Par Arlette Akoumou Nga
Donald Trump a toujours associé ses enfants à ses affaires et à sa carrière politique : trois d’entre eux et le milliardaire républicain lui-même sont entendus à partir de mercredi 1er novembre à la barre des témoins à New York, au procès civil pour fraudes financières qui menace son empire immobilier.
C’est l’audition du fils aîné de l’ancien président américain qui a inauguré le défilé du clan familial. Il se poursuivra avec Eric Trump, puis Donald Trump lui-même et Ivanka Trump, qui a cependant introduit un recours pour ne pas témoigner.
Costume bleu foncé, chemise claire et cravate rose, Donald Trump Jr, 45 ans, a confirmé, au tout début de son témoignage mercredi, son rôle au sommet de la Trump Organization qui regroupe une myriade de sociétés gérant des gratte-ciel de logements et de bureaux, des hôtels de luxe ou des golfs dans le monde entier.
Qui tenait les rênes du groupe à partir de l’entrée à la Maison Blanche de Donald Trump, en janvier 2017 ? C’est ce que lui a demandé en substance pour poser les rôles de chacun, la représentante du parquet général. “Une combinaison de moi-même, mon frère (Eric) et Allen Weisselberg”, l’ex-directeur financier condamné en 2022 à de la prison ferme pour fraude fiscale, a répondu Donald Trump Jr.
Donald Trump Jr. et Eric Trump, tous deux vice-présidents exécutifs de la Trump Organization, sont accusés comme leur père par la procureure générale de l’État de New York Letitia James d’avoir gonflé à hauteur de milliards de dollars les actifs du groupe dans les années 2010 pour décrocher de meilleurs prêts des banques et des conditions d’assurances plus favorables.
“Laissez mes enfants tranquilles, Engoron. Vous êtes une honte pour la profession judiciaire”.
a posté dans la nuit Donald Trump père, sur son réseau social Truth Social, à l’adresse du juge Arthur Engoron qui préside les débats.
Depuis le début du procès, le 2 octobre, le magistrat a déjà adressé deux amendes de 5 000 et 10 000 dollars à Donald Trump, réglées depuis rubis sur l’ongle, pour s’en être pris à sa greffière. Si l’agenda n’est pas bousculé, l’ancien président de 77 ans sera interrogé lundi, un an moins un jour avant l’élection présidentielle du 5 novembre 2024 qu’il espère disputer pour revenir à la tête des États-Unis.
Fraudes répétées
Donald Trump Jr. et Eric Trump sont aussi de fervents alliés politiques de leur père, une fidélité à toute épreuve qu’ils affichent au quotidien dans les médias et sur les réseaux sociaux. Ils ne devraient pas dévier de la ligne adoptée par la défense depuis le début du procès.
Les avocats soutiennent que les évaluations des actifs du groupe, comme la Trump Tower ou l’immeuble du 40 Wall Street étaient subjectives mais sincères, et que les banques n’ont pas perdu un dollar en prêtant de l’argent à la Trump Organization.
Mais d’après le patron de la banque d’investissement M.M. Dillon & Co., Michiel McCarty, appelé à la barre mercredi comme expert, les banques prêteuses, comme la Deutsche Bank, auraient pu décider de fixer des taux d’intérêts plus élevés si elles avaient eu à disposition une photographie moins reluisante de la situation financière de Donald Trump.
Il a passé en revue quatre prêts pour financer des projets autour d’un golf en Floride, deux luxueux hôtels à Washington et Chicago, ainsi que le 40 Wall Street, et a évalué les pertes en intérêts à 168 millions de dollars entre 2014 et 2023. Un calcul contesté par la défense.
Régulièrement présent aux audiences, Donald Trump, favori des sondages pour les primaires républicaines a transformé chacun de ses passages dans les couloirs du tribunal en mini-conférence de presse et se pose en victime d’une machination judiciaire, comme dans les quatre autres affaires où il est inculpé au pénal, notamment pour avoir tenté de renverser l’élection présidentielle de 2020. Sa présence aux audiences signe aussi l’importance que Donald Trump accorde à l’affaire. S’il ne risque pas de peine de prison, le procès pourrait lui faire perdre le contrôle d’une partie de son patrimoine immobilier, en plus d’une amende de 250 millions de dollars et l’interdiction de gérer des sociétés à New York.
Avant même l’ouverture du procès le 2 octobre, le juge Engoron a estimé que le parquet général présentait “des preuves concluantes qu’entre 2014 et 2021, les prévenus ont surévalué les actifs” de “812 millions (à) 2,2 milliards de dollars” selon les années. En conséquence de “fraudes répétées”, il a ordonné la liquidation des sociétés, une véritable bombe judiciaire, mais sa décision a été suspendue en appel.
Le procès porte sur d’autres violations des lois financières et sur le montant de l’amende.