Par Serge Aimé BIKOI
Au cours d’une conférence de presse conjointe donnée, ce jour, Me Alice Nkom, co-présidente du conseil d’administration du Redhac, Phillipe Nanga, le coordonnateur national de l’Ong Un Monde Avenir, Me Charlotte Tchakounte, tête de proue du groupe Action 237, etc ont croisé le verbe avec les journalistes pour dénoncer les atteintes à l’État de droit et la violation flagrante des droits fondamentaux des Osc au Cameroun.
La plateforme des Organisations de la société civile du Littoral et le groupe Action 237 décrient, sans complaisance, la restriction de l’espace civique imposée à certaines organisations depuis six mois. C’est notamment le cas du Réseau des défenseurs des droits humains en Afrique centrale (Redhac) qui, le 7 décembre 2024, a, à travers les réseaux sociaux, pris connaissance des arrêtés du 6 décembre 2024 le suspendant pour une durée de trois mois sans aucun avertissement, ni mise en demeure par le ministre de l’Administration territoriale (Minat).
“Le lundi, 9 décembre, indiquent des leaders des Osc, au moment où le personnel de cette structure voulait accéder à ses bureaux pour vaquer à ses occupations, en attendant une notification officielle de la note du Minat, les locaux ont été assaillis par le sous-préfet de l’arrondissement de Douala 1er, un commissaire de police principal, ainsi que par des forces de l’ordre, lesquels ont, sans façon, expulsé ce personnel. La directrice exécutive n’étant pas à Douala, les employés ont appelé la co-présidente du conseil d’administration, Alice Nkom, qui est arrivée rapidement et a trouvé que les scellés avaient été apposés sur les principales portes d’entrée du bureau par ces autorités sus citées”.
Après avoir procédé au bris des scellés ce jour-là, le Préfet du département du Wouri a intenté une procédure judiciaire contre Alice Nkom, co-Pca, et Maximilienne Ngo Mbe, directrice exécutive du Redhac au Tribunal de première instance de Douala Bonanjo pour “Bris de scellés et rébellion en coaction”. La dernière audience de cette affaire s’est passée dans cette juridiction compétente en présence des prévenus et du ministère public. L’affaire a été renvoyée au 4 août 2025. Entre-temps, cela fait six mois que le siège du Redhac est toujours scellé alors que cette interdiction d’exercer et de fonctionner n’avait qu’une durée de trois mois. Des leaders de la société civile informent l’opinion publique que le Redhac a transmis au ministère de l’Administration territoriale (Minat) toute la documentation administrative et financière relative à la mise en œuvre de ses activités le 29 janvier 2025 au Minat et le 28 mars à la Préfecture du Wouri. Si depuis décembre 2024 jusqu’à date, les locaux du Redhac sont encore sous scellés alors que la suspension était pour une durée de trois mois,
“il y a lieu, indiquent la plateforme des Organisations de la société civile et le groupe Action 237, de constater un abus grossier actuellement soutenu par les renvois des procédures civiles et pénales. Il ne fait l’ombre d’aucun doute que la finalité de tout ce qui précède consiste à empêcher la réouverture du Redhac”.
À cause de cet état de choses, Me Alice Nkom et cie formulent des interrogations ci-après : Qu’est-ce qui justifie le maintien des scellés au siège du Redhac plus de trois mois après expiration du délai de suspension ? Qu’est-ce qui justifie le fait que la Directrice exécutive du Redhac soit convoquée pour une affaire, dont les faits injustement reprochés, ont été commis alors qu’elle était hors du pays? Pire encore, la plateforme des Organisations de la société civile (Osc) et le groupe Action 237 ont découvert, sur les réseaux sociaux, la note du Minat du 24 mars 2025 adressée au coordonnateur du Système des Nations unies au Cameroun avec pour objet : financement des organisations à but non lucratif (Obnl). Par la suite, ils ont eu la confirmation de plusieurs représentations diplomatiques que la lettre du ministère de l’Administration territoriale citée supra leur avait été également transmise.
En effet, la lettre dont il est question fait mention d’une liste de 104 organisations à but non lucratif comme étant les seules habilitées à exercer au Cameroun. Dans cette liste, le Minat met en avant certaines dispositions qui, selon lui, accordent l’exclusivité de subvention aux Ongs. Alors, le problème soulevé par des entrepreneurs de la société civile est lié au fait que la lettre du Minat déclare qu’il existe seulement 104 organisations à but non lucratif autorisées à exercer au Cameroun alors que les documents officiels reconnaissent plus de 60.000 Obnl. Illustration : la Plateforme des organisations de la société civile (Plafoscil), qui compte au moins 50 Obnl disposant d’un siège, n’a aucune organisation figurant sur cette liste.Alice Nkom, Charlotte Tchakounte, Philippe Nanga, etc expliquent que la lettre du Minat arrive au moment où le Cameroun est engagé à poursuivre la réforme du cadre juridique des associations enclenchée depuis une dizaine d’années. Un encadrement juridique national reconnu comme étant en décalage avec l’encadrement régional, particulièrement les lignes directrices de l’Union africaine sur la liberté de réunion et d’association. La plateforme des Osc et le groupe Action 237 s’interrogent donc sur l’intérêt de s’attaquer à la liberté d’association et à ses sources de financement au moment où les Osc sont appelées à se déployer sur le terrain pour la prévention des conflits électoraux, la préservation de la paix et la cohésion sociale.