États-Unis | Zelensky quitte abruptement la Maison-Blanche après des échanges tendus avec Trump

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Par Arlette Akoumou Nga

Le président ukrainien a quitté la Maison-Blanche avant la conférence de presse qui devait avoir lieu en après-midi et au cours de laquelle son homologue et lui-même devaient signer l’entente, une activité qui a été annulée. Selon Cnn et Nbc News, c’est la Maison-Blanche qui a demandé à Volodymyr Zelensky et à la délégation ukrainienne, qui voulait rester pour les discussions à huis clos prévues, de partir. Non seulement l’entretien n’a pas permis à l’Ukraine d’obtenir les garanties de sécurité qu’elle cherchait à obtenir – un dénouement qui aurait déjà été surprenant vu les fins de non-recevoir opposées par l’administration Trump ces dernières semaines –, mais il a carrément viré à la catastrophe.

J’ai déterminé que le président Zelensky n’est pas prêt pour la paix si l’Amérique est impliquée parce qu’il pense que notre implication lui donne un grand avantage dans les négociations. Je ne veux pas d’avantage, je veux la PAIX, a écrit Donald Trump sur son réseau Truth Social après la rencontre.

Volodymyr Zelensky a manqué de respect envers les États-Unis dans ce bureau ovale chéri. Il pourra revenir à la Maison-Blanche quand il sera prêt pour la paix.

Un échange devenu de plus en plus tendu

Selon Cnn, la portion publique de la rencontre, qui n’était pas diffusée en direct, était en cours depuis une quarantaine de minutes quand les choses ont commencé à déraper.

Le ton a changé après l’intervention du vice-président J.D. Vance, qui a critiqué l’approche de l’ancien président américain Joe Biden et vanté la diplomatie privilégiée par Donald Trump. Le président ukrainien a alors rappelé que le président russe Vladimir Poutine avait violé l’entente de cessez-le-feu signée en 2019, qui devait mettre un terme aux combats dans l’est ukrainien, lancés en 2014.

Il a rompu le cessez-le-feu. Il a tué des gens de notre peuple. Il n’a pas échangé de prisonniers. Nous avons signé l’échange de prisonniers, mais il ne l’a pas fait, a plaidé le président ukrainien. De quel type de diplomatie parlez-vous, J.D.?

Je parle du type de diplomatie qui mettra fin à la destruction de votre pays, a riposté le vice-président américain, montant le ton. Je pense qu’il est irrespectueux de venir dans le bureau ovale et d’essayer d’argumenter devant les médias américains, a-t-il ajouté, l’accusant de manquer de reconnaissance envers les États-Unis.

Au président ukrainien qui lui demandait s’il avait constaté par lui-même les effets de la guerre dans son pays dévasté, J.D. Vance l’a accusé d’entraîner les politiciens qui vont en Ukraine dans une opération de relations publiques.

Je sais que ce qui se passe : […] vous les amenez dans une tournée de propagande, M. le président. Et pensez-vous qu’il est respectueux de venir dans le bureau ovale des États-Unis d’Amérique et d’attaquer l’administration qui tente d’empêcher la destruction de votre pays?

J.D. Vance, vice-président des États-Unis

Depuis des semaines, l’administration Trump a pourtant fait écho à la propagande du Kremlin, le président Trump accusant par exemple l’Ukraine d’avoir « commencé la guerre » et évoquant sa demande de se joindre à l’Otan comme cause de la guerre.

Vous avez un bel océan qui vous sépare du front, a répondu Volodymyr Zelensky, reprenant une image déjà utilisée par Donald Trump, et vous ne sentez pas [les impacts] pour l’instant. Mais vous les sentirez dans le futur. Que Dieu vous bénisse, vous n’aurez pas de guerre.

Donald Trump a pour sa part soutenu que son homologue russe n’oserait pas violer une entente qui serait conclue avec lui. Les Russes ne respectaient pas Biden. Ils ne respectaient pas Obama. Ils me respectent, a-t-il affirmé.

