Par Sandra Embollo
Chacun sait que l’argent ne fait pas le bonheur, même s’il y contribue un peu. Mais saviez-vous que l’aisance financière ne permet pas (toujours) de vivre plus longtemps ? C’est ce que montre une étude dirigée par la chercheuse portugaise Sara Machado et publiée dans The New England Journal of Medicine, une revue éditée par la Massachusetts Medical Society. La scientifique et son équipe ont analysé les données de santé de près de 74 000 personnes aux États-Unis et dans 16 pays européens entre 2010 et 2022. Les résultats montrent que, chez les 25 % des Américains les plus riches, les indicateurs de longévité sont comparables à ceux des 25 % des Européens les plus pauvres. Ce constat s’applique à l’Europe centrale et du Nord, comme la France, l’Allemagne ou les Pays-Bas, et les résultats sont presque similaires pour l’Europe du Sud, notamment en Espagne et au Portugal.
Déclassement américain
Finalement, la richesse n’éloignerait-elle pas si efficacement la mort ? C’est d’abord ce que l’on pourrait croire… Mais pas si vite ! Cette étude, repérée par le quotidien portugais Publico, ne remet pas en question le lien établi entre l’aisance financière et la longévité. « Une plus grande richesse était associée à une mortalité plus faible chez tous les participants », insiste-t-elle. Dans chacun des pays européens analysés, en effet, ainsi qu’à l’intérieur des frontières des États-Unis, les individus appartenant au quartile des plus aisés affichent une longévité supérieure à ceux du quartile des plus modestes.
En revanche, elle met en évidence que ce lien s’efface si l’on compare les « États-Unis des riches » à « l’Europe des pauvres ». Cette observation scientifique a tout d’un déclassement pour la première puissance économique mondiale, dont le PIB par habitant (80 000 dollars) dépasse largement celui de l’Allemagne (53 000 dollars), de la France (46 000) et du Portugal (27 000). Plus encore, les Américains présentent toujours de moins bons indicateurs de longévité que les Européens, peu importe les quartiles étudiés. Selon l’Ined, l’espérance de vie à la naissance dans l’Union européenne s’établissait à 81,5 ans en 2023, contre 79,3 outre-Alantique.
Finalement, est-ce une surprise ? Le système de santé américain est régulièrement pointé pour ses défaillances. Un rapport français, publié ce 8 avril par Le Cercle de l’épargne, souligne ces dysfonctionnements, malgré le fait que les États-Unis sont le pays de l’OCDE consacrant la plus grande part de sa richesse nationale à la santé (17 % du PIB). « Ce poids économique colossal s’explique par une architecture de soins très particulière, profondément marchande, qui mobilise des ressources financières énormes mais dont les résultats sanitaires figurent parmi les plus médiocres du monde développé », précise le rapport. Comme quoi l’argent peut beaucoup, mais pas tout.