Par Ilyass Chirac Poumie
Quarante-trois ans de règne, et le Cameroun vit l’une des périodes les plus sombres de son histoire. Les caisses de l’État sont vidées par les détournements, les enfants meurent faute de soins dans des hôpitaux délabrés, et les familles s’éclairent encore à la bougie en 2025. Pendant ce temps, le cercle présidentiel dilapide des milliards dans des soirées mondaines à Genève, dans des commissions occultes sur les hydrocarbures (affaire Glencore), ou dans des marchés publics truqués liés à la gestion du Covid-19.
À 92 ans, Paul Biya n’est plus qu’une figure spectrale, absente de son propre pays, mais toujours accrochée à un pouvoir qu’il exerce à distance, laissant une élite prédatrice s’enrichir. Le fossé entre le peuple et ses dirigeants est abyssal : d’un côté, un Cameroun meurtri par la misère et l’injustice sociale ; de l’autre, une caste qui s’accroche aux privilèges, transformant l’État en entreprise privée. Cette décadence n’est plus seulement politique : elle est morale, historique et nationale.

Depuis son arrivée au pouvoir en 1982, Paul Biya s’est maintenu grâce à un appareil d’État verrouillé, des fraudes électorales répétées et un usage systématique de la répression. Les contestations majeures de 1992 et 2018 ont été étouffées, renforçant l’image d’un régime autoritaire. Aujourd’hui, alors que la jeunesse camerounaise réclame le changement, le régime Biya est éclaboussé par une série de scandales internationaux (Glencore, qui a révélé des pots-de-vin versés à des hauts responsables camerounais ; Covidgate, avec des milliards de fonds disparus ; et les dépenses somptuaires de la présidence). L’histoire retiendra un pouvoir qui, au lieu de bâtir une nation prospère, a enfoncé le Cameroun dans la pauvreté, la corruption et le mépris de son peuple.
