Par Sandra Embollo
Dans un pays où les militaires répriment toute voix discordante et ont réduit l’opposition au silence, le rassemblement n’est pas passé inaperçu : lors d’une rare prise de position publique, ce samedi 26 avril à Bamako, une coalition rassemblant une centaine de partis politiques maliens a réitéré son opposition à leur dissolution par la junte au pouvoir.
Lors de cette conférence de presse organisée sous la surveillance d’un important dispositif policier à la Maison de la presse, les intervenants se sont succédé pour appeler « à défendre la liberté d’expression, la liberté d’association, le multipartisme et la démocratie aujourd’hui menacés » au Mali, pour reprendre les mots du Dr Modibo Soumaré, président de l’Alliance des forces démocratiques.
« Les partis politiques ne constituent pas un problème pour le Mali. Au contraire : ils constituent une solution. Les problèmes du Mali sont ailleurs. C’est l’insécurité, la cherté de la vie, ainsi que les enjeux liés à la santé et à l’éducation ».
a pour sa part déclaré le président du parti Yelema, Youssouf Diawara.
« Nous ne voulons pas d’instance pour nous limiter »
Tous les partis mobilisés ont aussi tenu à le souligner : le Mali est aujourd’hui doté d’une Constitution qui a été adoptée sous la junte. Entrée en vigueur, elle empêche donc leur dissolution. « La Constitution du Mali dit que les partis exercent librement leurs activités. Mais, elle ne dit pas qu’il faut [nous] limiter. Nous ne voulons donc pas d’instance pour nous limiter ou nous dissoudre », a ainsi rappelé Mountaga Tall, le président de la coalition qui réclame aussi le retour à l’ordre constitutionnel dans le pays. Les militaires au pouvoir ont manqué à leur engagement de remettre le pouvoir aux civils à la fin du mois de mars 2024 et ont reporté la présidentielle à une date toujours inconnue.
Cette conférence de presse s’est déroulée alors que se tiennent depuis deux semaines des concertations encadrées par les autorités pour élaborer une charte des partis qui comprend, notamment, la proposition de dissoudre les formations politiques existantes pour ne garder qu’une poignée de partis favorables à la junte. Cette charte est une des recommandations des Assises nationales de la refondation organisées par les militaires en décembre 2022 pour « construire une solution de sortie de crise » au Mali.
Des craintes renforcées par la situation régionale
Les partis soupçonnent la junte de vouloir les dissoudre ou suspendre comme au Burkina Faso et au Niger voisins, également dirigés par des régimes militaires et alliés du Mali au sein de l’Alliance des États du Sahel (AES).
“Il y a eu dissolution des partis au Niger et au Burkina. Il n’y a pas de Constitution dans ces deux pays, mais au Mali, oui”.
a ajouté Mountaga Tall.
Dans leur déclaration commune, les partis ont toutefois affirmé “leur solidarité avec l’armée”.
La coalition de partis à l’origine du point presse avait aussi prévu de tenir un meeting, ce dimanche 27 avril, dans la capitale, mais le rassemblement a été annulé par les autorités.