Par Arlette Akoumou Nga
Le président français Emmanuel Macron a lancé samedi 11 novembre un message d'”unité” au nom des valeurs françaises d'”universalisme” avant la marche dimanche contre l’antisémitisme, à laquelle il ne participera pas mais sera présent “par la pensée”.
“Une France où nos concitoyens juifs ont peur n’est pas la France”, a estimé le président de la République dans une Lettre aux Français publiée dans Le Parisien. Il a déploré “l’insupportable résurgence d’un antisémitisme débridé” à propos de la recrudescence des actes antisémites dans le pays depuis le début de la guerre au Proche-Orient déclenchée par les massacres du Hamas en Israël, le 7 octobre.
“Qu’il soit religieux, social, identitaire ou racial, l’antisémitisme est toujours tel que le présentait Émile Zola : odieux”, écrit le chef de l’État à la veille d’une “grande marche civique” qui, selon lui, doit montrer une France “unie derrière ses valeurs, son universalisme”. Voyant “un motif d’espérance” dans les marches organisées dimanche “pour la République, contre l’antisémitisme, pour la libération des otages et pour la paix”, il estime qu’elles “exprimeront ce qui est l’essence-même du projet français : le refus de l’assignation à différence. La défense de l’universalisme”.
“Cette lutte contre l’antisémitisme ne doit jamais nous diviser ni jamais conduire à opposer certains de nos compatriotes à d’autres. Dans notre Histoire, l’antisémitisme fut toujours le prélude à d’autres haines et au racisme”.
insiste-t-il.
Le chef de l’État a longuement hésité à manifester dimanche mais sera finalement présent “par le cœur et par la pensée”. Il avait indiqué plus tôt dans la journée qu’il voyait “beaucoup de confusion” et de “récupération” politiques.
En marge des commémorations de l’Armistice de 1918, il avait répondu à une femme se présentant comme une arrière-petite-fille du capitaine Dreyfus, qui lui disait être “déçue” par son absence à la manifestation. “Je n’ai jamais été à une manifestation quelle qu’elle soit”, avait-il justifié, désireux “d’être ferme sur les valeurs” et “d’agir, sinon je peux manifester toutes les semaines”. Les actes antisémites se sont multipliés en France depuis le 7 octobre : “trois fois plus d’actes de haine contre nos compatriotes juifs en quelques semaines que pendant toute l’année passée”, rappelle Emmanuel Macron dans sa Lettre.
Le président avait déjà mis en garde contre tout amalgame entre “le rejet des musulmans et le soutien des juifs”, visant l’extrême droite, dont la présence annoncée à la marche suscite l’embarras à gauche et dans la majorité étant donné son histoire. La participation du Rassemblement national (extrême droite), “un parti politique créé par les héritiers de Vichy”, ce n’est “pas de l’unité mais de l’indécence”, juge le porte-parole du gouvernement Olivier Véran dans Le Parisien.
La cheffe de file des députés RN, Marine Le Pen, considère pour sa part que la marche devrait “rassembler” les Français autour du rejet à la fois de l’antisémitisme et du “fondamentalisme islamiste qui est une idéologie totalitaire”. La France insoumise (gauche radicale) de Jean-Luc Mélenchon, accusé d’ambiguïtés sur l’antisémitisme, boycotte de son côté la manifestation du fait de la présence du RN, même si des Insoumis devraient se ranger derrière d’autres initiatives dimanche, à Paris ou en province.
Le président des Républicains (droite) Éric Ciotti a de son côté demandé à Emmanuel Macron de “clarifier les motifs” qui l’ont conduit à ne pas venir dimanche, estimant que le “‘en-même-temps’ n’est définitivement plus praticable”.
Un important dispositif de sécurité déployé
“Pour la République, contre l’antisémitisme” : c’est derrière cette banderole que les présidents de l’Assemblée nationale, Yaël Braun-Pivet, et du Sénat, Gérard Larcher, mèneront le cortège parisien, qui reliera le palais Bourbon et celui du Luxembourg, à partir de 15 h, au départ de l’esplanade des Invalides.
Le carré de tête à Paris réunira des personnalités “incarnant” la République, mais “pas de chefs de parti”, avec au premier rang la Première ministre Élisabeth Borne, dont le père de confession juive a été déporté, les ex-présidents François Hollande et Nicolas Sarkozy. Environ 25 ministres devraient marcher dimanche à Paris et une dizaine en province, selon Matignon.
Un important dispositif de sécurité sera déployé avec “plus de 3 000 policiers et gendarmes” ainsi que “des unités d’élite mobilisées”, selon le ministre de l’Intérieur, Gérald Darmanin.
Les partis de gauche Eelv, Ps et Pcf, ainsi que des associations de défense des droits humains et des organisations de jeunesse défileront derrière une banderole commune “contre l’antisémitisme et tous les fauteurs de haine et de racisme” dans une démarche de “cordon républicain” face à l’extrême droite. De nombreux représentants des cultes seront aussi présents.