Avec Clarisse Juompan-Yakam (Jeune Afrique)
Le 10 octobre 2021, le successeur du sultan Ibrahim Mbombo Njoya faisait sensation avec un discours d’intronisation salué par la population. Mouhammad-Nabil Mforifoum Mbombo Njoya y annonçait l’entrée du royaume dans « l’ère de la jeunesse » et appelait au rassemblement de tous les Bamouns, faisant grimper sa cote de popularité… Près de vingt mois plus tard, ce capital sympathie ne faiblit pas. La foule des premiers jours de règne l’accompagne toujours à chacun de ses déplacements.
Pour la plupart de ses sujets, l’ancien administrateur civil de 30 ans a pris ses marques et a gagné en charisme. Il a lancé, entre autres, de nouveaux projets destinés à améliorer l’attractivité de la ville de Foumban d’ici à 2050. Une surprise pour ceux qui considéraient la jeunesse du monarque, de 28 ans alors, comme un handicap. D’autant que dans la dynastie bamoun, secret de succession oblige, le futur roi est très peu préparé et donc peu impliqué dans la gestion des affaires.
Nabil Mbombo Njoya est quasi sous surveillance, chacun de ses gestes étant scruté. Pour éviter les faux pas, il s’appuie sur plusieurs notables, qui furent des fidèles de son père et sur lesquels il sait pouvoir compter. Il accorde également aux membres de sa famille maternelle une place prééminente. C’est le cas de son grand-père, qu’il a fait « Mamba Mfon » (grand-oncle), un titre très prestigieux, suscitant d’ailleurs quelques remous au sein de la communauté. Mamba Mfon El Hadj Moustapha est ainsi celui qui rapporte au roi ce que le peuple murmure, afin que la famille de la reine mère ne soit jamais couverte d’opprobre en raison de la mauvaise gouvernance du fils.
Le sultan-roi vient de boucler une tournée de trois mois au cœur du pays bamoun et ira, à la fin du mois de mai, à la rencontre des diasporas à travers le monde. Des déplacements très attendus, car des changements pourraient être annoncés à leur issue. Peut-être une équipe resserrée ou élargie qui donnerait à découvrir les vrais ou les nouveaux hommes du roi ? Il n’a pas nommé de nouveau Premier ministre – personnage pourtant central du royaume – après le décès de l’ancien, il y a un an. Et il n’a pas non plus désigné de ministre de la Défense, ni intronisé de nouveaux notables.
Son positionnement vis-à-vis du régime de Yaoundé interroge également : si, le 24 mars 2022, il a solennellement exprimé son adhésion au Rassemblement démocratique du peuple camerounais (RDPC, le parti présidentiel, dont son père était l’un des caciques) en présence de son secrétaire général, Jean Kuete, en visite à Foumban, Nabil Mbombo Njoya ne fait pas de zèle. Et nul ne sait encore s’il battra campagne lors des prochains scrutins législatifs, municipaux et présidentiel.
Nji Adamou Pekassa Mbombo Njoya, Premier adjoint du Sultan
Frère cadet et très influent premier adjoint (« Gbètnyi Fon » en langue bamoun) du sultan des Bamouns, Nji Adamou Pekassa Mbombo Njoya a la haute main sur les affaires administratives et institutionnelles, et sur les relations internationales du Palais, dont il occupe l’une des pièces les plus courues.
Il coordonne ainsi l’organisation de la tournée royale de prise de contact dans la communauté bamoun, entamée en novembre 2022. Comme Nabil Mbombo Njoya, Nji Adamou Pekassa Mbombo Njoya est administrateur civil, diplômé de l’École nationale d’administration et de magistrature du Cameroun (Enam). L’homme ménage son emploi du temps entre ses obligations de premier adjoint préfectoral de Mbouda, dans le département du Bamboutos voisin, et ses charges traditionnelles dans le royaume.
Seidou Njimoluh Mbombo Njoya Babaguida, Deuxième adjoint
Le public s’est très vite habitué à voir la silhouette imposante de Seidou Njimoluh Mbombo Njoya Babaguida, régulièrement porteur de messages au roi lors de cérémonies. Avec son frère Nji Adamou Pekassa Mbombo Njoya, le deuxième adjoint du sultan incarne le vent de jeunesse qui souffle actuellement sur le Palais.
Cadre au Fonds national de l’emploi (FNE), il a choisi de servir parallèlement l’État dans le voisinage du royaume, à l’Agence régionale de l’Ouest, située à Bafoussam. Responsable des questions religieuses, il veille également à la cohésion sociale au sein du Palais, c’est-à-dire au bon fonctionnement des affaires princières relevant de la famille royale.
Rabiatou Mamboune Mbombo Njoya, Princesse accompagnatrice
Cohéritière et conseillère du roi, Rabiatou Mamboune Mbombo Njoya (« Momafon ») incarne la relation fusionnelle qui existait entre le défunt roi Ibrahim Mbombo Njoya et sa sœur, la princesse et écrivaine Rabiatou Njoya, qui a occupé la même fonction de 1992 à sa mort (suivant les recommandations de Seidou Njimoluh, décédé en 1992 et père de Mbombo Njoya).
Agent de l’État des Régies financières, Rabiatou Mamboune Mbombo Njoya a été sacrée, à 24 ans, au même moment que le roi Nabil Mbombo Njoya, dans la nuit du 9 octobre 2021, conformément aux us et coutumes bamouns. Elle est de tous les déplacements du sultan et apparaît à ses côtés lors des cérémonies traditionnelles.
