Par Arlette Akoumou Nga
Au Cameroun, 400 milliards de francs CFA ont déjà été dépensés pour 60 kilomètres construits en une décennie, entre Yaoundé et Bilobi près de Boumnyebel. Les travaux avaient démarré en 2014. « C’est du gaspillage de fonds publics, on ne peut appeler ça autrement », selon l’expert Augustin Kouam, ingénieur en génie civil, ancien enseignant des universités et chercheur sur les sujets de développement et d’infrastructures. « Les projets au Cameroun souffrent d’un problème d’études au départ. C’est au cours de l’exécution qu’on se rend compte que les choix initiaux ne sont pas adaptés. Grosso modo, il y a un problème de surenchère ». Il y a une surenchère des prix des entreprises mises en concurrence. Augustin Kouam a comparé entre Côte d’Ivoire, Sénégal, Kenya et Ghana. Le Cameroun est un des pays où le kilomètre d’autoroute coûte le plus cher. « Abidjan-Yamoussoukro, ça a été fait en deux ou trois ans. Au Cameroun, c’est 60 km qu’on a fait en douze ans ! Donc, même sur le plan technique, y a de sérieux problèmes à relever. Il n’y a pas 10 000 choses à dire. Il faut constater tout simplement que ceux qui sont chargés de passer les marchés et de contrôler l’exécution de ces marchés-là présentent des défaillances à plusieurs niveaux ».
Des sommes astronomiques
Quand le gouvernement évoque plus de mille milliards de francs pour moins de trois cents kilomètres, l’expert parle « d’aberration ». Il plaide pour un audit. Sinon, dit-il, « il faudra encore trente ans pour finir cette autoroute. »
L’ancien président de Transparency International Cameroun et candidat déclaré à la présidentielle, Akere Muna, parle, lui, d’un « scandale de corruption ». « Je ne sais pas ce qu’il se passe dans mon pays, le fait que les deux plus grandes villes ne soient pas reliées par une autoroute, c’est purement et simplement la honte ». Côté gouvernement, on explique que le coût englobe études et travaux. On explique aussi que la construction de ce tronçon de 141 km, confiée à une entreprise chinoise, China First Highway Engineering Company Ltd (CFHEC), à qui avait déjà été confiée la phase 1 des travaux, démarrera au second semestre de cette année pour s’achever fin 2028, selon le calendrier prévisionnel.