Par Léopold DASSI NDJIDJOU
Comment comprendre le silence de la Communauté face à la chute d’Ali Bongo Ondimba ? Alors qu’en Afrique de l’Ouest, sa consœur institutionnelle est au-devant de la scène pour lutter contre les coups d’Etat qui se propagent comme un feu de brousse, la Cemac semble prise par le sommeil sans fin au moment où le syndrome frappe à sa porte.
Sont-ce les convulsions qui menacent d’imploser la Communauté économique des Etats de l’Afrique de l’ouest (Cedeao) face au coup d’Etat au Niger qui font peur et endorment la Cemac ? Ou bien, phénomène rare ici, en dehors de la Rca et du Tchad, les coups d’Etat en région de forêt surprennent-ils tout le monde au point où la première voix qui a pu se lever pour condamner cette situation de fait au Gabon est vu loin de New-York ? Le Secrétaire général de l’Onu, Antonio Guterres « condamne la tentative de coup d’Etat et appelle les parties au dialogue ». Les Etats-Unis annoncent suivre de près l’évolution des choses à Libreville, le Maroc, la France condamnent aussi le recours à la force pour accéder au pouvoir alors que Yaoundé, Ndjamena, Brazzaville, Malabo, Bangui sombrent dans un silence assourdissant. Qu’importe ce qu’on voudra dire face à ce coup qui éclate en pleine forêt équatoriale, très loin du Sahel où il y a une épidémie des coups d’Etat, tout montre qu’il avait été savamment orchestré. Pour preuve, c’est l’annonce des résultats des élections qui a engendré ce coup de force. Le Comité pour la transition et de la restauration des institutions (Ctri) sorti du chapeau des militaires, montre à suffire que les pièces du puzzle étaient bien en place depuis un temps. Les pairs de la Cemac étaient-ils informés ? Il est difficile de le dire car cette Communauté, en réalité fonctionne comme une coquille vide, des Etats unis sur le papier mais à jamais divisés dans la pratique communautaire.
A la mort du président du Tchad au front de la guerre en 2021, en dehors du président centrafricain, aucun autre chef d’Etat de la Cemac n’était présent. Curieux dans une zone où les chefs d’Etat s’affublent journellement du pompeux « frère ». Comment et pourquoi se tait-on face au malheur d’un frère ? Ou bien, les chefs d’Etat se taisent-ils pour conjurer à leur manière le mauvais sort qui est entré dans une contrée naguère calme et paisible ? N’est-ce pas là une sorte de politique de l’Autriche ? En Afrique, c’est connu, quand la case du voisin brûle, à défaut de l’aider, on mouille le chaume de sa propre maison. Peut-être est-ce là le nouveau chantier dans lequel s’inscrivent les dirigeants pour que la forêt équatoriale ne se transforme pas en un autre sahel où les coups d’Etat se propagent avec le vent ? C’est l’avenir qui débrouillera tous les écheveaux.
