Par Léopold DASSI NDJIDJOU
Le Cameroun est un pays doté d’une abondante diversité génétique associé à son extraordinaire biodiversité. Ces ressources génétiques constituent un atout avec le potentiel de contribuer grandement au développement socio-économique. A ce titre le pays a pris plusieurs initiatives pilotes avec la promulgation de la loi du n°2021/041 du 9 juillet 2021 et son décret d’application du 6 octobre 2023, qui sont désormais en place. « Le respect de ce cadre règlementaire offre de nombreuses opportunités pour développer le tissu industriel local dans le cadre des partenariats gagnants-gagnants et contribue à augmenter les revenus de l’Etat et des communautés locales grâce au partage des bénéfices générés au bout des chaînes de valeurs des ressources génétiques », comme l’a si opportunément déclaré le Minepded, Hele Pierre. Dans cette lancée, il a souligné qu’en dépit de l’adoption de ces instruments, le pays ne tire pas encore de substantielles revenues de sa riche biodiversité. Près de 80% par exemple des habitants des zones rurales du Cameroun ont recourt aux médicaments traditionnels à base plantes pour les soins de santé de base. Ce recours massif à la pharmacopée traditionnelle est confirmé par de nombreux travaux pharmacologiques dans les laboratoires du pays, ce qui met en évidence l’efficacité des plantes médicinales dans le traitement de nombreuses affections, sans pour autant se conformer aux mécanismes Apa. « Il a été démontré que chaque année, 592 tonnes de Prunus Africana sont vendus en marge de l’Apa, à raison de 600 Fcfa le Kg. Cette vente rapporterait chaque année au Cameroun 355 millions de Fcfa. De ce fait, si l’on considère le scénario au Brésil, où la réglementation prévoit que 1% du bénéfice est partagé avec les communautés, cela ferait un retour aux communautés d’environ 150 millions de Fcfa chaque année », a martelé le patron de l’Environnement au Cameroun. Il a poursuivi en estimant que si 22 espèces camerounaises faisant l’objet d’une commercialisation des ressources génétiques, étaient exploitées suivant le processus Apa, avec l’hypothèse du chiffre d’affaire comparable à celui du Prunus Africana, dans le respect de la réglementation Apa du Cameroun, avec une marge d’erreur de 10%, les retombées financières pourraient être évaluées à environ 3 milliards de Fcfa. « Si nous considérons 1000 espèces camerounaises qui font l’objet de travaux de recherche poussée dans divers laboratoires nationaux et internationaux, c’est environ 150 milliards de Fcfa qui rentreront dans le Trésor public chaque année », a-t-il déclaré sentencieusement. Pour aller plus loin dans la perspective des estimations, il faut noter que le Cameroun a un potentiel riche en biodiversité estimé à plus de 11.173 espèces parmi lesquelles : 9000 espèces de plantes, 849 espèces d’oiseaux, 409 espèces de mammifères, 183 espèces de reptiles, 190 amphibiens et 542 espèces de poissons.
Un atelier sur Apa
Le projet Apa va s’exécuter dans deux régions pilotes du pays, le Sud-Ouest et l’Extrême-Nord. Les Fonds pour l’environnement mondial a accordé à cet effet 2 millions de dollars Usd, soit 1.199.608.900 Fcfa pour l’exécution du projet « Appui à la mise en œuvre du Protocole de Nagoya, à la recherche et au développement des chaînes de valeur de la biodiversité pour les petit exploitants des régions du Sud-Ouest et de l’Extrême-Nord ». Ce projet approuvé par le Conseil du Fonds pour l’environnement mondial (Fem) en faveur du gouvernement de la République du Cameroun, à travers le Minepded, aura une durée de trois ans. Il a comme agence d’exécution le programme des Nations-Unies pour l’environnement (Pnue) et l’agence de mise en œuvre, le Minepded. L’objectif du projet est de soutenir l’opérationnalisation du cadre national de l’Apa, en permettant l’accès aux ressources génétiques et aux connaissances traditionnelles associées qui génèrent des avantages économiques nationaux et locaux tangibles de leur utilisation commerciale de manière juste, équitable et durable. « L’objectif principal de l’atelier est d’amener les parties prenantes du projet à comprendre, à s’approprier et à finaliser la préparation du premier plan de travail annuel basé sur le cadre de résultats du projet et l’outil de suivi du Fem », a déclaré le maître des céans. L’atelier fournira un autre cadre pour réviser le cadre de résultats du projet en fournissant des détails supplémentaires si nécessaires ; d’élaborer des objectifs spécifiques d’indicateurs de progrès pour la première année de mise en œuvre ainsi que leur moyens de vérification, afin d’évaluer si la mise en œuvre se déroule comme prévu et dans la bonne direction pour faire partie du plan de travail annuel, entre autres. Apa fait partie de nouveaux instruments de marché pouvant contribuer à la conservation de la biodiversité et à l’amélioration des conditions de vie des communautés, car il offre des incitations et permet de mobiliser des moyens financiers pour les gouvernements nationaux à servir la cause de la conservation de la biodiversité. Au niveau local, les retombées pour les communautés peuvent les inciter à mieux conserver, à mieux utiliser durablement la biodiversité, mais également à générer des emplois et à améliorer leurs conditions de vie. A l’ouverture de l’atelier, il y avait des représentants du programme des Nations-Unies pour l’environnement (Pnue), du Fonds pour l’environnement mondial (Fem), les directeurs et assimilés, des représentants des organisations internationales, de la Société civile, des peuples autochtones, entre autres.