Par Arlette Akoumou Nga
Après une semaine de procès, les réquisitions sont tombées. Le parquet a requis ce mercredi après-midi une peine d’un an de prison avec sursis à l’encontre d’Éric Dupond-Moretti, jugé par la Cour de justice de la République (Cjr).
Le ministre de la Justice est soupçonné de “prise illégale d’intérêt” dans deux affaires distinctes dans lesquelles il aurait profité de son statut de locataire de la place Vendôme pour régler ses comptes avec des magistrats côtoyés lorsqu’il était avocat.
Des audiences aux allures inédites
Depuis ce tribunal, qui est réservé aux ministres ou ex ministres jugés pour des faits commis dans le cadre de leur fonction, Éric Dupond-Moretti n’a eu de cesse de ferrailler.
Il faut dire qu’au-delà de la personnalité du prévenu, qui s’est qualifié lui-même de “bouillonnant”, le contexte est inédit. C’est la première fois de toute l’histoire de la 5ème République qu’un ministre est jugé par la Cjr en étant toujours en poste. Devant des magistrats, qui dépendent hiérarchiquement du garde des Sceaux, et de 12 parlementaires, le ministre a dénoncé “l’infamie de son procès” tout en se défendant “fermement”.
“On a piétiné ma présomption d’innocence”, a ainsi expliqué à plusieurs reprises le sexagénaire, qui a nié tout le long du procès les faits qui lui sont reprochés.
“Un excellent garde des Sceaux” pour Castex
Premier dossier dans lequel Éric Dupond-Moretti a été contraint de s’expliquer: une enquête administrative ordonnée par le ministre en septembre 2020, soit deux mois après sa nomination au gouvernement, contre trois magistrats du Parquet national financier qui avaient fait éplucher ses factures téléphoniques détaillées (“fadettes”) quand il était encore une star du barreau.
Autre affaire qui lui est reprochée: avoir diligenté des poursuites administratives contre un ancien juge d’instruction détaché à Monaco, Édouard Levrault, qui avait mis en examen un de ses ex-clients.
Pendant l’audience, Éric Dupond-Moretti n’a ainsi eu de cesse de démontrer que l’ouverture de ces deux enquêtes était nécessaire. Sa version a notamment été appuyée par le témoignage de Jean Castex, Premier ministre à l’époque de sa nomination au gouvernement, qui l’a qualifié “d’excellent garde des Sceaux”.
Une démission en cas de condamnation
Ce jeudi, ce sera au tour de la défense de présenter sa plaidorie avant que les magistrats et les parlementaires chargés de juger l’ancienne star des prétoires ne tranchent prochainement. Si les réquisitions étaient suivies par les juges, Éric Dupond-Moretti serait contraint de démissionner. Si Élisabeth Borne avait évoqué “sa confiance” dans son travail, elle avait également rappelé que “la règle” était “claire” et qu’il devrait partir le cas échéant.