Chétou Njoupouo, La reine-mère
Très discrète sous le règne d’Ibrahim Mbombo Njoya, son défunt époux qui a accédé au trône à 57 ans, cette ancienne infirmière du district de santé de Foumban est sortie de son quasi-anonymat après l’intronisation de son fils, à tout juste 28 ans. Reine mère (« Nâ Fon ») du peuple Bamoun, Chétou Njoupouo est très présente auprès du sultan, qui n’a toujours pas de Premier ministre, et pèse dans les décisions royales, exerçant ainsi une influence que d’aucuns, sans doute peu charitablement, assimilent à celle de la célèbre reine Njapndounke, mère du roi Njoya.
Elle facilite les contacts avec le sultan, auprès de qui elle peut plaider. Njoupouo Chétou est au cœur d’un cercle de personnalités traditionnelles du giron maternel du roi, parmi lesquelles figure également El Hadj Rengou Mama Moustapha, qui assume les fonctions de grand-oncle maternel du roi (« Mâmba Fon »).
Seidou Mbombo Njoya, Le frère aîné
Par simple ignorance ou par pure malice, certains en avaient fait l’un rivaux du roi Nabil Mbombo Njoya dans une supposée course au trône. Né en 1961, avant l’accession de son père au pouvoir, le fils ainé d’Ibrahim Mbombo Njoya ne pouvait y prétendre, conformément aux règles de succession en vigueur à la cour royale bamoun.
Chargé de mission au comité central du Rdpc et récemment nommé sénateur – comme le fut son défunt père –, le plus connu des princes bamoun est l’un des mentors du sultan. Il supervise la formation politique de ce dernier et la mise en place de ses réseaux tant à l’intérieur du pays qu’à l’international.
Seidou Mbombo Njoya a déjà œuvré à la venue au palais de Foumban de nombreuses personnalités influentes, à l’instar de Franck Biya, fils du président Paul Biya, dont il est très proche. Cet ancien président de la Fédération camerounaise de football (Fecafoot) – siège que lui a ravi Samuel Eto’o – a également conduit sur les mêmes lieux Patrice Motsepe, le président de la Confédération africaine de football (CAF), dont il est l’un des vice-présidents.
Alassa Fouapon Njimonshare, Chef de file des notables intronisateurs
Sur le perron du palais royal de Foumban, le soir du 21 septembre 2021, il avait conduit avec gravité la cérémonie de l’annonce solennelle du décès d’Ibrahim Mbombo Njoya, avant de présider les rituels funéraires et le conseil de succession royale, dans le strict respect des préceptes coutumiers.
Étudiant à l’École nationale d’administration et de magistrature de Yaoundé, Alassa Fouapon Njimonshare est déjà le chef de file du collège des intronisateurs (« Mâ Nkom ») des rois. Dans l’ombre de Nabil Mbombo Njoya, il conduit la veille coutumière du collège des grands notables (« Koms »), témoignant ainsi de la parfaite appropriation des traditions par la jeune génération.
Abdou Yap, Notable du collège du premier ministère royal
Notable du Premier ministère de la cour royale (« Titâ-Fon ») sous le règne précédant, Abdou Yap a gardé les mêmes fonctions au côté du sultan. Président de la Chambre des comptes de la Cour suprême du Cameroun, ce haut magistrat est l’un des notables les plus influents de la cour royale bamoun.
Une position sans doute légitimée à la fois par son statut d’ancien chargé de mission à la présidence de la République et par sa proximité avec Nabil Mbombo Njoya.
Daniel Njankouo Lamare, Notable du collège du premier ministère royal
Ancien ministre, ce notable du Premier ministère de la cour est aussi le président du Conseil d’administration de la Société camerounaise de banque (SCB-Cameroun). Très proche du défunt roi, il continue de prodiguer des conseils, notamment politiques, au nouveau monarque.
Fidèle autant au sultanat qu’au régime de Yaoundé, Daniel Njankouo Lamare a été, avec Abdou Yap, le dépositaire du secret testamentaire d’Ibrahim Mbombo Njoya. Les arcanes du parti présidentiel n’ont aucun secret pour lui : il est à la tête de la délégation permanente du Comité central du RDPC dans le département du Noun.
Oumarou Nchare, Directeur des affaires culturelles, administratives et politiques
Il est le gardien du temple. Fin connaisseur de la culture et des traditions bamouns, Oumarou Nchare coordonne à l’école Shu-Mom, les activités consacrées à la langue, à l’écriture et aux innovations mises au point par le roi Njoya (1889-1933, 17e de la dynastie).
Mémoire vive et secrète de l’institution et collaborateur immédiat de l’actuel jeune monarque, il sert aujourd’hui son troisième roi, après Seidou Njimoluh Njoya et Ibrahim Mbombo Njoya. Conservateur formé par le Conseil international des musées (Icom), il est, de fait, le chef de cabinet de Nabil Mbombo Njoya, dont il a suivi tout le parcours, de prince à roi.
Entouré de jeunes assistants, dont les journalistes Azize Mbohou et Alexis Mouliom Njivah, Oumarou Nchare coordonne les activités d’un groupe de travail œuvrant pour la mise en place d’un document stratégique de « Vision du royaume Bamoun à l’horizon 2025 », porté par le roi, avec le soutien du bureau des Nations unies au Cameroun. L’équipe technique de ce projet est localement animée par des cadres comme Emmanuel Njifenji et Soulemanou Njoya Nsangou.
