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Par Léopold DASSI NDJIDJOU
La première et évidente question est de savoir comment Issa Tchiroma Bakary peut critiquer violemment le régime et rester encore au gouvernement. Et s’il aurait en dépit de ses propos tranchants contre le régime du Renouveau, encore l’intention de faire partir de l’équipe gouvernementale ? Incompréhensible ! Cela ne ressemble pas au très futé Issa Tchiroma Bakary.
En dépit de cette sortie tonitruante contre le pouvoir, pourquoi Joseph Dion Ngute ne le vire-t-il pas du coup à défaut de lui remonter publiquement les bretelles ? Pourquoi et pourquoi? L’histoire politique récente du pays montre que ceux des ministres qui ont voulu prendre leur liberté , ont pris soin préalablement de démissionner du gouvernement.
Le cas Tchiroma qui, cela soit dit en passant, est un opposant incrusté au sein de la majorité présidentielle, préoccupe l’opinion. Transfuge de l’Union nationale pour la démocratie et le progrès (Undp) de Bello Bouba Maigaïri, il a crée dans la foulée le Front national pour le salut du Cameroun (Fnsc), singularisant par là ses marques et ancrant aussi bien sa longévité aux affaires que celle de parti dans les Institutions politiques.
Comment comprendre le volte-face de l’homme politique contre Paul Biya alors qu’aucune brouille ouverte n’est signalée ?
La deuxième question est liée au brouillage géopolitique en cours dans le Grand Nord. Un brouillard épais couvre le terrain et il est malaisé d’observer distinctement le jeu des uns et des autres. Ce brouillard à lui seul est un camouflet pour le régime surtout avec l’entrée en scène des nouveaux acteurs intrépides et culottés dont leurs intentions et leurs objectifs politiques épousent l’état brumeux du terrain. Ils sont difficiles à lire, insaisissables, et particulièrement remuants entre les frontières des partis politiques, s’ils n’y sont pas déjà.
Parmi ces acteurs nouveaux, il y a Abdourame Baba, Aboubacar Ousmane Mey ou Guibaï Gatama. Tous s’appuient sur le socle du Grand Nord pour se projeter sur tout le pays. Toute chose qui met particulièrement à mal l’establishment politique et commande de réagir au plus vite ou de courir après les évènements. On pourrait bien situer la sortie du ministre dans ce sillage, dans un jeu où le Cheval de Troie est la stratégie de tous, où tout le monde évolue à visage masqué.
La troisième question serait de toute évidence liée à la sortie de l’Undp qui annonce une rencontre au sommet de son Comité central le 28 juin prochain où il sera décidé si Bello Bouba sera candidat ou pas à la prochaine élection présidentielle. Cela doit sentir du roussi aux sens de Tchiroma Bakary car s’il est acté que son adversaire politique du Nord sera candidat avant lui, au sein de l’opinion, il pourra bien être tagué comme un suiveur. Ce qui peut lui être gravement préjudiciable. Après le 28 juin, on en saura un plus de quoi il en retourne.
La quatrième question serait de savoir s’il s’agit d’une commande du pouvoir, mettant Issa Tchiroma Bakary en selle pour une stratégie globale de conservation du Graal. Dans ce cas, on comprendrait que le pouvoir veut maintenir et préserver les acquis en optant pour une stratégie de scissiparité. En voyant le rez-de-marée de l’opposition, en l’occurrence la démonstration de Maurice Kamto à Paris et à Douala, le pouvoir peut s’automutiler comme le font les protozoaires pour échapper aux attaques ou pour se reproduire.
La sortie de Tchiroma, une mèche allumée par le régime à défaut d’éteindre les coups d’éclat de l’opposant, les banaliser? C’est aussi le temps qui va clarifier les choses, avec les différentes candidatures annoncée et retenues à la présidentielle. Une chose est certaine, les convulsions de la présidentielle ont commencé par le Grand Nord. Le terrain y devient particulièrement glissant, ténébreux et redoutable. L’incertitude est le maître mot dans un champ qui livre la volonté d’une recomposition politique, d’une redistribution des cartes. C’est le moment fou et redouté des acteurs politiques.