Vous jouez avec la troisième guerre mondiale. Vous n’avez pas les bonnes cartes en main, a dit Donald Trump. Vous devez être reconnaissant.

Vous concluez un accord ou, sinon, vous ne pourrez pas compter sur nous et, sans nous, vous devrez vous battre. Je ne pense pas que ce sera beau à voir, mais vous vous battrez, a-t-il dit, ajoutant que l’Ukraine serait en meilleure position avec une entente américano-ukrainienne sur les minerais.

Vous n’agissez pas du tout de manière reconnaissante et, pour être franc, ce n’est pas une bonne chose, a-t-il enchaîné, disant qu’il serait difficile de s’entendre.

Après l’entretien, le président Zelensky a adopté un ton différent de celui de son interlocuteur, remerciant le président Trump, le Congrès et le peuple américain sur le réseau X. Merci l’Amérique, merci pour votre soutien, merci pour cette visite. […] L’Ukraine a besoin d’une paix juste et durable, et nous travaillons exactement pour cela.

Plus tôt cette semaine, le premier ministre britannique Keir Starmer et le président français Emmanuel Macron avaient préparé le terrain pour leur allié ukrainien. Les développements de vendredi mettent à mal les timides avancées des dernières 24 heures, lorsque Donald Trump avait adouci le ton à l’endroit de son homologue. Après avoir notamment traité le dirigeant ukrainien de « dictateur » il y a une dizaine de jours, le président Trump avait vanté leur très bonne relation en disant avoir « beaucoup de respect pour lui ». La relation entre les présidents américain et ukrainien semble irréparable, a déclaré un responsable américain à Cnn.

En matinée, le président ukrainien avait par ailleurs rencontré des sénateurs des deux partis, indiquant sur le réseau social X que les discussions avaient notamment porté sur la poursuite de l’assistance militaire à l’Ukraine et sur l’importance de solides garanties de sécurité.

« L’Ukraine n’est pas seule »

En Europe, les manifestations de soutien à l’Ukraine ont fusé après l’altercation entre Volodymyr Zelensky et Donald Trump.

Plusieurs leaders ou ministres des Affaires étrangères de plusieurs pays, comme l’Allemagne, la France, la Pologne, de l’Espagne, se sont tournés vers les réseaux sociaux pour réitérer leur appui au pays qui a été envahi en 2022.

L’Ukraine n’est pas seule, a par exemple écrit la ministre allemande des Affaires étrangères, Annalena Baerboc.

L’Allemagne et ses alliés européens sont unis aux côtés de l’Ukraine et contre l’agression russe. L’Ukraine peut compter sur le soutien indéfectible de l’Allemagne, de l’Europe et d’ailleurs. Leur défense de la démocratie et leur quête de paix et de sécurité sont les nôtres, a-t-elle dit.

Alors que le camp républicain se garde largement de critiquer le président Trump, un élu républicain du Nebraska a pris la défense de l’Ukraine.

C’est un mauvais jour pour la politique étrangère de l’Amérique, a écrit le représentant Don Bacon dans une déclaration citée par le Washington Post.

L’Ukraine veut l’indépendance, le libre marché et l’État de droit. Elle veut faire partie de l’Occident. La Russie nous déteste, nous et nos valeurs occidentales. Nous devrions dire clairement que nous défendons la liberté, a-t-il ajouté.

Une entente en péril

Les détails de l’entente à laquelle en étaient venues les deux parties n’ont pas été rendus publics officiellement, mais le document obtenu plus tôt cette semaine par divers médias prévoyait la création d’un fonds commun dans lequel seraient investis des revenus issus de l’exploitation des ressources minérales ukrainiennes, dont le pétrole et le gaz.

L’accord-cadre n’incluait pas les garanties de sécurité auxquelles tenait Kiev. Il excluait également la demande américaine initiale de récupérer, par l’accès aux ressources ukrainiennes, l’équivalent de 500 milliards de dollars américains qu’exigeait Donald Trump en compensation de l’aide fournie à l’Ukraine.