camerounais se constituant ou s’identifiant en autochtones, estiment, pensent ou déclarent que chaque Camerounais doit rentrer dans son village, doit rentrer sur ses terres, cela signifie que la blessure est grandement ouverte, saignante. C’est dire que si les deux régions ont parlé de « Ambazonie » dans leur entreprise sécessionniste, d’autres communautés s’ils ne prennent pas les armes contre l’Etat, se comportent exactement comme si elles ne coulaient plus voir les ressortissants de telle ou telle communauté sur leur sol.

Plusieurs fois, on a vu des allogènes chassés, les boutiques pillées par les autochtones, tout ceci en toute impunité. C’est bien cela le chemin de la construction nationale ? Dans le Moungo, à la lisière de Kekem, il y a quelques jours, on a vu les autochtones brûler le tissu Ndop pour manifester leur haine contre les Bamiléké qu’ils qualifient d’envahisseurs. Si rien n’a été fait à fait à ceux qui se sont laissés à cette forfaiture, pourquoi d’autres communautés ne se s’engouffreraient-elles pas dans ce trou d’air ? Chaque Camerounais n’a-t-il plus le droit de s’implanter sur le territoire national là où bon lui semble en respectant les lois de la République ? A cette allure, on devra commencer à s’interroger sur la protection ou la sécurisation des biens et des personnes qui relèvent exclusivement au Cameroun de l’Etat.

A l’heure où le pays s’apprête à célébrer le 51ème anniversaire de l’avènement de l’Etat unitaire, de l’unité de la Nation camerounaise, n’est-il pas opportun de mener une réflexion approfondie sur ces facteurs conflictogènes au vivre ensemble, à l’unité nationale ? Quelles sont les initiatives prises par le Cameroun, au moment où le pays négocie tant bien que mal son émergence en 2035, pour que la Nation soit unie autour des mêmes valeurs de développement ? Quelle idéologie fédère les Camerounais et fait de cette émergence réellement une cause nationale ? Ces questionnements, pour aussi naïves qu’elles soient, nous mettent en face de nos responsabilités dans la prochaine décade. Et là, le Cameroun sera un pays divers et émergeant ou le sera pas.

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