Par Sandra Embollo
La réplique a volé, cinglante. Pour la première fois depuis le début de son second mandat à la Maison-Blanche, Donald Trump a balayé mardi l’évaluation de la directrice du renseignement national (Dni) Tulsi Gabbard, selon laquelle l’Iran n’est pas en train de fabriquer une arme nucléaire, contredisant publiquement son chef des services d’espionnage. S’adressant aux journalistes à bord d’Air Force One alors qu’il rentrait plus tôt que prévu à Washington après le sommet du G7 au Canada, un journaliste a demandé au président américain à quel point il pensait que l’Iran était proche de disposer d’une arme nucléaire. «Très proche», a-t-il succinctement répondu. Le journaliste lui a rappelé des propos tenus par Tulsi Gabbard devant le Congrès en mars, lorsque l’ex-élue démocrate, au nom du renseignement américain, continuait à estimer que Téhéran ne travaillait pas sur une ogive nucléaire. Réponse sèche du milliardaire : «Je me fiche de ce qu’elle a dit. Je pense qu’ils étaient très proches d’en avoir une.»
Ce n’est pas la première passe d’armes de Donald Trump avec le renseignement américain. Le chef d’État a souvent désavoué les conclusions des agences de renseignement américaines, que lui et ses soutiens ont accusé – sans fournir de preuves – de faire partie d’une cabale de «Deep State» (l’«État profond») composée de fonctionnaires américains opposés à sa présidence.
En moins de six mois, le président des États-Unis a limogé des cadres respectés des grandes officines et placé des fidèles, parfois sans réelle compétence, à des postes-clefs. Ses attaques récentes contre quiconque n’adopte pas le mantra présidentiel font frémir le milieu du renseignement, alors que le chef de la NSA (écoute et cyberespionnage) et son adjointe ont été remerciés.
Soutien de Trump
Tulsi Gabbard est pourtant une proche de Donald Trump. Nommée directrice du renseignement national en début d’année, alors que de nombreux démocrates s’y opposaient, cette ancienne lieutenant-colonel s’était notamment vu reprocher de faire écho aux arguments du Kremlin pour justifier la guerre en Ukraine. Elle avait également exprimé ses doutes sur les conclusions du renseignement américain selon lesquelles le désormais ex-président syrien Bachar el-Assad, allié de la Russie, avait utilisé des armes chimiques contre son peuple.
Devant le Congrès, au cours de son audition peu après le retour au pouvoir de Donald Trump, Tulsi Gabbard a assuré qu’ils étaient «sur la même longueur d’onde» en ce qui concerne le statut du programme nucléaire iranien. La directrice du DNI a également précisé que les agences d’espionnage américaines ne croyaient pas que le guide de l’Iran, l’ayatollah Ali Khamenei, avait ordonné le redémarrage d’un programme d’armement nucléaire que l’Agence internationale de l’énergie atomique (AIEA) avait jugé terminé en 2003.
En rejetant le jugement de Tulsi Gabbard, Donald Trump défend la justification donnée par le premier ministre israélien, Benyamin Netanyahou, pour lancer la semaine dernière des frappes aériennes sur des cibles nucléaires et militaires iraniennes, en disant qu’il pensait que Téhéran était sur le point d’avoir une ogive nucléaire. De son côté, l’Iran nie avoir développé des armes nucléaires et affirme que son programme d’enrichissement de l’uranium ne sert qu’à des fins pacifiques.