Par Léopold DASSI NDJIDJOU
Les dignitaires de l’Eglise catholique au Cameroun ont enfoncé un autre clou sur le cercueil de leur discrétion d’autrefois au sujet des élections au pays de Paul Biya. Dans leur sortie épistolaire, ils interpellent Elecam, et particulièrement la direction générale des élections, sur l’obligation de suivre les prescriptions de la loi électorale.
Les hommes de Dieu soulignent ici les prescriptions de l’article 80 qui obligent l’institution chargée de l’organisation des élections au plus tard le 30 décembre de chaque année. C’est une exigence qui vient légitimer, donner une sorte d’onction et de poids à celle que mène l’opposition depuis un certain temps sous la houlette du Mrc.
On se souvient que sur la question, Elecam n’est pas particulièrement sereine et donne des explications très peu convaincantes aux yeux de ses contempteurs. Entre attaque de son site ou de l’impossibilité matérielle de publier en un lieu près de huit millions de noms, l’opinion ne sait plus où donner son bon sens.
Faudrait-il rappeler qu’Erik Essousse, le patron de l’organisation du scrutin a été traîné devant les juridictions par le Mrc pour que la justice l’ oblige à se soumettre à la loi ? Et que sur le coup, le Conseil constitutionnel a déclaré son incompétence en demandant aux requérants de s’adresser soit à la Cour d’appel soit au Conseil électoral ? On était donc en face de ce qui s’apparente à une sorte de denie de justice que la mastodonte de la Conférence nationale épiscopale du Cameroun est entrée en scène pour réitérer la demande légale de publier la liste électorale nationale.
Cette entrée en scène vient au moment où en Côte d’Ivoire, un pays qui organise sa présidentielle le 25 octobre avec presque les mêmes chiffres au niveau du corps électoral, a rendu publique sa liste électorale nationale en la distribuant dans une clé USB aux différents partis politiques engagés dans la course. Le Conseil électoral indépendant (Cei) le pendant d’Elecam au Cameroun, a organisé en toute transparence le scrutin en concertation avec les différentes parties. “Il est, en effet, du devoir de l’Église Catholique de s’engager dans ledit processus pour que soit garantie une élection transparente, libre, juste et équitable. Il s’agit en outre de renforcer la confiance et susciter une large participation des électeurs au scrutin”, écrivent in extenso les prêtres dans leur lettre.
Bien plus, ils précisent que cette lettre a pour but de faire retrouver aux fidèles le sens du politique, de donner des repères clairs, pour nourrir la réflexion et éclairer la conscience pour un choix libre et responsable. Elecam,
Elecam, une fuite en avant?
Il faut relever que ce trou d’air dans lequel s’engagent les évêques avait été en dehors de l’opposition, bien été élargie à l’Assemblée nationale par la doyenne d’âge dans son discours de la rentrée en présence des corps de l’Etat. Le 11 mars 2025, Laurentine Koa Mfegue martelait clairement du haut de la chaire que ceux qui sont en charge d’organiser, qu’ils organisent conformément aux règles établies.
Ce jour-là, l’Assemblée nationale jetait un pavé salvateur dans la mare en affichant aux yeux de la communauté nationale et internationale son indépendance d’esprit sur le coup. Quelle suite face avec cette sortie des évêques du côté d’Elecam? La demande devient de plus en plus pressante avec cette sortie des prélats du moment où on voit sur les plateaux de télévision brandir deux cartes électorales présumées appartenir à un seul et même électeur.
Toute chose qui fait enfler la polémique sur une possibilité des doublons dans le fichier. Comme qui dirait, Elecam a du pain sur la planche.